Chapitre 35

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Dale tournait en rond dans la salle d'attente. Avec ses cheveux hirsutes, son air renfrogné et son regard brillant de rage, il avait tout d'un fou dangereux. Les quelques personnes présentes dans la salle évitaient de se trouver sur son passage et surtout de croiser son regard. Du sang séché maculait son tee-shirt blanc, ses bras et ses mains et c'était la moindre de ses préoccupations.

Son angoisse grandissait d'heure en heure. Il ne cessait de se reprocher les derniers événements. S'il n'avait pas été aussi buté, aussi intransigeant, Kara ne serait pas en train de lutter pour survivre. Les larmes se bloquaient dans sa gorge et il gardait les yeux secs. Pleurer en public, montrer sa détresse était indigne de lui et pourtant, il ne désirait qu'une chose : faire voler en éclats cette image de dur à cuir impitoyable.

Une infirmière lui avait dit de rentrer chez lui, d'aller se reposer et elle n’avait obtenu ni plus ni moins que des rugissements furieux pour réponse. Sa Kara était entre la vie et la mort et personne ne pouvait l'empêcher d'arpenter cette foutue salle s'il en ressentait le besoin. Des bruits de pas claquaient sur le linoléum, puis des voix rageuses retentissaient dans le couloir. Mais il s'en fichait comme d'une guigne.

Épuisé, il cessa de tourner en rond et s'écroula dans l'un des sièges en PVC qui craqua son poids. Ces maudits fauteuils n'étaient pas faits pour soutenir un homme d'une stature aussi puissante que la sienne. Il jeta un regard féroce aux deux personnes assisses près de lui. Elles s'enfuirent en hoquetant lorsqu'il gronda. Il voulait être seul afin de pouvoir exprimer sa peine sans s'attirer de soupir compatissant ou de regard curieux. Il avait beau retourner la situation dans tous les angles possibles et imaginables, rien n'y faisait sa culpabilité enflait. Il se sentait tellement mal et regrettait infiniment toutes les paroles haineuses qu'il avait proféré à l'encontre de Kara et de sa famille. À force de refouler ses émotions, de blinder son coeur derrière une épaisse couche de glace, il avait oublié à quel point l'on pouvait souffrir en perdant la personne que l'on aimait plus que sa propre vie. Draco disait souvent que rien n'arrivait pas hasard. Peut-être y avait-il un fond de vérité dans tout cela. Peut-être que Kara devait être blessée à mort, peut-être que ses souvenirs ne devaient resurgir que durant une telle épreuve.

Seulement, avec des si et des peut-être, on pouvait refaire le monde. Lui qui n'avait jamais cru au destin, aujourd'hui en payait le prix. Une odeur d'éther lui titilla les narines. Les yeux baissés, il vit le bout d'une paire de chaussons verts. Un toussotement résonna, sa gorge se comprima douloureusement dans sa gorge.

– Monsieur St James ?

Dale redressa la tête, prêt à entendre les excuses du médecin, de lire la compassion dans ses yeux. Non, il ne voulait pas les entendre, il ne le supporterait jamais. Il ne pouvait pas imaginer un seul instant de ne plus voir le visage rieur de Kara, son sourire, l'éclat si merveilleux de ses yeux. Un élancement lui déchira la poitrine. Néanmoins, il se leva.

– Oui.

Le médecin, un homme d'environ quarante ans portait sur son visage des signes de fatigue et de crainte. Dale ferma les yeux un bref instant, refoulant les larmes tant attendues qui lui montaient aux paupières.

– Je suis le docteur Coleman, le chirurgien qui a opéré votre femme.

Dale déglutit péniblement et serra la main du praticien.

– Dites-moi la vérité et n'omettez aucun détail.

Le médecin acquiesça tout en évitant le regard de Dale. Immédiatement, il s'imagina le pire. Sa Kara était partie... Comment pourrait-il lui survivre ? Comment pourrait-il trouver en lui la force d'apprendre cette tragédie à Caelan et à Adriel ?

Sombres Héritages-1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant