Lexi et Coma

Chapitre 38

« Je vais te tuer ! »

Non, vraiment ? Elle ne l'a pas vu venir !

« Je peux tout t'expliquer », balance Lexi en augmentant le rythme de son manège, les mains se promenant sur le corps de Coma pour stabiliser sa course qui en devient réellement effrénée.

Le capitaine la suit du regard sans se départir de son expression réprobatrice, bien qu'il ait cessé ses râles dignes d'un moteur encombré.

Hayden s'immobilise soudain, réalisant la scène qui se joue sous ses yeux. Comme s'il venait de trouver les dernières pièces d'un puzzle sur lequel il aurait longtemps buté, sa bouche prend une forme de « o » et se referme dans la foulée. Il pointe, cette fois, son index sur le capitaine.

« Je vais te tuer ! »

Et, à la grande surprise de Lexi, Coma éclate de rire. Elle le regarde un long moment, lui semble-t-il, jusqu'à ce qu'il s'arrête de rire, incapable de décrocher cette image de sa rétine. Une pointe de jalousie se mêle à la curiosité, même si, à bien y réfléchir, ce n'était pas tout à fait la première fois qu'elle le voit aussi... vrai ? Lui-même ? Quand il est avec certains gardes (elle pense au lieutenant Gork, notamment), Coma se montre effectivement sous un jour un tantinet différent. Toutefois, il ne s'est jamais laissé aller à rire ouvertement et, ça, elle en est certaine.

« Tu peux, mais ce serait du gâchis. D'abord parce que je n'ai absolument rien fait ta tête de mule de sœur s'est invitée sur l'Hyperion en clandestin. »

Hayden la perfore d'un regard lourd de sens qui lui rappelle des années passées depuis longtemps. Quand il la prévenait de quelque chose et qu'elle n'écoutait pas. Quand il sous-entendait d'un simple coup d'œil qu'elle allait avoir des ennuis, une fois qu'ils seraient rentrés à la maison.

« Ouais, une vraie tête de mule », ponctue-t-il à son tour.

Elle se redresse un peu et lui fait une grimace.

« Je ne comprends peut-être pas votre jargon mais je ne suis pas assez bête pour ne pas entendre la moquerie.

— C'est un compliment dissimulé », soulève Coma à l'attention de Lexi, juste avant de continuer, cette fois pour Hayden : « Et ensuite parce que tu n'auras pas ma place de sitôt, même si tu me fais disparaître habilement. »

Coma passe une main sur l'épaule de son sergent et ils avancent d'un pas tranquille, un peu désynchronisé, le long de la rampe suspendue jusqu'à l'ouverture encore béante qui mène à l'intérieur du vaisseau. Lexi les suit en ronchonnant, à bonne distance. Elle peste sur cette espèce de relation étrange qui ressemble à de l'amitié, dont elle ignorait tout, qu'elle n'aurait jamais suspectée, dont elle n'aurait jamais rien voulu savoir, qui l'énerve déjà un peu trop... Coma interrompt sa discussion avec Hayden pour se retourner et attendre qu'elle les ait rejoint. Elle prend soin de traîner des pieds.

« Tu ne perds rien pour attendre, toi, grogne Hayden quand elle lui passe devant.

— Tu devrais me remercier d'avoir fait tout ce chemin pour toi, frère ingrat.

— T'as de la chance que je te laisse pas rôtir au soleil, ouais.

— T'aurais pu me prévenir de ta montée en grade, siffle-t-elle en changeant de sujet.

— T'aurais pu me parler de tes fréquentations !

— Et rappelle-moi pourquoi tu ne m'as pas non plus parlé de tes permissions de communications ? »

Hayden a le bon goût de se taire, bien que sa moue parle suffisamment pour lui.

« C'est moi qui devrais te laisser rôtir au soleil », conclut Lexi.