Le vent soufflait froid sur la cour du lycée Eunjang, balayant les feuilles mortes entassées contre les murs. Tp resserra les pans de sa veste en jetant un regard rapide vers le bâtiment principal. C’était sa deuxième semaine dans cet établissement, et elle avait déjà compris que ce lycée était… différent.
Pas de clubs d’activités joyeux à la sortie des cours. Pas de rires insouciants dans les couloirs. Juste des regards méfiants, des groupes fermés, et des rumeurs qui circulaient comme des ombres.
Elle avait entendu parler de lui dès le premier jour.
Yeon Si-eun.
L’élève solitaire à la mèche sombre, toujours assis au fond de la classe. Il ne parlait à personne. Mais les histoires à son sujet, elles, parlaient pour lui.
Qu’il avait affronté des groupes entiers de délinquants. Qu’il n’avait peur de rien. Qu’il pouvait t’évaluer d’un simple regard et trouver ton point faible en un instant.
Tp n’y avait pas cru. Jusqu’à ce qu’elle le voie.
Ce jour-là, il s’était interposé sans mot, sans expression, pour aider un garçon harcelé. Trois coups, froids, précis. Les agresseurs étaient à terre avant d’avoir compris.
Mais ce n’était pas ce qui avait attiré Tp.
C’était ses yeux.
Ce vide tranquille. Cette intelligence glaciale. Cette solitude bruyante.
Et maintenant, elle se retrouvait là, devant la porte de la bibliothèque, un carnet contre sa poitrine. Elle avait pris une décision risquée.
Elle entra.
Il était là. Seul. Casque sur les oreilles, yeux posés sur un livre de stratégie militaire.
Tp prit une inspiration, avança doucement, puis s’arrêta juste devant lui.
Il releva à peine les yeux.
— Tu veux quelque chose ? demanda-t-il, sans hostilité, mais sans chaleur non plus.
— Je… Je voulais te remercier, dit-elle, maladroitement. Pour l’autre jour. Avec Min-ki. Tu lui as évité une raclée.
Il haussa les épaules.
— Je ne l’ai pas fait pour lui. Ils me dérangeaient.
Tp sourit un peu, malgré elle.
— Peut-être. Mais ça mérite quand même un merci. Je suis Tp, au fait. La nouvelle.
— Je sais qui tu es, dit-il, laconique. Je retiens vite les visages.
Un silence flotta.
Elle aurait pu partir. Mais il y avait quelque chose chez lui qui la retenait.
Alors elle s’assit en face de lui.
— T’aime bien la stratégie militaire ? demanda-t-elle.
Yeon Si-eun la fixa. Ses yeux étaient aussi durs que transparents. Mais au fond, il y avait une étincelle. Presque imperceptible.
— Ce n’est pas une question d’aimer. C’est utile. Comprendre comment l’ennemi pense, comment le monde agit. C’est une protection.
— Et toi ? Tu veux te protéger de quoi ?
Il ne répondit pas tout de suite.
— De tout.
Et Tp sut, à cet instant, qu’elle n’était pas face à un garçon banal.
Elle était face à une forteresse. Et elle venait tout juste d’ouvrir une brèche.
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Les jours suivants, Tp ne cessait de croiser Yeon Si-eun dans les couloirs, silencieux et distant, toujours perdu dans ses pensées, mais étrangement attentif à sa présence. Elle, elle était moins sûre d’elle à chaque fois.
