Chapitre 2 : Día de los Muertos

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La peur, la vraie, celle qui glace les sangs et paralyse les membres comme le venin du plus mortels des serpents, se propagea en elle à l'instant où s'abattit sur son visage un sac de toile qui l'aveugla.

Par pur réflexe, elle prit une grande inspiration pour hurler mais la toile rêche se plaqua sur sa bouche ouverte et elle aspira péniblement une bouffée d'air vicié par l'odeur âcre du tissu raidi de saleté.

Immédiatement, une toux rauque secoua son corps et son cerveau lui commanda de reprendre une bouffée d'air pour apaiser ses poumons brûlants. Mais le sac obstrua à nouveau sa bouche ouverte, ne laissant passer qu'un mince filet d'air.

Elle allait étouffer.

Sa peur redoubla, se transformant en terreur pure, irrépressible et dévastatrice.

Sentir sur elle les mains brutales de ses agresseurs ne fut qu'une étape de plus franchie dans l'horreur, une étape presque naturelle.

Elle pouvait percevoir le triomphe des hommes qui l'avaient saisie.

Ils avaient gagné. Ils l'avaient eue.

Sans doute, comme des animaux, reniflaient-ils la peur qui suintait par tous les pores de sa peau.

Peut-être même pensaient-ils que ça avait été presque trop facile. Attraper une jeune femme sans défense alors qu'ils étaient habitués à régler leurs comptes avec des membres de gangs rivaux armés jusqu'aux dents...

Mais il y avait une chose qu'ils ignoraient sur elle.

Elle connaissait la peur. Elle ne connaissait que ça.

D'aussi loin qu'elle se souvenait, la peur avait toujours été présente dans sa vie. La peur était sa plus vieille amie et elle l'accueillit presque avec reconnaissance.

Elle savait comment laisser la peur s'emparer d'elle, la submerger comme une vague qui déferlait.

Puis elle savait comment laisser la peur refluer, comment l'apprivoiser pour mieux l'étouffer, la réduire jusqu'à ce que ce ne soit plus qu'une lointaine douleur lancinante dans la poitrine.

Elle avait appris tout ça.

Et elle avait appris autre chose. Durant des heures d'entrainement sous la houlette du chef de la sécurité d'un père paranoïaque qui avait peur que ses ennemis ne l'enlèvent...encore.

Des heures d'entraînement durant lesquelles elle avait encaissé des coups, réveillé des muscles dont elle ignorait l'existence, parfois hurlé de douleur - mais jamais elle n'avait pleuré.

Des heures d'entraînement qui finalement ne s'avéraient pas vaines...

Elle savait comment réagir.

On lui avait appris comment réagir.

Pas besoin de réfléchir, juste de se souvenir.

D'abord, connaitre son ennemi.

Ses agresseurs... Qui étaient-ils ?

Ce n'était pas l'homme qui l'avait suivie depuis l'hôtel. Il était encore à quelques mètres d'elle quand elle avait été aveuglée.

A moins que comme le lion chasse l'antilope, isole sa proie et la pousse vers le reste du groupe prêt à bondir, il l'ait acculée jusqu'à un piège savamment orchestré...

Elle n'était sûre que d'une chose. Ils ne voulaient pas la tuer. Pas ici et maintenant, sinon ça aurait déjà été fait.

Sans doute avaient-ils reçu la mission de la livrer à d'autres, qui eux se chargeraient de la faire disparaître. De faire disparaître la tâche salissant l'honneur de la mafia russe. De tuer celle qui avait trahi son père...

L'Organisation - Révoltée (Contrat d'édition HACHETTE BMR) Where stories live. Discover now