Ainsi ça commence

Start from the beginning
                                    

Il eut l'impression que le monde se renversait lorsque le rêve changea. Maintenant, il faisait clair autour de lui – du moins assez pour distinguer les alentours – mais il y avait du brouillard. Il aurait pu essayer autant qu'il l'aurait voulu, il n'aurait pas réussi à voir plus loin que son bras tendu. Quoiqu'en fait, il n'aurait pas pu tendre le bras : quoi que ce soit qu'il soit en train de voir, il ne s'y trouvait pas véritablement. Son rêve était prémonitoire, il le savait ; mais cette partie avait ceci de particulier qu'elle ne semblait pas le concerner, lui.

Il vit Ethan. Ethan Moore était un satyre : de la tête à la taille, il avait le corps d'un humain, et de la taille aux pieds, celui d'un bouc. D'ailleurs, il n'avait pas de pieds, mais des sabots. Comme à son habitude, il portait le bob recouvert de motifs de banane qu'il ne quittait jamais – dessous, pointant de ses cheveux bruns, se cachaient des cornes. Moins habituel, il tenait sa lance, comme s'il était prêt à se battre. Y/N aurait eu envie de lui parler, mais c'était impossible. Après tout, ce n'était qu'un rêve.

Une fois de plus – une dernière fois –, le rêve changea.

La première fois qu'il avait vu cette partie du rêve, Y/N n'avait pas compris ce qu'il se passait. Tout était noir et il ne pouvait même pas apercevoir le bout de son nez. Vaguement, comme à travers un filtre, il avait mal. Comment peut-on avoir mal dans un rêve, c'était une des nombreuses questions qu'il se posait. Mais il y avait plus important. Sa tête était coincée entre ses genoux, si bien qu'il était bloqué en position fœtale. Il n'arrivait pas à bouger la moindre partie de son corps, pas même le bout de ses orteils. Sans le tout petit espace entre sa poitrine et ses jambes, il n'aurait pas pu respirer.

Sa peau le brûlait. Il n'avait aucune idée de ce qui le bloquait dans cette position, mais c'était irritant et ça s'insinuait partout. Chaque fois que sa poitrine se soulevait, son dos pressait contre ça, et il avait l'impression d'être frotté contre une rappe à fromage. Sa propre sueur, qui coulait abondamment tant il avait chaud, venait ruisseler sur sa peau meurtrie, et la douleur n'en était que plus vive.

Aucun air n'arrivait à passer à travers ce qui l'entourait. Il avait de plus en plus de mal à respirer. L'air se raréfiait. Pourquoi ? Où était-il ? Que lui arrivait-il ? Toutes ces questions, il se les était déjà posées. À son grand regret, il avait trouvé la réponse.

C'était sa mort à laquelle il assistait. Sa mort par asphyxie. Cruelle ironie, pour lui qui maîtrisait les vents.


Quand Y/N se réveilla, il était à l'intérieur de son bungalow, bien au chaud sous ses couvertures.

C'était le bungalow numéro deux, celui dédié à Héra. Oui, Héra, comme la déesse grecque. En fait, c'était la déesse grecque. Et la mère d'Y/N, aussi. Oui, il était un demi-dieu, comme tous les autres à la Colonie des Sang-Mêlé, seul lieu de tous les États-Unis où les gens comme eux étaient réellement à l'abris des monstres. Ils étaient tous répartis dans des bungalows, chacun résidant dans celui dédié à son parent divin.

Y/N était seul dans son bungalow. Héra n'était pas connue pour avoir engendré beaucoup de demi-dieux : en fait, il était le seul qu'elle ait jamais eu. Du moins, c'était ce que tout le monde – y comprit lui-même – avait cru jusqu'à l'été passé. Mais Zeus avait révélé qu'il n'était en fait pas réellement un demi-dieu : à sa naissance, si Zeus n'était pas intervenu pour tenter de le rendre mortel définitivement, Y/N serait devenu un demi-dieu. Mais non. Ce n'était que provisoire. Dans moins d'un an, le 3 juin 2010, il aurait seize ans, et il deviendrait un dieu. Ou il mourrait. Après tout, Zeus le voulait mort et ses rêves lui montraient bien qu'il n'avait aucune chance.

Y/N secoua la tête et se redressa dans son lit. Ces pensées étaient coutumières désormais ; cela faisait quatre mois qu'il était au courant, quatre mois que le souvenir de Zeus prononçant sa sentence se rejouait dans sa tête, quatre mois qu'il avait eu pour se faire à l'idée. Maintenant, en décembre, il n'arrivait plus à se sentir en colère à cause de ça. Il avait décider de rejeter en bloc cette perspective et de s'endurcir, de dresser un mur entre lui et tout ça. Au moins, il était en paix pour un temps.

Annabeth Chase x Lecteur (Reader) - Le héros perdu - Livre 6Where stories live. Discover now