L'horizon verdoyant

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Dans un univers magique où les êtres les plus merveilleux existaient, se trouvait un arbre immense. Celui-ci dominait la région et donnait vie à tout ce qui l'entoure. Il s'agissait aussi d'un foyer pour ces petites créatures aux ailes délicates que l'on appelait les fées. l'Arbre de vie était donc leur royaume. Les fées y avaient chacun un rôle différent et pour cela, elles étaient dès leur plus jeune âge soumises à un enseignement très vaste. Elles restent ainsi dans le royaume à étudier tout ce qui était nécessaire à la vie. Comment la nature prenait vie ? Mais aussi comment le royaume fonctionnait ? Les fées ne sortaient de leur arbre que lorsqu'elles auront choisi leur métier et qu'elles devraient se spécialiser dans leur domaine.

Mon nom est Iris et je suis une fée de ce royaume. Je n'avais que quinze ans quand tout cela a commencé. J'étais très indécise sur le choix du rôle que j'allais devoir endosser toute ma vie. D'ailleurs rien que d'en parler, ces mots m'effrayaient : "Toute ma vie". Comment à cet âge je pouvais décider d'un enjeu aussi important. Et si je me rend compte que mon métier ne me plaisait pas ou que je trouvais mieux ailleurs, aurais-je le droit de me réorienter ? J'avais l'impression d'être la seule à me poser cette question, c'est vrai, aucune fée ne semblait insatisfaite de sa situation. Aucune mère n'abordait le sujet. Comme si elles avaient toujours su dès la première seconde, avant même d'apprendre à voler, la voie qu'elles devaient choisir. Comme si ce simple mot "choix" ne faisait pas partie de leur vocabulaire et que c'était plutôt instinctif pour elles. 

Je me sentais tellement différente et cela me faisait peur. À chaque fois que j'étudiais un domaine j'y voyais des points positifs et des points négatifs et c'était difficile de trancher. Pire encore, parfois quand je trouvais quelque chose qui me plaisait vraiment, comme s'occuper des plantes. J'étudiais le sujet en profondeur et me rendais compte qu'il fallait dépendre d'un autre domaine comme l'eau, et aussitôt je m'aperçus que le domaine de l'eau aussi m'intéressait beaucoup. Enfin, ce qui me paraissait le plus compliquer c'était de se faire une idée du métier simplement à partir de livre, sans même en vivre l'expérience sur le terrain.

D'ailleurs j'étais curieuse de voir le monde extérieur. Mais oui ! C'était donc ça ! Je devais découvrir le monde par moi-même et m'en faire ma propre expérience pour décider de ce qui me plairait ou non ! C'était décidé, je devais sortir de cet arbre pour explorer les environs. Mais, comment faire ? Des gardes étaient postés partout dans l'arbre et surveillaient chaque sortie. Il fallait avoir l'écusson de son métier brodé sur son sac pour justifier toute sortie pour les fées de moins de seize ans. Car oui, je ne vous l'avais peut-être pas dit, mais c'est à seize ans qu'une fée devait définitivement choisir son rôle. Je m'assis donc dans ma cuisine, le coude sur la table, le poing fermé qui supportait ma joue tout en tapotant le pied au sol de façon répétée, comme si je gonflais mon cerveau pour en extraire une solution. Une heure passa sans qu'une idée me vienne, alors, je me levai en direction de la porte d'entrée. À cet instant je vis le sac de ma mère accroché au porte manteau. Elle était sorti faire je ne sais quoi, elle m'avait simplement dit qu'elle rentrerait tard. Elle m'avait donc laissé une opportunité à ne pas rater. Je compris très vite qu'avec ce sac, je pourrais le présenter au garde en prétextant devoir faire des échanges avec d'autres espèces car ma mère était marchande, c'était donc l'écusson des marchands brodé sur son sac et c'est ce qui allait me permettre de sortir de l'Arbre. 

Je sortis alors de chez moi avec le sac à ma droite, au niveau de mes hanches et dont les deux sangles traversaient mon corps en diagonale pour se finir sur mon épaule gauche. J'essayais de croiser le moins de personne possible sur mon chemin, que ce soit des gardes ou des amis trop proches de ma maison, ils n'auraient pas compris que je porte un sac de marchand alors que je n'ai pas encore fait de choix professionnel. Ils auraient suspecté quelque chose, surtout que je n'avais pas réfléchi à un plan si jamais on me questionnait. Bien des pas plus tard, je m'approcha de la sortie avec moins d'inquiétude. Ces gardes au moins ne m'avaient jamais vu et ne savaient pas que je mentais. Face au garde, il me dévisagea tout en me demandant :

- Où comptes-tu aller jeune fée ?

- Vous ne voyez pas mon écusson ? lui répondis-je d'un air sûr de moi. 

- Si si, me relança-t-il, j'ai bien vu ton écusson, mais j'ai aussi bien vu que ton sac était vide ; ni marchandise, ni argent. Comment comptes-tu commercer ? Je veux bien croire que tu es débutante dans ton métier, mais tu dois connaitre les bases d'un échange commercial tout de même. Rien ne s'obtiens gratuitement.

Mon assurance s'évapora, je n'avais pas pensé à ça ! J'étais parti trop hâtivement quand j'ai vu le sac mais je n'avais pas pensé à une vraie stratégie. Avant même d'avoir eu le temps de réfléchir, le garde reprit :

- Et ton élocution laisse à désirer pour une marchande ! Parle avant que je ne te renvoi chez toi et que je prévienne ta famille que tu as tenté de fuir. 

- Justement, rétorquais-je avec mépris, cela ne fait qu'une semaine que je suis marchande. Je suis au tout début de ma formation. Les premiers jours je sortais avec ma formatrice par l'entrée ouest de l'arbre. Aujourd'hui elle est parti avant moi en me demandant de la rejoindre une heure après. Je ne suis qu'en phase d'observation, c'est donc elle qui possède la marchandise et effectue les transactions.

Mon explication lui paraissait plausible, mais il me posa une ultime question pour s'en assurer :

- D'accord, admettons, mais dis-moi juste qui est ta formatrice.

Selon lui, je ne devais connaître personne dans ce domaine si je mentais. Sauf que ce sac, je ne l'ai pas volé à un inconnu. Je connaissais alors qu'une seule personne dans ce métier, ma mère. 

- Amelys ! Lui répondis-je. Fée marchande du second niveau de l'arbre. 

Le garde me laissa enfin passer. La pression redescendu, je m'avançai vers la sortie tout en observant  cet étroit passage de lumière qui menait à l'extérieur. 

Au premier regard, je fus émerveillée par la beauté des couleurs que m'offrait la nature. Je sentais mon coeur s'accélérer et mes yeux brillaient. Je ne savais plus où donner de la tête. En face de moi, un immense champ verdoyant rempli de diverses plantes et dont le soleil faisait briller l'ensemble d'une façon si harmonieuse. J'étais vraiment excitée et très curieuse, je me dirigeai alors précipitamment vers la fleur la plus proche. Cette fleur était d'un rouge éclatant, je m'imaginais déjà avec une robe de la même couleur, ainsi, je serais la plus lumineuse des fées du royaume. Je ne manquerais pas de captiver l'attention de tout le monde avec une parure pareille. D'un coup, l'odeur de cette fleur me caressa les narines. Ce parfum était très sucré mais très doux à la fois. En fermant les yeux, je souriais à l'idée d'un souvenir agréable. Cette odeur me rappelait la sucrerie que j'adorais manger en cachette. Cet arôme, si délicat, avait attiré quelque chose d'autre. Une créature ailée aux couleurs rayées de jaune et de noire se posa sur cette fleur, juste à coté de moi. Intimidée, je m'éloignai à vive allure. Je ne connaissais pas encore les créatures de l'extérieur. Cela semblait être une abeille dont j'avais déjà entendu parlé, mais je ne savais pas lesquelles étaient fréquentables ou celles qui étaient dangereuses. On ne pouvait pas me reprocher ma prudence pour ma première sortie.

Je continuai alors mon chemin en suivant la direction du soleil, quand soudain j'aperçu un cours d'eau légèrement agité. De toutes les fois où j'avais vu de l'eau dans mon Royaume, il s'agissait d'une eau calme, entreposés dans ses sceaux ou dans des réserves. J'écarquillai mes yeux, surprise, et piquée par ma curiosité je m'approchai au plus près. Je me demandais si cette eau avait le même goût et la même texture que l'eau calme du Royaume. Je tendis la main dans l'eau mais l'instant d'après, brusquement, le courant trop puissant pour une petite fée comme moi m'emporta sauvagement. Je tentais de me débattre de toute mes forces, j'agitais mes mains dans tous les sens sans savoir ce qu'il fallait vraiment faire pour me sortir de là, je n'avais jamais eu à apprendre à nager chez moi. Je paniquais et dans un ultime élan, tentais de battre mes ailes pour m'envoler. Cependant, mes ailes étaient devenue trop lourdes sous le poids de l'eau qui me paraissait peser cinquante fois mon poids. Je n'avais donc le choix que de subir le courant qui m'emportait avec entrain. Ma tête se retrouvait à jongler entre l'air et sous l'eau, mon corps tournait dans tous les sens, ma respiration peinait de plus en plus. L'eau entra dans ma bouche et m'étouffa. Je perdis subitement connaissance.


Une désolation féeriqueWhere stories live. Discover now