Une Contredanse de Sentiment

Une complicité inée

 La clairière s'était assombrie, engloutie par l'épaisseur de la nuit, et seul le crépitement du feu répondait au silence oppressant de la forêt. Aylina et Chems, assis l'un contre l'autre, savaient qu'ils ne pouvaient pas rester là éternellement..

— "On ne peut pas passer la nuit ici."

La voix de Chems rompit le silence, grave et mesurée. Il se redressa et observa les alentours.

Aylina acquiesça, bien que la fatigue pesait sur ses épaules comme une chape de plomb.

— "Tu as une idée ?"

Chems lui tendit la main pour l'aider à se lever.

— "On va se fabriquer une cabane. La forêt nous offre tout ce dont on a besoin. Bois, feuilles... Ce ne sera pas un palais, mais ça nous protégera."

Ils s'activèrent ensemble, se répartissant les tâches sans un mot. Aylina ramassait des branches solides et des feuillages épais tandis que Chems coupait les branches les plus robustes à l'aide d'un vieux couteau récupéré pendant leur fuite. Chaque geste était précis, presque mécanique, mais sous la surface, l'électricité entre eux ne s'était pas dissipée. Le souvenir de leur baiser planait encore, une chaleur qu'ils n'osaient pas évoquer.

— "Tu sais que ce sera bancal, hein ?" lança Aylina, un brin moqueuse, tout en déposant une énième brassée de branches.

Chems releva la tête, un sourire en coin étirant ses lèvres.

— "Tu manques de foi en mes talents de bâtisseur."

Elle rit doucement, un son rare dans l'obscurité de leur quotidien. C'était une parenthèse presque irréelle, mais précieuse.

Après plusieurs heures d'efforts, une structure rudimentaire se dressait enfin entre deux arbres imposants. Chems avait tissé des branches épaisses pour former les murs et disposé de larges feuilles en guise de toit. L'intérieur était juste assez spacieux pour deux personnes assises ou allongées. C'était sommaire, mais suffisant.

— "Ça tient. Je suis impressionnée." murmura Aylina en inspectant leur ouvrage.

Chems haussa les épaules avec un sourire satisfait.

— "Pas sûr que ça résiste à une tempête, mais pour cette nuit, c'est parfait."

Ils s'engouffrèrent dans la cabane, la chaleur de leurs corps chassant aussitôt le froid mordant de la nuit. Chems s'installa près de l'entrée, gardant une main sur son couteau par réflexe, tandis qu'Aylina s'allongeait face à lui. Leurs regards se croisèrent dans la pénombre, plus tendres cette fois, comme s'ils pouvaient enfin s'accorder un moment de répit.

— "On devrait dormir, demain sera une longue journée." murmura Chems.

Aylina hocha la tête, mais elle n'était pas prête à fermer les yeux. Pas encore.

— "Chems... Tu penses qu'on y arrivera ? À faire vivre notre amour pour toujours ?"

Il la regarda, une lueur douce dans ses yeux fatigués.

— "Je ne sais pas. Mais tant que tu es avec moi, je n'ai pas l'intention d'abandonner."

Le silence s'installa, mais cette fois, il était apaisant. Aylina sentit ses paupières s'alourdir tandis que la fatigue prenait finalement le dessus. Elle s'endormit, bercée par le souffle régulier de Chems.

Peu après, alors que la lune continuait sa course silencieuse dans le ciel, Chems veilla encore un instant. Il observa le visage d'Aylina, détendu pour la première fois depuis des jours, et un sourire fugace apparut sur ses lèvres. Pour elle, il se battrait jusqu'au bout. Pour eux deux.

Puis, lentement, il ferma les yeux, le bruit de la forêt se mêlant à leur souffle. À l'abri dans leur cabane de fortune, pour la première fois depuis longtemps, ils purent s'accorder un semblant de paix. Mais au loin, dans l'obscurité de la forêt, le destin n'avait pas dit son dernier mot.