Broken

By JaneDevreaux

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La suite sera disponible en papier et numérique dans toutes les librairies en ligne à partir du 9 Janvier 20... More

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Colyna - 3
Mozart - 5
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Colyna - 4

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By JaneDevreaux


 C'est comme si j'avais dormi une éternité. Ma bouche est pâteuse, je me sens vaseuse, je voudrais ouvrir les yeux, mais je n'y arrive pas. Peut-être suis-je trop fatiguée ? Je pourrais me reposer encore un peu, j'hésite.

Quel jour sommes-nous ? Ai-je cours aujourd'hui ? Je suis sortie hier soir, mais j'ai du mal à me rappeler. Est-ce que j'ai bu ? Pleuré ? Mes idées sont confuses et je ne parviens pas à les ordonner, j'aimerais vérifier l'heure qu'il est et mes notifications sur mon téléphone. J'entreprends le geste, m'imagine tâtonner jusqu'à ma table de nuit. Pourtant, je suis toujours immobile. C'est rageant, cet épuisement, la colère qui ne vient pas ! Je devrais m'agiter, m'emporter, je ne fais rien. Je ne sens pas mon corps, c'est comme s'il n'y avait plus que mon âme, je panique, mais rien ne se passe. La pénombre m'engloutit et je ne parviens pas à lutter. Je vais mourir, j'en suis certaine, à moins que ce ne soit déjà fait. Non, je ne veux pas !

Que m'est-il arrivé ? Je voudrais me souvenir, je voudrais voir, percevoir, et comme pour me rassurer, une lueur apparaît. C'est comme une étoile dans la nuit, un point blanc, étrange et lumineux, je me concentre, j'aimerais mieux distinguer, mais je suis éblouie. Je suis toujours immobile, pourtant, je me rapproche, la lumière m'engloutit, m'aveugle, j'entends des bourdonnements, comme des milliers d'insectes autour de moi. Je sens leurs picotements sur ma peau et je hurle, mais aucun son ne franchit mes lèvres, je suis terrifiée. Une angoisse surréaliste monte dans ma gorge et une main vient serrer la mienne pour me rassurer. Ce n'était qu'un cauchemar.

Je respire à nouveau, j'ai enfin ouvert les yeux et la voix douce de ma mère réconforte mes craintes. J'ignore ce qu'elle dit, mais ça n'a pas d'importance parce qu'elle est là, elle caresse mes cheveux et m'enveloppe de sa tendresse. Ce n'était plus arrivé depuis longtemps, je ne suis plus une enfant, mais en cet instant rien ne me paraît surprenant. Le songe s'éloigne, la réalité revient peu à peu et je comprends que je ne suis pas dans ma chambre.

Autour de moi, tout est blanc, mon corps est étrangement engourdi, ma bouche à un goût de médicaments et des bruits désagréables me font grimacer. J'ai envie de protester, de dire à Madly de me laisser dormir encore un peu, à Maman de continuer de me câliner, mais ma vision a retrouvé sa netteté et je frissonne à la vue des regards posés sur moi. Maman est assise à mes côtés et Stefan se trouve juste derrière, ses yeux bleus emplis d'une souffrance incompréhensible. Il y a aussi du mouvement sur ma gauche que je ne parviens pas à identifier. Étaient-ils vraiment en train de m'observer dormir ? C'est déstabilisant ! Et pourquoi ne suis-je pas à la maison ?

Une femme sur ma gauche s'agite bizarrement, à moins que je ne sois pas bien éveillée. J'entends qu'on parle de médecins, d'infirmières, et je voudrais saisir, je voudrais paniquer avec eux, mais mon corps refuse toujours de m'obéir. Ma tête est lourde, mon cou semble entravé, mes bras répondent, mais à une lenteur déstabilisante. Mon dos est endolori, j'aimerais changer de position, je suis trop fatiguée pour ça et cette agitation m'épuise déjà.

– Notre petite dormeuse est enfin parmi nous ! se moque la femme en blouse bleue.

Je ne la connais pas, mais je devine qu'il s'agit d'une infirmière. Son sourire est forcé et ses yeux bleus semblent étonnamment gênés. Je l'observe vérifier les branchements à mon bras et des chiffres sur un écran, je remarque son nom sur un badge et les tremblements de ses doigts. Rose, c'est un joli prénom, mais je déteste l'expression sur son visage, celui qui paraît dire que je suis condamnée. Qu'est-ce qui m'est arrivée ? Pourquoi Maman est-elle si silencieuse ?

– J'ai appelé le médecin, il ne devrait plus tarder, commente-t-elle sur un ton un peu trop enjoué.

– J'ai soif.

Je l'ai dit, pourtant, je croyais m'être contentée de le penser. Ma voix est si rauque que je ne la reconnais pas et ma gorge est douloureuse. J'ai besoin de réponses aux questions que je n'ose poser et je hais les mots qu'elle a choisi de prononcer, avec cette même expression bien trop joyeuse pour l'occasion :

– Je suis désolée, mademoiselle, vous n'avez pas encore l'autorisation de boire ou de manger, mais ces perfusions sont là pour vous hydrater et une sonde gastrique se charge de vous nourrir. Vous n'avez à vous soucier de rien.

Me soucier de rien ? Elle se fout de ma gueule ? Je suis branchée de partout, j'ignore pourquoi, et on voudrait que je ne m'inquiète pas ! Je panique, je suis devenue une impotente et la colère ne vient pas, mes membres refusent toujours de me répondre. Je veux quitter cet endroit !

Maman a dû percevoir mon trouble parce qu'elle est de nouveau penchée sur moi, sa main dans la mienne.

– Ça va aller, mon trésor, me rassure-t-elle.

Mais ça ne va pas. J'ai besoin d'être seule, d'ordonner mes pensées, et elle est là à scruter la moindre de mes réactions, à chuchoter avec l'infirmière. Ça me rend dingue ! Le silence se fait quand un homme grand et grisonnant s'avance vers le lit. Il porte une cravate colorée sous une blouse blanche dont les poches semblent bien trop remplies, il prend le temps de saluer Maman et de raccompagner Stefan jusqu'à la porte. Puis il s'appuie contre le matelas.

– On dirait que nous avons enfin refait surface ! ironise-t-il en vérifiant à son tour mes constantes. Mademoiselle Macklean, je suis le docteur Lawrence, comment vous sentez-vous ?

Je hoche la tête, alors que je suis incapable de lui répondre, je ne sais rien, je ne comprends rien, mais je ne veux pas qu'il le remarque. Bien sûr, il insiste :

– De quoi vous souvenez-vous ?

– Je... je suis allée à une fête.

Ma voix est toujours éraillée.

– Il s'est passé quelque chose de particulier là-bas ?

Ses mots ravivent mes pensées, je me revois danser, rire avec Mary, et puis Stefan... Stefan enlaçant Lizzie. Le souvenir est douloureux, la colère refait surface. Je hais qu'il soit là, dissimulé derrière la cloison, que lui n'ait rien et que ses beaux yeux bleus aient osé m'observer avec pitié. Est-ce qu'il m'a fait ça ? Est-ce que je dois lui reprocher ma situation ? Je ne sais pas, je sais juste que je lui en veux horriblement, que je souhaiterais lui hurler de s'en aller. Je le lui dirais quand il reviendra.

– C'était sympa.

Faire comme si de rien n'était, c'est bien plus facile.

– C'est un bon point. Et... vous vous souvenez être rentrée ?

– La limousine aussi était sympa.

Il sourit, mais son sourire semble plus embarrassé qu'autre chose. Je suppose qu'il aurait préféré que je m'en rappelle seule pour lui éviter d'avoir à le faire.

– Il y a eu un accident.

On ne peut pas dire qu'il prenne de grands risques. Accident, c'est un mot généraliste. Ça pourrait signifier tant de choses. J'aurais pu boire la tasse en voulant tenter un bain de minuit, ou bien on m'aurait poussée dans les escaliers, on aurait pu aussi me saouler jusqu'à perdre connaissance... L'impensable aurait pu m'arriver, et pourtant, ça me revient. Le crissement des pneus sur l'asphalte, l'impact, la douleur, le sang dans ma bouche... et puis plus rien.

– J'ai volé.

Je l'ai à peine murmuré, mais il répond :

– C'est un peu ça. Le choc a été violent. Ça vous dit quelque chose ?

– J'ai perdu connaissance ?

Une fois de plus, je crois qu'il aurait voulu que je comprenne seule, mais je suis toujours perdue et lui souffle bruyamment avant de préciser :

– Une voiture a percuté la limousine. Votre moelle épinière a été endommagée, nous avons dû opérer pour réduire la compression dorso-lombaire, mais la lésion demeure.

Je sais qu'il parle de mon dos, de ma colonne vertébrale, je sais que c'est le genre de chose qu'il vaut mieux ne pas esquinter, mais il est loin d'être clair et ça m'agace. Il le fait exprès et maintenant, je m'attends au pire !

– Qu'est-ce que vous êtes en train de me dire ?

– Il est encore trop tôt pour se prononcer, mais il est fort probable que... que vous perdiez en mobilité.

C'était presque trop limpide cette fois et ça fait tellement mal. Le monde vient de s'écrouler, je suffoque sous les gravats, je suis trop à l'étroit dans ce corps qui refuse toujours de s'agiter. Il le faut, j'ai besoin de sortir d'ici, j'ai besoin du soleil et de la brise sur ma peau. Je veux courir loin d'ici, je veux qu'on me dise qu'il ne s'agit que d'un mauvais rêve. Je ferme les yeux, attends le bruit désagréable, mais tellement familier du réveil. Il ne vient pas, je suis toujours là, toujours immobile. Je vais crier.

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