Chapitre 1

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Vianney - N'attendons pas.

Lundi 13 Janvier - 00 : 27 ; Manhattan, New York

Cette soirée encore, Deborah Johnson s'est retrouvée avec sa bouteille de Whisky et son verre presque vide. Affalée contre son canapé, les pieds posés sur le guéridon en face d'elle, elle avait un regard complètement vacant sur le verre qu'elle tenait en mains. Ses pensées s'égaraient comme les fourmis éparpillées sur le sol de son appartement minable. Minable, car depuis son aménagement, pas une seule fois elle avait daigné s'occuper du rangement. Résultat : Elle vivait dans une porcherie. Parfois même, elle avait très honte de poser son regard dans le réfrigérateur. Il y avait des restes de nourriture un peu partout dans la maison, qu'en serait-il dans le congélateur ? Elle préféra ne pas y penser.

Comment arrivait-elle à tenir sur ses pieds chaque jour ? Répondre véridiquement serait difficile. Sa flemme olympique l'impressionnait Son enthousiasme s'était volatilisée, il y a quelques semaines, depuis son maudit emploi. Serveuse. Rien de mieux, avec les nombreux diplômes qu'elle a décroché.

Sa journée actuelle n'était qu'une routine : Servir des clients à son restaurant, subir des taquineries blessantes de son despotique de patron continuellement critique et rentrer, fatiguée. Les raisons pour lesquelles la majeure partie des jeunes s'orientaient vers l'auto-emploi lui paraissaient claires. Toutefois, elle se disait juvénile, elle avait donc le temps de réfléchir à une infinité d'alternatives.

Quelques mois auparavant, un choix lui était imposé : Continuer la faculté de droit ou rejoindre la ville de la liberté pour vivre une nouvelle vie. L'hésitation n'avait pas eu sa place dans sa décision. L'Arizona ne l'avait jamais plu. A côté de la ville où tout était possible, sa volonté semblait claire.

Néanmoins, aujourd'hui, elle regrettait. Si ses parents l'aimaient assez, ils l'auraient retenue. Au lycée, livrée à elle-même, Deborah n'a pas pu empêcher un profond sentiment de solitude s'emparer d'elle. Tout comme le pathétique cliché de la timide. Sauf qu'elle n'était ni brune, ni blonde, mais afro-américaine.

Elle adorait la musique. Rien ne la passionnait autant que spéculer autant devant un micro. Elle se croyait être une star lorsqu'elle chantait. Son père adoptif l'avait initié, jusqu'à la fin de son adolescence au piano et à la guitare. Des concours scolaires remportés avec son groupe de pop ne la permirent malheureusement pas de devenir professionnelle, plus tard. Aujourd'hui, si elle pensait à l'abandon de sa première passion, elle se disait aussi, qu'elle peut encore s'en servir. Oui, les réseaux sociaux, les concours, les auditions... Ne pouvait-elle pas elle aussi, essayer de se lancer ?

Ce n'était pas la première fois qu'elle y pensait. L'idée de revenir à sa passion première ne cessait de l'assaillir depuis qu'elle résidait à New York. Toutefois, elle ne fut jamais aussi intense que maintenant. Regarder la plus part du temps les affiches à Times Square n'arrangeait rien. Au contraire, cela stimulait son envie de quitter son train-train quotidien pour l'inattendu. L'inconnu. Le mystère. Elle en rêvait. Elle pourrait en rêver toute la vie. Oui, après-tout, elle est encore jeune ! Son visage d'afro-américaine d'une vingtaine d'années pouvait encore faire rêver !

Elle se laissait cependant aller au désespoir. Au regard de sa vie, l'on croirait qu'elle serait toujours faite pour la classe moyenne américaine. L'American Dream ne serait-il pas aussi faite pour elle ?

Ce cru être sa dernière interrogation de la journée. Elle éteignit la télévision sous ses yeux, dès que le journal télévisé de minuit débuta. Elle devait dormir, bien qu'elle éprouve réellement son lendemain. Aspirant à ce qu'un silence l'enveloppe complètement, elle ferma ses yeux.

ESPRIT CHASSEURWhere stories live. Discover now