Chapitre 1 - Le début du carnage

1.5K 140 87
                                    

Nous sommes au printemps de l'année 1764, c'est-à-dire sous le règne de Louis XV, dans le Gévaudan.

Ne cherchez pas le Gévaudan sur une carte contemporaine : il n'existe plus sous ce nom.

Il s'agit en fait, à cette époque, d'un diocèse faisant partie de la Province royale du Languedoc.

Aujourd'hui on pourrait dire que cela correspond à peu près au département de la Lozère mais nous verrons que le territoire où a sévi la Bête s'étend au delà (Ardèche, Haute Loire, Aveyron, Cantal et même une petite partie de l'Allier).

Le 1er juin, une fille qui gardait des bovins près de Langogne, sur l'Allier, est soudainement attaquée par un animal qu'elle décrit comme ressemblant vaguement à un loup mais qui n'en est pas un.

De retour au village, elle est véritablement terrorisée, mais sauve.

Ses vêtements sont déchirés et son récit est un peu confus. Selon ses dires, l'animal n'en voulait nullement aux bestiaux mais à elle uniquement et elle ne doit son salut qu'à ses bœufs qui, faisant front à la bête, l'ont finalement mise en fuite.

On n'accordera sur le coup que peu de crédibilité à l'histoire racontée par cette vachère, mettant sa mésaventure sur le compte de quelque loup intrépide. La peur aidant, elle avait aussi pu affabuler un peu, a-t-on sans doute pensé...

Pourtant, avec le recul, on s'aperçoit aujourd'hui qu'il ne s'agit probablement pas de la toute première attaque puisque certains autres témoignages font état de faits précédemment survenus dans un secteur assez proche de là et présentant d'étranges similitudes.

A la fin du mois, le 30 juin, une jeune fille de 14 ans nommée Jeanne Boulet est attaquée aux Hubacs, un lieu-dit situé dans les mêmes environs.

Cette fois, elle est tuée et on retrouve son cadavre en partie, horriblement dévoré.

Il s'agit de la première victime officielle attribuée à la Bête.

Je dis « officielle » car le curé qui a rédigé son acte de sépulture indique qu'elle a été victime de LA (et non d'UNE) bête féroce, ce qui semble suggérer qu'il avait déjà entendu parler de la Bête.

Le 8 août, c'est au tour d'une fille de 15 ans de subir le même sort près de Masméjean, toujours dans le même coin.

Puis les morts vont s'enchaîner près de ce secteur, aux alentours de la forêt de Mercoire plus précisément : fin août, un jeune garçon de 15 ans à Cheylard-l'Evêque ; le 1er septembre un autre du même âge à Pradels ; le 6 septembre Marianne Hébrard, une femme de 35 ans, au Cellier ; le 16 septembre Claude Maurines, un garçon de 12 ans, au Choisinès ; le 29 septembre Magdeleine Mauras, une fillette de 12 ans, aux Thors...

Cette fois, le doute n'est plus permis car il y a eu des témoins, et ils disent tous la même chose : c'est une bête qui attaque les gens.

Leurs descriptions de l'animal concordent pour le décrire comme ressemblant à un très gros loup sans en être un. On peut sans doute leur faire confiance sur ce point car à cette époque, les loups sont très nombreux en France, surtout dans ces régions, et les paysans savent en reconnaître un au premier coup d'œil...

C'est la panique.

La tête de la Bête est mise à prix par les Etats du Gévaudan.

Etienne Lafont, subdélégué de l'intendant du Languedoc en Gévaudan (une sorte de préfet avant l'heure, pourrait-on dire), s'avise tout d'abord d'envoyer à Langogne une escouade de chasseurs venus de Mende afin de prêter main forte aux chasseurs locaux qui tentent de s'organiser.

Puis, devant l'insuffisance de ces moyens et se rendant compte de la gravité de la situation, Lafont avertit l'intendant du Languedoc et le gouverneur de la province.

Mais la Bestia del Gevaudan, comme on dit là-bas, quitte le secteur, filant plus à l'ouest puisque le 7 octobre elle tue une femme de 20 ans vers Apcher. Le corps est décapité et on ne retrouvera la tête que 8 jours plus tard.

Le mois d'octobre va ensuite voir se produire une véritable hécatombe : du 8 au 30, la Bête tue pas moins de 5 personnes et en blesse 6 autres ! Les mutilations des corps, à demi dévorés, sont atroces.

La consternation est générale.

Mais ce n'est que le début...

La Bête du Gévaudan, une histoire vraieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant