Les légendes stellaires tome 2 : Les artefacts suprêmes

CHAPITRE 1 - En solitaire

« J'ai vraiment l'impression que tout ce que je fais ne sert absolument à rien. »

« Qu'est-ce que tu entends par là ? »

« Juste cette question : pourquoi je suis obligé de nettoyer le sol avec un balai ? »

Dix jours. Cela faisait dix jours que l'année scolaire était finie et que les étudiants avaient quittés l'Académie d'Hélios. Enfin, sauf Marie Spero, la jeune magicienne gaïenne arrachée à sa famille et exportée sur Hélios avec l'interdiction de rentrer chez elle. Le jour ayant suivi le départ des étudiants, la jeune fille avait reçu la visite de la directrice Haraïk Diétria en personne, afin de lui expliquer les modalités qu'elle serait à prendre pour les trois prochaines semaines. Dans un premier temps, Marie devait déplacer toutes les affaires de sa chambre dans la branche rouge vers une autre située dans la branche orange. Sitôt son déménagement effectué, la magicienne serait régulièrement missionnée pour préparer les installations à l'accueil des prochains étudiants comme le ferait le personnel d'entretien de l'Académie. Marie ne s'attendait pas à grand-chose, mais puisque la directrice de l'Académie des magies d'Hélios en personne était venue la voir pour ça, cela devait certainement être de premier ordre.

Cela faisait donc dix jours que Marie nettoyait chaque chambre, chaque porte, chaque rambarde, chaque marche, chaque planche de la zone 12 160 de la branche rouge et de la branche orange avec un balai rotatif, des gants de lavage, et son huile de coude. Sachant qu'elle n'avait jamais été une adepte des travaux manuels ou même de l'exercice physique, ces semaines sans cours ni classes ni devoirs ne ressemblaient en rien à des vacances.

« Je veux dire, ce ne serait pas plus simple de simplement jeter un nac ou une kuméli qui permettrait de tout faire resplendir d'un seul coup ? Sans que j'ai à me fatiguer, me tordre pour atteindre chaque rainure, ou même les plafonds ? Et puis, pourquoi les balais existent encore dans cette civilisation ? »

« Tavah Kémli t'a déjà donné une réponse. » lui rappela son assistante magique Nira. « Le mérite d'accomplir par soi-même est bien plus délicieux que la voie de la facilité. Et de toute manière, savoir qu'il te faudrait pour lancer un tel nac... »

« ... je l'obtiendrais seulement dans les années qui suivront, je sais. Personnellement, je ne sais pas ce qui me frustre le plus. » poursuivit la magicienne en faisant rouler son ustensile sur le plancher du huitième étage. « Que je me fatigue pendant deux semaines à nettoyer deux zones de dortoir complètes sans obtenir un seul remerciement, que je suis obligée de le faire sans magie parce que je suis encore trop ignorante sur le sujet, ou que pendant ce temps, les autres stellairiens de mon âge sont tranquillement chez leurs parents, à papoter, à diner en famille tout en s'amusant. »

Arrivée à la fin du parquet de bois clair, Marie se décida à faire une pause. Elle laissa son balai reposer contre le mur, et vint s'appuyer sur la rambarde, bras croisés, son regard dans le vague. Il n'y avait devant elle que des lignes et des lignes et des lignes de dortoirs empilés en étages à perte de vue. Néanmoins, ce décors avait de quoi l'intriguer. Surtout cet étrange silence omniprésent qu'elle supportait depuis plusieurs jours, et qui tranchait avec l'agitation et l'effervescence qui avait fait vivre l'Académie pendant les neufs précédents mois. L'absence de bruits, d'étudiants et de mouvement lui paraissait si étrange. Ainsi que la présence de la couleur orange partout où elle promenait ses yeux.

« Tu penses à qui exactement ? »

« Tu sais très bien à qui je pense. Ma mère. Mon père. Léo. Ça fait un an que je ne les aie pas vu. »