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Estée ~

Je suis allongée, sur mon lit parfaitement fait, encore habillée, les jambes ballantes entre le matelas et le sol. Ça doit bien faire une heure que je suis dans cette position, je m'ennuie à mourir.

Je soupire.
Je suis profondément soûlée.

Gisèlde est venue me voir il y a environ vingt minutes pour me prévenir que, à peine mon cher mari avait passé le pas de la porte, il s'était dirigé dans sa chambre. Il a prévenu la domestique qu'il avait déjà mangé à l'extérieur et précisa de ne surtout rien lui apporter sauf s'il le demandait, ce qui arriverait uniquement en cas d'urgence.

Bref, il a poliment demandé à ce que le personnel de cette maison, et moi-même lui foutions la paix !

Maintenant que j'y repense, c'est moi qui ai envie qu'il me foute la paix. Je veux que tout le monde me foute la paix ! Parce que "le monde ne tourne pas autour de moi".

Penser cette phrase dans ma tête me fait mal.

« Le monde ne tourne pas autour de toi ! Le monde ne tourne pas autour de toi, Estée ! Et putain, c'est tant mieux ! »

Des bribes de cette discussion qui me hante jour et nuit me reviennent en mémoire. Je voudrais les sortir de mon esprit et pouvoir apaiser ma conscience mais je n'y arrive pas... ça me tuera.

« Oui, c'est ça !
Sinon je te jure que tu ne serais plus ici depuis longtemps !
Et ça, ce serait vraiment tant mieux ! »

Les larmes me coulent des joues. Comment ai-je pu sortir des choses pareilles ?

« Je voudrais que tu meurs ! Tu me sauverais la vie ! »

Je ne suis vraiment sûre de ça aujourd'hui.

« Je te hais ! Je te hais du plus profond de mon cœur ! »

Non ! C'est faux ! Je t'aime, je t'aime, ne meurs pas ! Ne me laisse pas ! Je t'aime du profond de mon cœur ! Je déborde d'amour pour toi, je t'en prie ne me laisse pas !

J'ai menti, promis ! J'ai menti, je te dis ! Crois-moi ! Tu n'as pas besoin de partir loin de moi ! Tu dois rester auprès de moi ! Tu dois me voir grandir !

NON RESTE !

- MAMAN !

Mon cri résonne dans mes oreilles de nombreuses secondes. Je me suis endormie ? Sûrement.

J'ai encore fait un de ses cauchemars, un de ceux où ma mère part loin de moi. Je pense toujours que c'est de ma faute, à cause de ce que je lui ai dit, de ce que je lui ai fait. Je ne peux m'empêcher de penser que je une personne horrible.

Je rêve d'elle la nuit dans mes cauchemars. Elle me hante. Les larmes coulent à flots sur mes joues, je les sèche d'un revers de la main.

C'est idiot.

Je me lève de mon lit, la tête qui tourne un peu.

Je comptais descendre dans la cuisine et manger un morceau, mais quand je me retrouve dans le couloir, mes pieds avancent seuls vers la chambre d'Éryan.

Je toque à la porte et ma tentative de conversation reste quelques secondes sans réponse dans l'air.
Je réitère la chose et, cette fois, j'entends le bruit du froissement des draps quand il se lève.

Je ne sais pas comment expliquer ça, mais je sens sa présence près de moi. Il est là.

Je tellement l'impression que sa présence ne m'est pas étrangère...

Je me racle légèrement la gorge.

- Je n'ai jamais mangé de lasagnes.

Je distingue le stylo qui gratte sur le papier du silence.

- J'appelle ça un crime.

Je rigole discrètement avant d'ouvrir la bouche et lui proposer quelque chose :

- Ça te dirait de...

Je me coupe le temps de reconsidérer ma proposition.

- De... 'fin qu'on mange des lasagnes ensemble. Histoire que je découvre ce plat.
- Je ne connais pas vraiment de restaurant italien dans le coin. Dans ce pays en général.
- Allons en Italie alors !

L'inscription sur le papier qui dépasse de la porte cette fois n'est rien d'autre qu'un  "LOL" en majuscule.

Malheureusement, je ne rigolais pas.

Au moment où je me décide pour finalement aller manger, la moitié d'un des papiers d'Eryan sort de sous la porte.

- Non merci, a-t-il écrit.

Je ne saurais pas dire pourquoi, l'espace d'un instant, j'ai cru qu'il me retiendrait. Avec des mots certes, mais qu'il me retiendrait quand même.

Je ne saurais dire pourquoi, l'espace d'un instant, j'ai cru qu'il se souciait de moi, de ce que je pouvais penser ou vouloir.

De toute façon, je l'emmerde.

- Je t'emmerdes ! je lui crie, histoire de reformuler ma pensée et d'être sûre qu'elle est bien de moi.

Je crois l'entendre soupirer sans pourtant en être certaine.

Je n'ai plus faim alors je retourne dans ma chambre en prenant le soin de claquer la porte derrière moi.

A few hours later...

Je me suis assoupie et me réveille encore habillée. Mes cheveux doivent avoir quelques nœuds mais je n'ai pas le temps d'y prêter attention.

Des bruits de pas sur le plancher grinçant de cet étage m'interpelle avant que je ne pense à Gisèlde et son travail ici. J'ai failli penser qu'un inconnu était chez moi.

Cette pensée me fait sourire car je ne sais pas du tout ce que je ferais si un inconnu entrais pas effraction ici, étant donné que je ne peux pas compter sur le fantôme qui me sert de mari.

Je laisse mes yeux s'habituer à la lumière que je viens d'allumer dans ma chambre, mon nez à l'odeur de renfermé qui me pique, puis mes oreilles à la voix grave que j'entends marmonner au loin.

Un frisson me parcours l'échine. Putain, il y a un inconnu chez moi.

Je devrais me cacher, sauter par la fenêtre... Je panique totalement ! Mes sens ne fonctionnent plus correctement et mon cerveau à l'air de faire grève.

J'entre-ouvre alors la porte en espérant que le supposé cambrioleur ne se trouve pas juste derrière.

Ma tête tourne de droite à gauche, mais rien n'y fait : je ne trouve personne. Comme décidée à me faire repérer, je m'enfonce plus profond dans le couloir pour revenir sur mes pas d'il y a à peine quelques heures.

Ma peur prend le dessus sur ma logique. Une personne douée de raison aurait sûrement fuit, il faut croire que je ne suis pas ce genre de personne.

La lumière de la lune qui éclaire le couloir par une petite fenêtre me permet de voir le dos nu de l'homme en face de moi.

La peur me paralyse.

Il est grand et vêtu d'un simple jean. Ses boucles brunes... Je les connais, je les connais. 

Je le connais, mais qui est-il ?

Je ne croise pas ses yeux, mais je suis sûre de qui il est. Et je tombe des nues, la chute sera peut-être un traumatisme.

Il ne prend pas la peine de se retourner pour moi, à dire vrai, j'ignore s'il a remarqué ma présence dans son dos.

Est-ce que XY me cambriole ?

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 04 ⏰

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Je n'ai jamais fermé les yeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant