28. Crise de foi(e)

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Était-il, vraiment, devenu fou ?

Elle ne parvenait pas à réconcilier cette démence avec l'homme qu'elle avait fréquenté toutes ces semaines.

Peut-être qu'il a un frère jumeau. Ou un clone.

Elle rit de sa propre stupidité. N'importe quoi. Merde.

Elle l'avait mal jaugé, il ne fallait pas chercher plus loin.

Son portable sonna brusquement et le nom de Sam s'inscrivit en lettres immenses sur l'écran.

Diable, de mieux en mieux.

— Tu réponds, c'est déjà ça, souffla la voix lasse du journaliste.

— Désolée... J'ai encore du boulot.

— Il est vingt-deux heures. Je t'ai récupérée à l'hôpital hier. Est-ce que... m'envoyer un message... ne serait pas, je ne sais pas... le signe d'un minimum de respect ?

Tu vois, Sam, c'est exactement pour ça que je dois rompre avec toi, le plus vite possible, maintenant, comme ça, au téléphone. Vite fait, bien fait. Désolée.

— Je suis désolée. Nous avons eu un cas... déstabilisant en fin de journée. J'ai perdu le fil. Je n'ai pas vu le temps passer.

Nouveau soupir.

— Je viens te chercher.

Ce n'était pas une question. Elle l'en détesta viscéralement.

La porte de la morgue s'ouvrit alors sur Sidney, la combinaison de relevés entrouverte sur les épaules, un sourire malin sur les lèvres. Il tenait, du bout des doigts, un sac en plastique transparent dans lequel se trouvait un gros morceau de viande rouge foncé.

Laura écarquilla les yeux et le sourire de Sidney s'agrandit.

— Dans une heure. Pas avant, dit-elle dans le téléphone.

Elle raccrocha sans laisser le temps à Sam de protester puis tendit la main vers le sac.

— C'est ce que je crois que c'est ? demanda-t-elle à mi-voix.

— Je crois que oui. »

Le foie manquant.

— Où l'avez-vous trouvé ?

— Dans la poubelle de la salle de bain.

Au temps pour le Dévoreur. Rien dans ce meurtre ne collait avec les autopsies des cas précédents. Linda était couverte de résidus divers. Elle ne flottait pas dans le Tren. Elle avait été étranglée et non abattue d'une balle. On l'avait tuée chez elle. On avait récupéré le foie.

Mais peut-être était-ce simplement parce qu'Ubis n'avait pas eu le temps de l'emmener jusqu'au fleuve. Pour une raison ou une autre. Il n'était en tout cas pas à l'hôpital, contrairement à ce qu'il avait prétendu. Ce salopard.

— Tu sais sur quoi travaillait Linda Belarez ? demanda-t-elle en se levant, le sac toujours à la main.

— Elle était avocate.

— Mais dans quel secteur ?

— Oh. Crime organisé.

Bien sûr, songea Laura. Bien sûr, bordel


Le foie en lui-même n'avait rien à révéler. Il faudrait attendre les analyses génétiques pour s'assurer qu'il appartenait bien à la victime, mais il n'y avait pas de grandes raisons d'en douter. On l'avait retrouvé sur les lieux du crime, il avait la fraîcheur, la taille et l'aspect appropriés. Laura supposait qu'on avait fouillé le domicile de toutes les victimes précédentes sans avoir jamais rien retrouvé de tel : une mare de sang sur un tapis velu et un organe aux ordures, des témoins prolixes, un signalement.

Les affaires des autres (Laura Woodward - T1)Where stories live. Discover now