Chapitre 36: Fugitifs

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- Il faut se grouiller, hurlé-je aux autres. Il ne nous reste que quinze minutes.

Nous accélérons le pas. Il me brûle de prendre tout le monde avec moi et de m'élancer à toute vitesse vers l'arche, mais soyons logiques: je ne peux tout simplement pas transporter cinq personnes avec moi sans les blesser. Ce serait trop risqué d'essayer.

Après plusieurs minutes, nous arrivons au sol et courrons dans les sentiers de quartz qui mènent à l'arche. Une longue pente montante se dresse avant nous. Mon coeur se déchaîne dans ma poitrine: après l'avoir gravie, nous tomberons nez-à-nez avec l'arche. Il ne manquera plus qu'à traverser ses grilles et de parcourir le long couloir qui mène jusqu'à la partie non-fréquentée du métro. Nous aurons réussit. Nous serons libres.

- Nous y sommes presque! crié-je aux autres en gravissant la montée.

J'entends les autres derrière moi haleter: je vais peut être à un rythme légèrement trop rapide pour eux. Je m'arrête quelques instants pour leur laisser l'occasion de me rejoindre.

- Tu... tu vas un peu vite, Jenn, souffle la pauvre Tess, qui se trouve beaucoup plus en-arrière que tous les autres.

Je me sens vraiment coupable que Tess nous accompagne: elle est innocente, naïve, amusante. Elle n'a rien à voir avec tout ça. C'est alors qu'elle arrête brusquement d'avancer. Ses yeux s'agrandissent de panique et elle hurle:

- On a oublié Jess!

Alex, Jacob, Fabien, Amé et moi échangeons un regard, un peu mal à l'aise. Nous n'avons pas le temps de faire demi-tour et de traverser toute la ville jusqu'à la place centrale! M'arrachant les mots de la bouche, Alex s'approche doucement de Tess et lui dit:

- Je suis désolé, mais ce serait tout simplement irréfléchi de tout mettre à l'eau seulement pour aller chercher ta copine. Pour l'instant, l'important est de se tirer vivants d'ici.

- Jessica est plus que ma simple copine: elle est comme ma soeur!

Tess éclate en sanglot. Je comprends sa panique et son désarroi: moi aussi, si je savais que Kat était laissée à elle-même au beau milieu d'une ville en pleine crise avec des policiers qui tirent dans la foule et des dirigeants sans coeur pour la gouverner, j'aurais paniquée et aurais exigé qu'on aille la chercher. Mais en même temps, comme dit Alex: ce serait bête de refaire tout le chemin inverse pour finalement se faire fermer les portes de la grille sous le nez. On serait dans de beaux draps!

- Je comprends qu'elle soit triste et tout le reste, mais il faut vraiment qu'on y aille, insiste Fabien avec une touche d'agacement dans la voix.

Tess renifle et redresse la tête, les yeux pleins d'eau.

- Je suis désolée de te dire ça, ma fille, mais on est en guerre à partir de maintenant, déclare Amé en posant ses poings sur ses hanches. Faudra que tu arrêtes de pleurnicher à toutes les choses désagréables qu'on va vivre. Tu n'es plus dans ton petit appartement à New York, mais impliquée dans une révolution qui a pour but d'empêcher la race alteranne, ta propre race, de se détruire elle-même en anéantissant celle des Étamiens. La vie n'est pas un monde peuplé de licornes et d'arc-en-ciels magiques, réveille-toi! Si tu n'es pas capable de l'admettre, eh bien vas-y, va rejoindre ta copine et allez vous tapir ensemble dans une petite maison alteranne en agissant comme de bonnes citoyennes. Mais je te préviens: la vie ne sera pas nécessairement plus facile ici que si tu pars avec nous. Alteran n'est plus en paix, et ce n'est pas en cessant d'agir et en se sauvant de la réalité que tout s'arrangera. Que tu le veuilles ou non, la vérité finira par te rattraper. Alors fais un choix, maintenant: tu pars ou tu restes. Mais dis-toi une chose: dans les deux cas, les prochains mois seront pénibles. Je veux dire, très pénibles.

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