Chapitre 24 - Passé

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-Décembre


En me levant ce matin, je ne suis pas motivé. Ce sont les vacances, sauf qu'avec le temps, Noël et mon anniversaire sont devenues des fêtes beaucoup moins attrayantes. Je suis seul dans ma chambre, ma mère au travail, ma sœur chez mon père. Je réfléchis à une proposition que m'a faite mon père il y a un petit moment déjà. Je ne me souviens pas de la façon dont le sujet est venu sur la table, mais il est arrivé et je me plonge dans mes recherches pour ne pas penser à la solitude qui m'enveloppe. Mes recherches s'enchaînent et bientôt je remarque quelques universités dont les programmes m'intéressent. Avec mes options, je ne peux pas prendre n'importe quoi et je ne compte pas m'embarquer dans une filière d'architectur ealors que je n'y connais rien et que je n'ai aucune idée de ce qu'il faut avoir pris comme option pour faire ce genre de cursus. Je mepenche plutôt sur les filières comme la musique et la littérature actuellement. Ce ne sont pas celles qui offrent le plus de débouchées, mais ce sont celles auxquelles je m'autorise à rêver quand personne ne fait attention.

Enfermé dans le noir, je prends des notes sur mon ordinateur sur quelles universités semblent les plus intéressantes. Mon père m'a dit de postuler pour au moins deux pour multiplier mes chances d'être pris. Je n'y crois pas une seule seconde mais comme qui dirait, qui ne tente rien n'a rien.

Alors je continue mes recherches, cherche sur les sites des universités comment postuler. Lorsque je finis par en avoir marre, je pose mon ordinateur en soupirant. Je ne sais pas pourquoi je me force à ces recherches qui ne font que m'éloigner de ma réalité en m'entraînant dans des espoirs irréalisables. Et la redescente sur terre est toujours plus violente chaque jour. Parce que chaque fois que je m'autorise à rêver, je crois un peu plus en mes rêves. Et le réveil se révèle toujours plus brutal. Parce que je vis dans cette réalité. Je vis dans ce monde dans lequel ma sœur vit maintenant chez mon père, alors que je continue d'alterner entre ces deux domiciles que je devrais pouvoir considérer comme des chez moi quand je me sens si peu en sécurité nul part que je me retrouve à ne pas me sentir chez moi même dans des logements qui sont censés être les miens.

Je ferme finalement mon ordinateur vers quatorze heures, décidant soudainement d'enfiler mes chaussures pour sortir. Le soleil tombe vite alors autant en profiter. En quittant l'appartement, je n'ai pas déjeuné, mais je ne ressens ni le besoin ni l'envie de manger. Alors j'avance dans la rue jusqu'à rejoindre un croisement qui mène à l'endroit que j'ai montré à Harry en début d'année.

J'aime bien cet endroit, mais en apercevant nos fantômes sur ce banc et le souvenir de notre conversation, j'ai senti mon cœur se serrer. J'aimerais revoir Harry. J'aime bien passer du temps avec lui. J'aurais aimé voir mes amis aussi. Ma sœur également. Mais personne n'est là. Parce que tout le monde est parti et que moi, je suis là. Ma sœur est chez mes grands-parents avec mon père et ma belle-mère. Mes amis sont dans leur famille. Harry aussi.

Moi je reste ici à ne rien faire. À me prendre la tête pour des broutilles. Je sombre sous le soleil qui ne parvient même pas à m'attirer vers la surface. Tant que je suis entouré, je parviens généralement à me maintenir à la surface, les discussions comme bouée, mais sans elles, je suis noyé parmi des pensées indésirables. Les mails et les messages indésirables, il est possible de les supprimer, mais quand il s'agit de ce qui se trouve dans nos têtes, c'est toujours plus compliqué. Si nous savions faire le tri volontairement dans nos pensées, ça se saurait.

Ce qui m'effraye par-dessus tout, c'est notamment le fait que je ne pourrais pas être entouré vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans le futur. Aujourd'hui en est un exemple. Je suis seul alors que je vis encore chez ma mère, que je suis encore au lycée. Mais le jour où je travaillerai, où je vivrai seul, je ne serai plus si entouré. Et c'est en me le faisant remarquer que je m'interroge soudainement sur cette solitude que je pensais aimer. Je fais partie de ces gens qui aiment être seuls pour prendre du temps pour moi et faire des choses que j'aime, pourtant, d'un autre côté, cette solitude me tue un peu plus chaque jour. J'aimerais savoir vivre avec et m'en contenter. Pourtant, c'est plus fort que moi. Je ne peux m'empêcher de souhaiter avoir du monde autour de moi actuellement, alors même que je m'aperçois que dans la même situation, une autre fois, j'aurais justement voulu être seul pour ne pas encombrer les autres de mes mauvaises pensées. Je n'aurais pas voulu les leur imposer si c'est pour qu'elles les empoisonnent autant que moi.

Avec un titre [L.S]Kde žijí příběhy. Začni objevovat