19 : DYLAN + GINA = CATA

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CW : Coming-out non-consenti / Violence physique.

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─ Tu pouvais vraiment pas fermer ta grande bouche, hein ? T'étais obligée de l'ouvrir ?

Teresa a sursauté à mon entrée fracassante, son téléphone lui en est tombée des mains. L'appareil a lourdement rebondi sur le matelas avant de terminer sa chute sur le tapis. Elle m'a regardée, affolée, comme un lapin pris entre les phares d'une voiture. Sa réaction ne m'a pas attendrie le moins du monde. Terminado. Finito la sympathie pour elle. Teresa n'était qu'une fouine qui vous la mettait à l'envers dès qu'elle en avait l'occasion.

Elle s'est empressée d'affirmer :

─ J'ai rien fait.

Cette phrase était celle des personnes coupables, je le savais, je l'utilisais à toutes les sauces. Teresa avait tout appris de moi. Je l'ai pointée d'un index menaçant. Non seulement, j'étais remontée contre elle, mais pire, j'étais vexée. Blessée à vif dans ma fierté. Ce n'était pas seulement une histoire d'ados sans importance, elle venait de me retirer une part de moi-même : ma capacité à m'ouvrir aux autres au moment où je le voulais.

─ À quoi ça sert que je te confie un secret si c'est pour que tu le racontes à la Terre entière ? T'en a pas marre d'être la plus grosse des commères du village ?

On le savait déjà, que j'étais une pleureuse, mais cette fois-ci, je me refusais de craquer. Ce n'était pas l'envie qui me manquait. Teresa ne disait rien, elle arborait son air innocent de chiot en détresse. J'ai hurlé :

─ Parle, merde !

─ J'ai pas fait exprès ! C'est venu comme ça !

Si elle n'avait rien avoué jusque là, j'ai pris son ton défensif comme une confession. C'était elle, j'en étais sûre depuis le début !

─ Mais tu fais jamais exprès, c'est jamais de ta faute avec toi !

Nos cris ont résonné à travers tout le couloir, maman a fini par se montrer derrière moi, alertée par le bruit.

─ Qu'est-ce qu'il vous arrive ?

On sentait dans sa voix une profonde lassitude à la perspective d'une énième dispute. Elle ne nous prenait pas au sérieux, persuadée qu'on faisait encore des chichis pour rien. Elle n'avait pas idée de la proportion de la situation. Teresa et moi avons parlé en même temps. Dans ces moments, il fallait être la première à donner sa version des faits pour remporter la bataille. Maman s'est raidie, les épaules crispés, les yeux plissés, horripilée par nos beuglements.

─ Stop ! Stop ! Stop ! a-t-elle haussé la voix plus fort que nous. On y comprend rien. Gina, qu'est-ce qu'il y a ?

Teresa a pris une inspiration, se préparant à protester contre la décision arbitraire de me donner la parole en premier. D'un geste de la main, maman lui a intimé de la fermer. Elle s'est rabougrie sur elle-même, fâchée. J'ai dit, d'une traite, le souffle court et le cœur battant aux tempes :

─ Teresa a dit à Dylan que j'étais lesbienne. Comme ça. Sans raison.

Elle s'est justifiée aussitôt :

─ C'était pas sans raison, il m'a parlé de toi, il était mal, il est venu me poser des questions. J'ai essayé de l'aider à trouver des réponses !

─ Mais merde ! C'est pas à toi de dire ce genre de trucs, c'est ma vie, c'est mon identité, c'est à moi de choisir qui le sait, ça m'appartient.

Dylan Mercier doit payerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant