Le Ndjangui

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Estha ou la fille qui remboursait difficilement ses dettes. Ce samedi était jour de tontine. La jeune enseignante de 30 ans se fit belle comme jamais. Il était impératif qu'elle arrive la première. Elle avait besoin d'un prêt. D'un énorme prêt pour rembourser un prêt. Décidément sa vie était bizarre. Ses amies d'un autre genre lui accorderaient-elles ce prêt ? C'était à voir. Alors qu'elle était devant son miroir, Maxime, son fils de 5 ans, vint jouer à ses pieds.

—Oorr Max, arrête. Je vais rater mon maquillage.

—Tu pars où Maa ?

—À la réunion

—Je vais encore rester avec tata Gladys ?

Le garçon fit une moue dépitée. Gladys c'était la voisine. Malgré sa bienveillance, elle n'avait pas la patience nécessaire pour supporter Maxime le Kamikaze. Elle le laissait souvent pleurer pendant de longues minutes lorsqu'il exagérait dans ses caprices.

—Tu me gardes le poulet, finit-il par dire.

Estha se contenta de sourire. Son fils était si mignon lorsqu'il se résignait. Pour seule réponse, elle hocha la tête. Elle alla déposer son fils chez la fameuse Gladys à qui elle tendit un billet de 500 fcfa.

—Merci tata, répondit celle-ci tout sourire.

En deux pas, trois mouvements, Estha était déjà à la station taxi. Elle n'eut aucun mal à trouver un taxi vu la somme qu'elle proposait: 500 fcfa en lieu de 250 fcfa. Elle reçut au passage des insultes de personnes qui attendaient là depuis trop longtemps. La vie de la jeune femme se résumait à ça : dépenser sans compter. Ça n'aurait eu aucun dommage si elle avait les ressources nécessaires. Mais son salaire d'enseignant lui suffisait à peine.

Lorsqu'elle arriva à la réunion, elle n'y trouva que la présidente et Maa Pau, la doyenne et celle par le même temps qui recevait la réunion.

—Qu'est-ce qui te fait arriver aussi tôt chez moi Es' ? commença la doyenne

—Tu n'ignores rien. Elle veut un prêt, interrompit la présidente de la réunion.

Estha baissa la tête. Maa Pau éclata de rire. Celle qui présidait la réunion fit de même.

—Et tu veux combien ?

—200.000 fcfa

—Hummmm! S'exclama Maa Pau. Je ne peux pas te prêter cette somme. On va demander aux autres si elles acceptent de compléter.

—Elles vont accepter, affirma Estha optimiste

Les femmes discutaient de tous les sujets d'actualité que leurs mémoires combinées leur offraient. Après une heure, la totalité des femmes arriva. La réunion commença, les cotisations se firent. Puis vint le moment qu'Estha redoutait. Néanmoins, elle fit sa requête devant toute l'assemblée. Silence plat.

—Je vais vous rembourser mes sœurs

—Es' vraiment moi j'ai encore la dernière fois en mémoire, intervint une courageuse. Nous t'avons presque supplié pour rentrer dans nos fonds. Moi je ne suis pas d'accord.

Les autres semblaient acquiescer. Estha se vit au fond du gouffre. Que pouvait-elle bien faire à ce niveau ?

—J'ai un cancer, lança-t-elle soudain

—HEINNN ! s'exclamèrent toutes les femmes au même moment.

Estha ne réalisait pas ce qu'elle avait dit quelques heures plus tôt. Pour obtenir cet argent, elle avait été capable de se condamner. Mais il lui fallait payer ses dettes à hauteur de 150.000 fcfa. Cet argent, elle l'avait emprunté pour s'acheter un nouveau smartphone. Le lendemain, elle se rendit chez ses nombreux créanciers et s'acquitta de ses dettes. Ils étaient reconnaissants comme si elle leur accordait une faveur. Avec les 50.000 fcfa restants, Estha parviendrait à gérer ses goûts de luxe pour la suite du mois. Alors qu'elle rentrait chez elle, elle fit une étrange rencontre. Un homme, très bien vêtu, l'aborda. Il était beau et elle célibataire alors pourquoi pas ?

Sous l'arbre à palabresWhere stories live. Discover now