Chapitre 1 - Georges

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- Pourquoi ?

- C'est là que vous avez rencontré Georges, n'est-ce pas?

- Oui... mais comment le savez-vous ? Qui êtes-vous ?

La peur se lisait clairement sur le visage de Lucie qui n'arrivait plus à cerner ce qui lui arrivait.

- Je m'appelle Benjamin Bimaro, j'ai vingt-cinq ans et je suis célibataire.

- Et quel est le lien que vous aviez avec Georges ?

- Aucun lien... a priori.

- Que voulez-vous dire ?

- Je suis son remplaçant... en quelque sorte.

- Son remplaçant ? Mais de quoi est-ce que vous parlez ?

- Vous pouvez tout me dire, Lucie. Georges est mort, il n'est plus nécessaire de le protéger.

- De le protéger ? Mais... mais expliquez-vous! dit-elle d'un ton ferme.

- C'est à vous de m'expliquer ce que vous savez de lui !

Elle se leva, affolée.

- Je ne sais pas qui vous êtes, dit-elle, mais je ne resterai pas une minute de plus dans ce train.

- Si vous le quittez, des centaines d'âmes innocentes mourront.

- Quoi ? dit-elle horrifiée.

- Vous avez très bien compris. Vous êtes la seule à pouvoir les sauver. Alors faites-moi confiance.

- Jamais ! hurla-t-elle.

Il se leva à son tour. Le wagon était vide.

- A l'instant même où vous franchirez cette porte, j'appuierai sur un bouton qui enclenchera le détonateur de la bombe qui est placée dans une poubelle du quai numéro trois. Regardez par la fenêtre et voyez tous ces enfants qui partent en excursion. Vous ne voudriez tout de même pas que tout se termine ainsi ?

Livide, son sac s'échappa de ses mains. Elle s'approcha de la fenêtre tout en tremblant comme jamais.

- Pourquoi ? dit-elle en prononçant lourdement chaque mot.

- Revenez vous asseoir et il ne se passera rien.

- Qui êtes-vous?

- Je vous l'ai dit. Je m'appelle Benjamin...

- NON ! cria-t-elle. Qui êtes-vous vraiment ?

- Vous savez qui je suis !

- Je ne comprends rien ! Je vous assure que je ne comprends rien !

Les yeux de Lucie s'écarquillèrent d'horreur. Instinctivement, elle regarda tout autour d'elle, en vain, le wagon était désert. Brusquement, le train siffla. Les grandes portes automatiques se fermèrent. Ligotée par la hantise de l'explosion et emprisonnée par la curiosité sur Georges, elle resta immobile.

Le train démarra.

- Venez vous asseoir, dit-il très calme.

- Vous bluffiez, n'est-ce pas? demanda-t-elle au bord de la crise de nerf.

Lentement, il retira de sa poche un petit boîtier noir. Deux boutons rouges ornaient la face avant.

- Vous voyez ce bouton? dit-il. Et bien si j'appuie, tout explose ! Alors, vous croyez toujours que je bluffe ?

- Arrêtez, s'il vous plaît !!

- Je veux que vous vous rendiez compte de la situation, Lucie. Ici, on ne joue pas !

Le bruit des roues du train sur les rails se synchronisait avec les battements de cœur de Lucie. De plus en plus vite, de plus en plus fort...

- Que voulez-vous de moi ?

- Je veux tout savoir sur Georges ! Absolument tout !

****


Une sensation d'étouffement s'empara de son corps tout entier. Elle avait envie de crier sa folie, de hurler au secours, mais aucun son ne sortait de sa bouche paralysée.

Tout à coup, d'un geste brusque et inattendu, elle réussit à se lever. Elle ouvrit les yeux, le visage en sueur, les bras et les jambes en coton, le cœur haletant.

Un poids de mille tonnes s'effondra tout à coup sur elle lorsqu'elle se retourna pour observer qui était à côté d'elle dans son lit.

C'était Georges.

Elle sursauta, c'était impossible ! Elle rêvait ! Et pourtant non, il était bien allongé à côté d'elle, les paupières fermées, visiblement plongé dans un profond sommeil.


Consternée, elle se leva tout en reculant lentement comme pour effacer cette vision de sa mémoire. Il fallait qu'elle se réveille de ce terrible cauchemar, elle ne comprenait plus rien. Tout était tellement flou et incompréhensible !

C'est toujours sous le choc de cette terrible épreuve qu'elle se précipita dans la cuisine se verser un verre d'eau.

Soudain, Georges entra. Le verre se déroba de ses mains pour se pulvériser au sol.

Georges se mit à rire.

- Je te terrifie à ce point ? dit-il à moitié endormi.

Elle ne répondit pas.

Complètement tétanisée, elle ne cessa de le fixer.

- Qu'y a-t-il ? J'ai perdu mon pyjama en route ?

- Georges ? dit-elle dubitative.

- Et bien oui, quoi ?

- C'est bien toi ?

- Mais enfin Lucie ! Qu'est-ce qui t'arrive ?

- Mon Dieu, je n'en sais rien... j'ai l'impression d'avoir fait un cauchemar tellement terrible et tellement réel à la fois que... que je ne sais plus ce qui est vrai ou non.

Il s'approcha d'elle lentement, un peu inquiet.

- Raconte-moi, de quoi as-tu rêvé ?

- Je ne sais pas si c'est une bonne idée d'en parler maintenant. Je crois que je vais m'allonger un peu, ça ne va pas bien...

- Comme tu voudras. On en reparlera ce soir. Je me dépêche, je suis en retard. On m'attend au bureau.

Chancelante, Lucie quitta la cuisine laissant en plan les morceaux de verre brisés à terre. Elle regarda tout autour d'elle comme pour vérifier qu'elle ne rêvait pas encore. Pourtant, tout était bien là. Elle était bien chez elle, dans son petit appartement bruxellois. Rien n'avait bougé, rien n'avait changé.

Elle retourna dans sa chambre, de plus en plus perplexe. Georges n'était pas mort, jamais il ne l'avait été. Alors pourquoi ? Pourquoi l'a-t-elle rêvé si fort que lorsqu'elle s'était réveillée elle n'avait pas cru ce qu'elle voyait ?

C'était déconcertant. Elle savait que Georges n'était pas mort. Elle se rappelait même lui avoir souhaité bonne nuit le soir avant. C'était comme si elle avait passé la nuit dans un autre univers, un monde si puissant qu'à son réveil tout semblait être différent.

« Je deviens complètement folle », se dit-elle, « complètement ! »


NévroseWhere stories live. Discover now