en média: Thought contagion -> Muse
Manier une arme s'était révélé ne pas être aussi complexe que je ne le croyais. Il suffisait juste d'être doté d'un minimum de patience, de courage et de précision. J'étais très attentive aux indications d'Anastasia, qui tournaient en boucle dans mon esprit. Je remerciai les arbres nous entourant de nous apporter tout de même un peu d'ombre en cette journée torride. Le solstice d'été, le jour le plus chaud et le plus long de l'année. Cette date était symbolique d'autant plus qu'elle se situait à six mois de ma date d'anniversaire.
Mon équipe s'avéra être très soudée. Ils travaillaient tous en harmonie avec leur pouvoirs et leurs coéquipiers. En symbiose avec eux-mêmes, centrés sur leur but. Leur objectif commun les animait dans cette bataille. Face à nous, se trouvait l'armée du Chasseur. Terrifiante, certes, mais comme ses congénères, mon ennemi ne se concentrait que un seul objecgif: tuer un maximum des gens.
Soudain, dans la matinée, des trompettes retentirent, annonçant l'arrivée d'une personne importante. C'est avec effroi que je découvris le Grand Prophète et toute son équipe. Un visage impassible, un regard de glace, il avançait, le buste droit, dans ma direction.
- C'est donc toi, la grande Léna Susans. L'Élue. L'enfant maudit. L'annoncée du Prophète.
Je restai de marbre tandis qu'il me contourna.
- Pour tout t'avouer, tu ne me fais pas peur. Des gamines comme toi, j'en ai vu des dizaines dans ma vie. Ce n'est pas une écervelée dans ton genre qui va me faire changer d'avis et renoncer à mon combat.
Je ne cillai pas face à sa réplique cinglante. À vrai dire, je savais qu'il ne faisait tout ceci uniquement dans l'optique de me déstabiliser pour mieux profiter de mes faiblesses. Il cherchait à se montrer supérieur et à abuser de ses pouvoirs pour me faire reculer. Mais je ne me laisserai pas faire. L'étincelle de la rébellion avait craqué, allumant un grand brasier sur son passage. Je me retournai face à mon équipe et regardai un à un ces silhouettes encapuchonnées qui étaient prêts à se sacrifier pour moi.
- Il est l'heure. Longum foret silentium*
Animés soudain car une animosité, ils répondirent à mon appel et se ruèrent sur nos ennemis. Supervisant leurs actions avec l'aide de mon mentor, qui ne me quittait plus, je me concentrai sur notre stratégie, qui, pour le moment, portait ses fruits.
Armée d'une soudaine flamme de bravoure qui crépitait au fond de moi, je me retrouvai seule face au Chasseur. Anastasia me criait de ne pas le faire, mais je pris sur moi et fonçai. Toute ma haine envers lui se déversa dans mon corps et se transforma en une boule d'énergie que je lui envoyai en pleine poitrine. Touché en plein cœur, il recula sous l'effet de la douleur. Un vampire me seconda, rejoint par trois autres qui, ensemble, finirent par le tuer.
Mon principal ennemi hors du combat, je me recentrai sur celui que je devais éliminer pour garantir la paix et venger mes parents. Le Grand Prophète. Cet homme tyrannique et impitoyable qui faisait trembler de peur notre peuple entier. Qui torturait des innocents pour son simple plaisir. Qui avait ordonné et orchestré l'assassinat de mes parents. Il cumulait à lui seul des milliers de raisons de le haïr. J'avais assuré à ma mère que je réussirai pour donner un sens à son sacrifice.
Le Prophète chargea en premier. La douleur de son coup me percuta en plein fouet. Tressaillante, je l'a perçu comme une décharge électrique, qui me fit aussitôt reculer et serrer les dents. Je perdai de la force et mon esprit n'arrivait plus à anticiper les actions de mon adversaire. Mon énergie vitale diminuait petit à petit et je manquai de m'écrouler.
Un autre sortilège me prit par surprise et me frappa énergiquement. Je tombai, sous l'effet de la douleur lancinante qui me traversait. Ma vue se brouilla et des larmes pointèrent dans mes yeux. Je ne devais pas renoncer. Je me devais de le faire, tout le monde croyait en moi. Une main s'immisça dans mon champ de vision. Je relevai les yeux et vis une jeune fille qui me tentait sa main pour m'aider à me relever. De toute mes forces, je me remis debout, puisant de l'énergie dans la terre. Je la gratifiai d'un sourire sincère et reconnaissant auquel elle répondit timidement.
Ensuite, je murmurai intérieurement une incantation à la prêtresse Isaïa. Elle unit ses pouvoirs aux miens et, rassemblant les différents dons des ancêtres à ma disposition, je repris part au combat en assénant à mon ennemi un coup qui le fit frémir.
Hélas, le Prophète était très puissant, bien plus que je ne l'aurais imaginé, et les pouvoirs des ancêtres finirent par ne plus suffir à le blesser. Heureusement pour moi, j'arrivais de nouveau à anticiper ses actions, me permettant de viser plus juste à chaque assaut.
- Léna, vous devez unir vos pouvoirs. Il a accumulé trop de puissance. C'est la seule manière que tu as pour le vaincre.
J'acquiescai.
- D'accord, Anastasia.
Je rappelai les membres de mon armée. Ils vinrent se placer à mes côtés, nos mains entremêlées. Une fois nos doigts liés, je ressentis une source d'énergie puissante me transpercer. Les uns après les autres, mes alliés unissaient leurs pouvoirs aux miens, me rendant plus forte à chaque fois. J'étais prête à affronter n'importe qu'elle épreuve avec autant de puissance.
Mes alliés se mirent en retrait et le combat final explosa. Moi, face au Prophète. Un élan de courage me fit prendre l'avantage. Après plusieurs assaut et ripostes réciproques, je parvins à puiser assez d'énergie en mon for intérieur pour lui asséner le coup fatal. Il s'écroula aussitôt.
Soudain, l'ensemble des personnes encore présentes sur la plaine s'inclinèrent face à moi, et l'une d'entre elles prit la parole.
- Ô, grande Prêtresse Léna. Sois louée des Dieux pour tous tes bienfaits. Tu nous as débarrassé de ce malfrat qui tyrannisait nos familles depuis trop longtemps. Ô, Léna. Sois bénie dans tout ce que tu entreprends.
Je fus touchée par ces paroles. Mon esprit ne parvenait pas a réaliser. J'avais réussi. Des personnes vinrent me saluer et me serrer la main, me félicitant et louant mes bienfaits. Très émue, je les remerciai chaleureusement, une main posée sur le cœur en signe de reconnaissance.
- Prêtresse Léna ?
Je me retournai en direction de la voix fluette et timide de mon interlocutrice. Une jeune fille aux tresses blondes s'approcha.
- Je suis désolée de vous déranger. Je m'appelle Greta. Léna, je vous en prie, ma sœur... Elle ne va pas bien du tout.
Je la suivis tandis qu'elle me menait jusqu'à un corps immobile. Je reconnus immédiatement la personne qui m'avait tendu la main, m'aidant à me remettre droite lorsque j'étais tombée.
- Ivana, ne nous quitte pas je t'en supplie, sanglota Greta.
La blonde était en larmes devant le corps inanimé de sa sœur. Une plaie béante ensanglantée s'étalait sur la poitrine de cette dernière.
- Léna, parlez lui. Faites quelque chose. S'il vous plaît. Sauvez la...
Je m'approchai d'Ivana et lui pris la main, lui transmettant un peu d'énergie vitale. Celle-ci battit des paupières légèrement.
- Léna, vous nous avez sauvé.
Un mince sourire se dessina sur son visage pâle.
- C'est grâce à vous tous, jamais je n'y serais arrivé sans vous. Merci.
- C'est à vous et vous-même que vous devez cette victoire, Léna. Vous êtes un exemple pour nous tous. Vous...
Ivana laissa sa phrase en suspens et sa tête roula sur le côté.
- Ivana. Ne nous quitte pas.
Je m'accroupis à ses côtés et essayais de lui parler pour la ramener parmi nous.
- C'est fini, Léna, chuchota-t-elle, à bout de forces. J'ai accompli ma mission. Me battre à vos côtés jusqu'au bout a été un moyen de venger la mort de nos parents. Vous avez donné un sens à leur mort.
- Non ! cria Greta. Ivana, je t'en supplie, ne m'abandonne pas.
- Je suis désolée, Greta. Je te souhaite d'être heureuse. Tu le mérites.
La douleur lui tordait soudain le visage.
- Épargnez mes souffrances, Léna... Je n'ai plus de forces... S'il vous plaît...
Je regardai Greta, le cœur gros. Celle-ci confirma d'un signe de la tête, d'immenses traînées de larmes baignant ses joues. Je fermai les yeux et posai mes mains sur son corps, une sur son front et l'autre sur son cœur.
- Je t'aime, Greta, souffla Ivana.
Ses paupières se fermèrent tandis que sa sœur pleurait à côté de moi. Je caressai son visage froid et déposai un baiser sur son front. Une larme roula sur ma joue. Tant de vies avaient été perdues à jamais durant cette sanglante bataille. Je me relevai et pris Greta dans mes bras.
- Ta sœur a été très courageuse. Elle n'a pas souffert.
- Je sais, sanglota-t-elle.
Elle redressa la tête, les yeux rouges.
- Tu as donné du sens à sa mort. Elle rejoindra le ciel avec mes parents. Elle a toujours été un exemple de bravoure.
Je la repris dans mes bras, en larmes. Je savais que cette étape serait émouvante. Plusieurs des nôtres perdirent la vie eux aussi durant le combat, sûrement sous l'effet de la douleur. Le cœur lourd, je m'approchai de chacun des corps et dessinai une croix sur leur poitrine. Puis je commençais à chanter, une prière de deuil. Les voix de mes alliés s'unirent à la mienne, en guise de réponse. Notre chant s'éleva dans la montagne. J'incantai ensuite une prière qui leur permettait d'atteindre le Repos éternel après de nos aïeux. Une larme roula sur ma joue en souvenirs de tous ces disparus.
- Léna, je suis très fière de toi.
- Merci, Anastasia.
- Ma mission se termine là désormais. Tu as acquis toute la maturité et le savoir que je devais t'apporter. Tu as démontré ta détermination et ton courage dans cette bataille. Mon travail est aboutit.
- Tu vas me manquer, Anastasia.
- Toi aussi, Léna. Je te souhaite plein d'amour et de bonheur. Adieu.
La voix de mon mentor se retira ensuite. Le cœur emplit de fierté et de chagrin, je me tournai vers mes comparses et les serrai dans mes bras.
- Léna, désolé de vous interrompre...
- Oui, bien sûr, qu'y a-t-il ?
- Il est écrit dans la Constitution des Lois que quiconque détrône un Prophète devient Prophète à son tour. Il est donc de votre droit de prendre un siège au Conseil. Les Consuls et les Gardiens seront ravis de vous accueillir.
- Je ne sais pas trop à vrai dire. En menant cette bataille, j'ai fait ce qui était de mon devoir. J'ai vengé la mort de mes parents et sauvé vos peuples. Désormais, tous les Fils et Filles de la Lune de n'importe qu'elle lignée sont unis. Réunifier vos clans faisait partie de ma quête et grâce à votre fidélité et votre dévouement, vous avez coopérez main dans la main contre notre ennemi commun. Car entre nous, nous ne sommes pas ennemis. Nous défendons des valeurs et des origines dont nous sommes fiers. Mais, notre ennemi à tous était ce Prophète et ses compatriotes. Arrêtez de vous faire la guerre entre clans, vivez dans l'harmonie. Vos pouvoirs peuvent être compatibles. Chacun aura à y gagner. Inculpez de nouvelles valeurs de paix à vos enfants, l'avenir de nos peuples. Ils méritent de vivre dans un monde heureux.
Je fus coupée par une vague d'applaudissements.
- Mais pour ce qui est de ce poste de Prophète, je ne sais pas si je souhaites l'accepter ou non. Je suis désolée. Je sais que vous aviez confiance en moi, mais je n'ai que seize ans et demi. Tant de choses m'attendent encore. J'aimerais pouvoir vivre mon adolescence, voir mes amis, sortir, profiter de la vie. Je ne vous oublierez pas, je vous le promets mais je crains de ne pas être la personne idéale pour devenir Prophète. Je sais que beaucoup d'entre vous seront déçus par cette nouvelle, vous aviez placé vos espoirs en moi, mais j'aimerais profiter de cette insouciance qui s'offre encore à moi. Je suis fière de ce que je suis, de mes origines, de ce que je représente pour vous, mais je ne souhaites pas être contrainte avec des obligations que je n'arriverais peut-être pas à tenir. Pardonnez moi. J'aimerais pouvoir bénéficier d'un temps de réflexion pour mieux me pencher sur la proposition et être certaine de bien l'examiner sous toutes ses coutures.
Je saluai mon assemblée en signe de reconnaissance. Un homme s'avança et prit la parole.
- Léna, je m'adresse à vous au nom de toute la communauté des loups-garous. Vous nous savez et avez offert à nos générations futures, un avenir paisible et harmonie au sein de notre peuple. Si vous refusez cette offre, nous comprendrons. Vous avez une vie, une famille, il est normal que vous souhaitiez les retrouver. Jamais nous vous en voudrons si vous déclinez ce poste. Quelqu'un prendra votre place au Conseil mais vous resterez dans la légende.
- Merci de votre compréhension. Je vais y réfléchir.
Je leur adressai un sourire chaleureux. Les groupes s'éloignèrent, chacun repartit d'où il venait. La plaine se vida progressivement, après de nombreuses accolades et de larmes. Certains vinrent me saluer et m'adresser des derniers remerciements. Ma tante s'approcha de moi.
- Je suis tellement fière, Léna. Annabelle et Simon le seraient aussi. Ton discours tout à l'heure était honnête et incroyablement mature. Tu étais resplendissante, dans ton élément. Et même si tu nous quittes, nous resterons ta seconde famille. Tu sais également que tu auras toujours une chambre au Manoir Susans.
- Merci Louise.
Elle me serra dans ses bras. Ma tête se logea au creux des boucles blondes qui tombaient en cascade sur ses épaules. J'eus l'impression que le temps s'était arrêté. Et pour une fois depuis très longtemps, j'eus ce sentiment d'être à ma place entourée de ces gens.
(* le silence n'a que trop duré, en latin)
~🌙~
Bonjour !
Comment allez-vous ?
Je suis tellement heureuse de vous partager cet avant-dernier chapitre !
Il est un peu plus long que d'habitude mais il permet de clôturer le combat final de Léna.
• Votre avis sur ce chapitre ?
• Des remarques ?
• Aimez vous la musique en média ?
N'archivez pas tout de suite cette histoire après le dernier chapitre, car un épilogue arrive et peut-être des futurs bonus ^^