14. Lothering

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Ils décidèrent de marcher toute la nuit au milieu des marécages boueux. L'obscurité, alourdie par l'humidité de l'air et les odeurs des divers végétaux gorgés d'eau, n'aidait en rien leur progression, mais tous refusaient de céder à la fatigue. Flémeth aurait pu leur accorder une nuit de gite supplémentaire, mais la vieille femme estimait sûrement qu'ils avaient assez profité de son hospitalité. Reann comprenait qu'elle les chasse pour retrouver sa tranquillité. En revanche, c'était étrange de laisser sa fille partir ainsi, livrée à la horde des engeances, aux animaux affamés et aux sables mouvant, alors qu'elle leur avait fait promettre de la garder saine et sauve. Peu importait le raisonnement de la sorcière dans le fond. La seule certitude était qu'aucun d'eux ne souhaitait se risquer à une halte, même brève, dans cette lande hostile.

— Quand quitterons-nous les Terres Sauvages ?, demanda Reann d'une voix sourde à Morrigan qui marchait en tête pour les guider, éclairant ses pas d'un orbe lumineux  vert.

— Pas avant plusieurs heures. Je pourrais trouver une grotte pour nous arrêtez et nous reposer, si vous le souhaitez.

— Je ne préfère pas.

Cet endroit la ferait à jamais frémir. Les horreurs qu'elle y avait vues lors de son initiation de Garde des Ombres brûleraient dans sa mémoire comme un fer rouge marquait la peau. En respectant l'intonation prudente de leur discussion, elle reprit :

— Et le village dont vous nous avez parlé?

— Environs deux jours encore. Ne vous inquiétez pas, nous ne croiseront pas d'engeances ici.

— Comment pouvez-vous l'affirmer ?

— Je les tiens éloignées grâce à ma magie. Je ne pourrais pas faire cela tout le temps bien sûr, mais pour cette fois, c'est indispensable.

Reann acquiesça. La magie était une discipline étrangère pour elle. Elle ne comprenait pas comment cela fonctionnait, et de crainte d'avoir des questions déplacées, n'avait jamais osé demander aux rares mages qu'elle avait pu croiser ce qu'il en était.

— Votre ami est-il toujours aussi silencieux ?

Reann jeta un coup d'œil par-dessus son épaule ; dos vouté, Alistair les suivait de plusieurs pas et fermait la marche, accompagné de Fenris dont la truffe n'avait de cesse de frétiller et les oreilles dressées pivotaient au moindre bruit. Le jeune homme n'avait plus rien du plaisantin que Reann avait rencontré à son arrivée à Ostagar ; il était abattu, éprouvé, tout comme elle l'avait été en quittant Hautecime.

« Ce n'est pas mon ami », fut la première pensée qui lui traversa l'esprit. Du moins, il ne l'était pas au sens intime du terme. Mais ne sachant comment qualifier leur relation pour l'instant, elle s'abstint de toute remarque à ce sujet.

— Duncan et lui étaient très proches. Il accuse le coup.

— Certes. Mais s'il pouvait marcher un tout petit peu plus vite...

Puis elle accéléra la cadence, emportant le peu de lumière qui les éclairait avec elle pour forcer les autres à la suivre.


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Lothering, 27 Chavande 9:30 Dragon —

Leur rythme ne ralentit guère lorsqu'ils quittèrent les Terres Sauvages. Ils prirent un peu de temps pour dormir et se restaurer, mais souhaitaient tout de même atteindre le village de Lothering au plus vite. L'une des raisons de cette motivation restait l'Engeances.

Après sa victoire à Ostagar, la horde avait poursuivit sa route vers Férelden, et avait déjà fait de nombreux dégâts et victimes. La Voie Impériale, qui reliait Ostagar au reste de Férelden, était détruite par endroits, rendant sa pratique jusqu'au village de Lothering compliquée. Il leur fallu parfois suivre sa route pavée et surélevée, ou la quitter pour la longer en passant par les chemins qui traversaient les exploitations agricoles. Là encore, les engeances avaient laissés des traces de leurs passages ; chaque fermes à proximité de leur route étaient abandonnées, pillées, ou réduite en cendre. Il leur arrivait de retrouver quelques moutons ou druffles brouter en toute liberté dans des champs et les prés et profiter sereinement de leur vie, sans se douter un seul instant des enjeux du monde, et d'envier leur ignorance.

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