Chapitre 2 - Adieux.

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Je n'entends même pas le bruissement choqué de la foule. Non. La seule chose qui m'intrigue, qui m'inquiète, est Annie. Son beau visage d'ordinaire si doux, si souriant est figé en un masque d'effroi. Je ne comprends pas. Pourquoi cette expression de peur panique ? Elle n'a pas été tirée au sort, tout va bien. Je lui adresse un sourire rassurant, cherchant toujours à comprendre la raison de son malaise.

Une main se pose sur mon épaule, me secoue doucement, précautionneusement, comme si celui qui me ramène à la réalité le fait à regret. Je plante mes yeux dans les siens, complètement perdu, ayant un mauvais pressentiment. Il secoue lentement la tête et murmure « Désolé mon pote, vraiment... ».

L'horrible réalité m'est évidente maintenant mais je refuse catégoriquement de l'envisager. Non. Je suis intouchable. Mon nom n'est inscrit que trois fois. Quelles sont les probabilités pour que... Je respire par saccades, complètement dévarié.

« Finnick mon cher, tu dois monter sur scène tu sais... »

La voix de l'hôtesse m'agresse et je tourne le regard vers la scène. Avida se tord les doigts, gênée tandis que la vielle aperçue quelques minutes plus tôt quand le monde tournait encore rond me fixe intensément. Mes yeux virevoltent d'un point à l'autre de cette maudite place. Je suis en gros plan sur les écrans géants qui me renvoient une version fade, une pâle copie de celui que je suis réellement. On dirait un lapin pris au piège dans les phares d'une voiture. Et c'est inacceptable. L'écran est mon rayon de soleil. Celui qui me fait reprendre mes esprits. Ce dont j'ai grandement besoin.

Je me redresse sensiblement et fixe un regard dur et inexpressif devant moi. A partir de maintenant le moindre signe de faiblesse non calculé est exclu. Ma vie se joue sur cette scène. Ma vie se joue sur cet écran. Ma vie se jouera à chaque instant jusqu'à ce que je sorte de cette maudite arène. Oui. J'en sortirais. Je refuse de mourir à 14 ans dans l'anonymat le plus total. Je veux laisser ma trace, faire quelque chose de significatif, qu'on ne se souvienne pas de moi comme l'un des milliers de sacrifiés mais comme celui qui, contre vents et marées et à l'étonnement général, a su triompher des Carrières, des fourbes et des Juges.

J'esquisse un sourire en coin pour la caméra. Je ne me laisserai pas abattre. Je rejoins la scène d'un pas souple et délié avec une aisance étonnante compte tenu de ma précédente réaction précédente.

Les vielles marches de bois rongées par la moisissure grincent sous mes pieds et j'en viens à me demander si elles ne vont pas se rompre et me faire dégringoler sous les planches devant tout Panem, pensée plutôt incongrue compte tenu des circonstances. Trônant désormais au-dessus de la foule j'ai une vue dégagée sur l'entièreté de la place et la découvre d'un tout autre point de vue. Mon regard glisse sur les différents parcages, évitant soigneusement celui des filles ainsi que la foule massée en arrière-plan. Je ne veux pas risquer de croiser le regard désolé, dévasté d'une connaissance. D'Annie. De mes parents. De ma sœur.

Mon masque vacille, fragile. Un rien peut me faire flancher et Dieu sait que ce n'est pas le moment. L'hôtesse, exagérément aimable, me demande de décliner mon identité ce que je fais d'une voix assurée, presque professionnelle.

« Merci mon chou, miaule-t-elle en se tournant vers la foule silencieuse. Les vaillants et heureux Tributs du District Quatre pour ces 65èmes Hunger Games sont Liesel Acilius et Finnick Odair ! Serez-vous la main je vous prie. »

Liesel plante son regard dans le mien et m'adresse un sourire rayonnant avant de saisir avec bonne humeur la main que je lui tends, profondément indifférent. Une salve d'applaudissements polis ponctue notre salut et Avida reprend la parole :

« Bien, bien, bien, bien, nous allons, pour clôturer comme il se doit cette Moisson, nous recueillir sur l'hymne de Panem en remerciant le Capitole pour sa bienveillance. »

Les Hunger Games de Finnick Odair.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant