11. Commencement

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C'était jeudi, trois heures du matin, et Lumine était, comme à son habitude, encore en train d'essayer de s'endormir quand son téléphone sonna. Un message. Elle qui ne recevait de messages que d'une seule personne.

Curieuse, elle alluma l'écran et lut l'envoyeur.

« Childe. »

Un sourcil s'arqua sur son joli visage. Que voulait-il à cette heure-ci ? Ouvrant la conversation, elle lut les deux mots qui y étaient écrits : « pardonne-moi ».

Il n'en fallut pas plus pour qu'elle se mette sur ses pieds, en alerte.

Les deux mots tournaient en boucle dans son esprit. Il n'y avait qu'une seule raison pour laquelle il s'excuserait. Elle le savait car elle y avait pensé. Envoyer ce message avant de se laisser partir.

Mais elle ne pouvait pas le laisser faire. Elle savait qu'au fond de lui ce n'était pas ce qu'il souhaitait. Et ce, précisément parce qu'elle était comme lui.

Elle ne prit même pas le temps de se changer qu'elle sortit en courant de sa chambre en claquant la porte, réveillant son frère qui sortit en trombe au moment où elle posait la main sur la poignée de la porte d'entrée tout en enfilant à la va-vite des chaussures.

— Qu'est-ce qui se passe ?! cria-t-il avant qu'elle ne disparaisse.

— Je reviens vite, il a besoin de moi ! lui dit-elle en fermant la porte avant même qu'il ne puisse rétorquer quoi que ce soit.

Ses yeux dorés s'habituèrent bien vite à la lumière tamisée des réverbères toujours en état de fonctionnement malgré leur âge séculaire. Elle se mit à courir à en perdre la tête, se dirigeant sans même y réfléchir vers la falaise. C'était le seul endroit où il pourrait être. Là où tout semblait avoir commencé, et là où il voudra potentiellement tout finir.

Hors d'haleine, elle ne pensait qu'à une chose : le retrouver avant qu'il ne soit trop tard.

Quand finalement ses pieds se mirent à fouler de la rocaille sous le clair de lune, Lumine ne se stoppa pas le moins du monde. Elle continua de remonter le chemin, ses yeux cherchant frénétiquement une présence solitaire tandis qu'elle approchait de l'endroit où il l'avait emmenée la dernière fois. Elle n'avait pas manqué d'observer cette étincelle ravivée en lui quand ils étaient venus ici, ni même cette douleur qui teintait son visage. Cet endroit avait beaucoup de signification pour lui.

En elle, elle ressentait un mal-être infini. De l'effroi attrapait son cœur de ses bras fantomatiques.

Peut-être arrivait-elle trop tard ?

Rien que cette idée qui effleurait son esprit était insoutenable. Il était le seul qui la comprenait. Le seul en qui elle se retrouvait. Alors s'il disparaissait, cela signifiait-il que son temps à elle aussi était révolu ?

Haletante, Lumine s'autorisa à se pencher en avant pour reprendre ce souffle qui lui manquait tant en repérant une forme assise sur le banc. Dans la pénombre repoussée par ce fameux lampadaire, elle reconnut cette silhouette à laquelle elle était devenue accoutumée.

Elle fit encore deux pas dans sa direction avant qu'il ne la repère, et ne lève la tête vers elle. D'où elle était, elle n'arrivait pas à voir son expression. Mais sans même la voir, elle savait à quoi elle ressemblait : peinée. Attristée. Brisée. Rien de plus qu'une brisure parmi l'immensité de la population humaine.

Alors elle s'approcha pas après pas jusqu'à se poster devant lui. Illuminé par la lueur blanchâtre de la lune et par l'aura jaunâtre électrique, Lumine put remarquer les traces sur ses joues, éloges de larmes depuis longtemps taries.

FR | Song for the Broken | ChilumiWhere stories live. Discover now