Les Îles maudites 2

Chapitre 10-Le traumatisme de Patrick

Une heure plus tard, au bord du chemin de dalles givré, à l'Ouest des îles de la désolation enneigées, étalés sur un monticule de pierre enseveli par les flocons, Patrick et moi-même. Nous sommes complètement éreintés. On n'a pas cessé une seule seconde de détaler comme des lapins de peur qu'on se fasse piéger par une nouvelle embuscade de « traqueurs ». Résultat, ma jambe est complètement en vrac. La douleur commence à devenir insoutenable. Patrick résiste à l'idée de se reposer ici quelques minutes. Il faut qu'on atteigne un refuge au plus vite. De ce que je peux voir grâce aux paramètres avancés de mon équipement, il n'y a pas une seule de ces créatures maudites dans les parages. J'ai l'impression qu'ils se déplacent davantage en groupe. Dans tous les cas, j'ai suffisamment combattu pour aujourd'hui. Je ne pourrai pas encaisser d'autres assauts. Mon ami, les yeux entrouverts, m'informe d'une consigne qui lui a été annoncée tout-à-l'heure :

-Aldran... On a un problème.

-Quoi ? Redoute je le pire, on est pas assez dans la merde comme ça ?

-Visiblement non. Il y a un monstre très dangereux quelque part sur les îles.

-Euh... Il y en a pas qu'un seul si tu veux mon avis.

-Non mais je parle d'un monstre encore plus terrifiant que ceux que l'on a rencontré. Le QG m'en a informé il y a quelques minutes.

-Putain... Et alors ? Ils vont rien foutre ou ils vont faire les choses correctement, cette fois ?

-Des membres des vingt guerriers de niveau rare vont être dépêchés ici. Plus de cinq, apparemment.

-Plus de cinq ?! Mais c'est quoi ce monstre ?!

-Un certain « traqueur alpha ». Un démon capable de rivaliser avec cent soldats.

-... C'est plutôt mauvais signe. Je ne comprends qu'une chose : se barrer d'ici le plus vite possible.

-Ouais. Allons vite trouver un refuge.

Aussitôt, une brise glaciale vient se glisser le long de ma nuque. Depuis qu'on s'est arrêté, pour profiter de l'air frais, Patrick et moi avons ôté nos casques. Aucun de nous deux n'osons se mouvoir, sans réellement savoir pourquoi. Puis, un silence pesant de quelques secondes survient. Mon ami ne perd pas plus de temps. Il se lève et m'invite à partir d'ici. J'ai comme un mauvais pressentiment.

-On se casse, Aldran, dit il en frissonnant ?

-Oui... Oui j'arrive, bredouille je.

Soudain, je distingue des mouvements suspects. Il y a des bruits de pas qui approchent. Il a tout l'air de provenir d'un homme. Sa marche est plutôt lente. Patrick se tient prêt à se défendre en cas de nécessité. Un curieux personnage se faufile à travers les conifères et se dirige droit sur nous. Son apparence plongée dans les ténèbres du maquis ne nous permet pas d'identifier le moindre de ses traits physiques. On perçoit enfin son visage à quelques mètres de nous. Une chemise partiellement enveloppée d'une veste couleur gris-vert, une carrure intimidante, des yeux aux pupilles perçantes, une expression froide et impassible... Cet être est... Effrayant. Il possède un charisme qui m'incite à faire un léger pas en arrière. C'est comme si moi, un pauvre mulot, je me retrouvais face à un rapace affamé.

-Eh ben, ça fait un bail, mon cher Patrick. Le salut il tout en arborant un grand sourire

Je tourne la tête pour observer sa réaction. Patrick... Est complètement tétanisé. Il est paralysé par la peur et semble totalement incapable de se déplacer. Mon ami n'a même pas la force de prononcer le moindre mot. Ses genoux flanchent et n'arrivent plus à le soutenir. Sa peau blanchit et son corps devient flasque. Je ne l'ai jamais vu dans cet état.