Chapitre 14

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Aita Thiam est une jeune femme, plutôt vieille fille de 39 ans, de quelques années l'aînée de Wouly. Elle l' a connu il y a un certain nombre d'années. Un mardi 30 juillet, alors qu' Aïta déambulait dans les  rues, courbée, fatiguée, les habits usés, les pieds méconnaissables et sur le point d'accoucher, Wouly sortit de sa voiture et sans prendre le temps de lui poser une question, elle la fit entrer doucement dans la voiture direction l'hôpital le plus proche. Elle fut admise en urgence pour une prise en charge automatique de la jeune femme. Un col dilaté, des dernières contractions, les médecins préparèrent la salle de travail. Des heures d'attente, à se dire que s'il arrivait quelque chose à cette femme ou à son enfant, elle n'aurait pas la force de se le pardonner. Elle qui rêvait de connaître son enfant depuis 7 ans de mariage à cette époque. Contre toute attente, une bonne nouvelle lui a été annoncée, l'inconnue avait mis au monde une petite fille en bonne santé. Elle leva les mains au ciel en guise de reconnaissance aux bienfaits du Seigneur. Elle demanda à ce que la prise en charge soit au nom de Mme Ndoye : frais d'accouchement, ordonnance, nurserie...

À son réveil, Wouly lui expliqua qu'elle était dans la rue sur le point de mettre au monde et elle a simplement fait ce que tout humain aurait fait. Elle surprit la femme entrain de pleurer à chaudes larmes, après l'avoir calmé, elle l'incita à lui dire ce qu'elle faisait seule dans la rue à cet instant de sa grossesse. Grosso modo, elle lui conta que sa famille l'avait bannie et reniée parce qu'elle est tombé dans le piège d'un homme appelé Massamba, qui l'a séduit et entraîné plus d'une fois sur son lit avant de l' engrosser et de l'abandonner comme une vieille chaussette pour poursuivre ses rêves de musicien. Ensemble elles pleurèrent comme de petits chiots devant l'histoire rocambolesque de cette femme, qui n'était certes pas jeune mais innocente, belle. Aïta avait une taille de guêpe, similaire à celle des mannequins, svelte, noire avec un sourire à faire évanouir. La femme sénégalaise parfaite.

Quand le jour du baptême de la petite fille de sa nouvelle amie, on annonça que le bébé portait son nom, il a fallu l'intervention de Tapha pour faire stopper ses incessantes larmes d'émotion et de joie. Aïta lui expliqua qu'elle voulait juste compenser la mission salvatrice. Ainsi, elle devint la marraine de la petite Wouly et s'occupe d'elle comme si elle était sa propre fille. D'ailleurs Wouly" bou ndaw" l'appelle " badiene ". Ayant eu vent de ses longues études plus particulièrement en marketing communication, elle proposa à Moustapha de l'engager comme agent commercial dans l'entreprise puisqu'elle refusait son aide pécuniaire et voulait s'occuper seule de sa fille.
Quelle femme responsable ! Pensa Wouly.
C'est depuis ce jour-là où Wouly les sauva elle et son enfant que leur amitié naquit et s'accroît de jour en jour. Jusqu'à présent, Aïta lui voue une reconnaissance nourrie et sans conteste.

La cuisinière ayant apporté le repas de Tapha, Wouly fit une inspection de sa robe et son maquillage avant de sortir de son bureau et de frapper à celui de son mari.

-Entrez, dit il l'air tendu ou plutôt mélancolique.

Waaw, quel ouragan est passé par là? Se dit-elle.

- Y a-t-il un monsieur qui a une faim de loup? Ironisait-elle pour le détendre.

- Ah c'est toi ?

-Ah c'est toi? Reprend-elle en l'imitant à la perfection. Tu n'as que ça à me dire? Ne me dis pas que pendant ces deux heures je ne t'ai pas manqué, dit-elle en déposant le plat de riz sur la table de séjour.

-Hunhun.

-Je vois que tu es grincheux mon gars.A table !

-Bon appétit, je mangerai plus tard. Je ne t'ai pas laissé comme ça tout à l'heure. C'est encore à cause de cet espagnol? Pourquoi je demande même ? C'est lui qui énerve mon gros bébé ? Dit-elle en se mettant derrière sa chaise afin de lui masser doucement ses larges épaules.

Maux MêlésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant