Chapitre 48 (inédit)

Depuis le début
                                    

J'ai eu envie de lui dire que je l'aimais, mais je n'en ai pas eu le temps. Le croassement de la corneille de Côme postée sur la rampe de l'escalier à un niveau supérieur m'a volé un sursaut.

« Vous nous faussez compagnie ? » s'est renseigné l'hybride en sortant de l'obscurité dans laquelle il se fondait à merveille.

Le réflexe habituel de ma Précieuse ? Se planquer derrière moi. Visiblement l'effet des films d'horreur sur sa capacité à résister à la peur était encore minime.

L'apparition de Côme aurait effrayé les chasseurs de fantômes les plus avertis. Mon air impassible n'a pas fait illusion. Mon cœur avait pris ses petites jambes à son cou pour se barrer loin. Très loin, de celui qui avait tout d'un splendide démon.

- À tout hasard, dis-je en dévisageant Côme. Auriez-vous des liens de parentés avec les vampires ?... Je veux dire, les vampires existent-ils ?

- Votre esprit d'analyse est plaisant, s'est-il contenté de répondre en ouvrant la marche pour nous rendre dans la bibliothèque du manoir qui abritait les boules de cristal prophétiques, mais aussi celles liées au passé et au temps présent.

Les petites coquines étaient capricieuses. Pas un jour ne s'écoulait depuis que je pouvais me lever de mon lit sans que je n'essaie de lire dans les sphères. Elles ne m'avaient montré que des souvenirs sans intérêt ou le néant. Je n'avais pas encore le mode d'emploi pour les utiliser parfaitement et personne ne voulait me le donner. (Ou peut-être que personne ne le possédait excepté Marin, parfois intransigeant.)

- Vous me fliquez ?

- Le Conseil a pensé qu'un appui de plus serait bénéfique aux anges, aux fées et aux soldats de pierre qui gardent les lieux. Je suis l'invisible qui veille sur le manoir.

- Vous n'avez pas répondu à ma question.

Côme m'a contournée.

- Suivez-moi, je vous prie.

- Allez-vous répéter à Marin et aux autres que je file en douce ?

- Je ne suis pas de ces cafteurs-là. Je comprends que vous ayez besoin de votre libre arbitre, de votre liberté et surtout de mener vos combats sans être couvée en permanence. Je m'assure simplement que vous reveniez sur vos deux jambes. Lorsque vous serez prête, c'est seule que vous affronterez votre destin. En attendant, permettez-moi d'assurer votre protection.

Côme a ouvert la marche.

Nous avons traversé la bibliothèque pour nous retrouver entre un rayonnage de livres poussiéreux et une alcôve sous laquelle il m'a demandé de me placer. J'ai obéi. Les murs de briques ont disparu pour dévoiler une galerie en cul-de-sac. Au fond du petit couloir éclairé de flambeaux se trouvait un miroir orné d'un cadre en or surmonté de l'inscription « 3 I » devant lequel Noisette, Côme et moi nous sommes arrêtés. Quelle ne fut pas ma surprise de remarquer l'absence du reflet de l'hybride dans la glace.

- L'emblème de la corneille sur votre uniforme, le teint laiteux, le pouvoir de lire dans les pensées...

Côme a levé le bras et une torche s'est décrochée du mur pour atterrir dans sa main. Il maitrisait aussi la télékinésie.

- Vous êtes définitivement la bienvenue à Bestiaire, Oxane.

Inclinant la tête pour observer la marque que Côme éclairait avec le flambeau, j'ai souri en songeant que je n'avais rien perdu de ma vivacité d'esprit. J'ai tiré une conclusion de la situation : ma vie était certes plus sombre, mais m'offrait la possibilité de rencontrer des êtres incroyables qui marqueraient mon existence à jamais. Un mal pour un bien, donc.

Bleu Magnétique (EN PAUSE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant