Alive

By weird___

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Angie sort de l'hôpital après six longs mois. Elle est la seule survivante à l'accident de voiture de sa fami... More

UN
DEUX
TROIS
QUATRE
CINQ
SIX
SEPT
HUIT
NEUF
DIX
ONZE
DOUZE
TREIZE
QUATORZE
QUINZE
Le retour ! Récapitulatif
SEIZE
DIX-SEPT
DIX-HUIT
DIX-NEUF
VINGT
VINGT-ET-UN
VINGT-DEUX
VINGT-TROIS
VINGT-QUATRE
VINGT-CINQ
VINGT-SIX
VINGT-HUIT
VINGT-NEUF
TRENTE
TRENTE-ET-UN
TRENTE-DEUX
TRENTE-TROIS
TRENTE-QUATRE
TRENTE-CINQ
TRENTE-SIX
TRENTE-SEPT
Épilogue

VINGT-SEPT

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By weird___

Un. Deux. Trois. Respire.

Quatre. Cinq. Respire.

Mon souffle est rauque, mon cœur affolé, mon cerveau en ébullition. Je ne fais qu'entrer dans le lycée, mais une angoisse rare me submerge. Je les ai vus hier, je ne devrais pas être dans cet état. Et pourtant, j'ai l'impression de devoir leur faire face après une éternité. Je pense qu'au fond de moi, j'ai conscience de ne pas être la même personne. Hier encore, je m'efforçais de me prétendre être Malia, je m'accrochais pour ne pas tomber. Mais je suis tombée dans les bras d'April. Et je me suis relevée en tant qu'Angie. Alors aujourd'hui, en face d'eux, je ne ferai plus autant semblant.

En approchant de l'habituel endroit où ils sont réunis, je suis surprise de ne voir que Jason et Connor. Je ralentis la cadence, fronçant les sourcils et cherchant les autres du regard. Rapidement, les deux garçons me remarquent, et me fixent jusqu'à ce que j'arrive à leur niveau.

— Quand on parle du loup, cingle Connor.

— Où sont les autres ? demandé-je en ignorant sa remarque.

— À l'intérieur, répond Jason. Ils voulaient aller se poser au chaud, mais on est restés dehors pour discuter.

— Discuter de moi, du coup ? soufflé-je en adressant un regard irrité à Connor.

— Oui, dit le brun. Assieds toi, Angie.

Mon sang se glace et un frisson longe mon échine alors que je glisse sur l'herbe à leurs côtés. Entendre mon nom de leur bouche ne cessera jamais de me tétaniser.

— Comment vous avez su que l'autre savait ? osé-je les interroger à mi-voix.

— Le groupe se demandait quand tu allais arriver et a parlé un peu de toi tout à l'heure, explique Connor. Quand j'ai vu la tête de Jason, j'ai tout de suite compris.

— Tu as vraiment réussi à déchiffrer le visage de Jason ?

Connor laisse échapper un petit rire face à ma remarque sincèrement surprise, et je penche la tête en le voyant si détendu. Peut-être que parler de la situation avec son ami l'a calmé, et qu'il ne compte plus m'agiter un compte à rebours sous les yeux.

Après une moue froissée, Jason se racle la gorge et me lance un regard lourd de sens.

— Je lui ai un peu mieux expliqué ce qui se passait, déclare-t-il. Et on comprend tous les deux que c'est compliqué pour toi. Mais on est aussi d'accord qu'il faut que tu le dises aux autres le plus vite possible.

Je soupire, enroulant des brins d'herbe autour de mes doigts tremblotants.

— Je sais, finis-je par dire.

Je relève la tête, et m'adresse à Jason, la gorge nouée.

— April est chez moi.

Face à mon annonce, son visage s'illumine d'une émotion inexplicable, et il entrouvre les lèvres d'un air choqué. Je le vois s'apprêter à parler, puis se raviser. Intérieurement, je souris et songe à la réaction d'April quand elle le reverra.

— Elle est arrivée hier, et je lui ai tout dit, poursuis-je d'un ton le plus calme possible. Ça m'a vraiment ouvert les yeux. Je ne peux pas y échapper, et je vais devoir me préparer à crever l'abcès. Mais j'attends le bon moment, je ne veux pas qu'il l'apprennent n'importe comment...

— Ils vont souffrir et t'en vouloir, de toute façon, lance Connor d'un ton désagréable.

— Oui, j'ai compris, merci, répliqué-je, agacée. C'est exactement pour ça que j'ai peur. Je me suis foutue dans une merde pas possible, et dès que je raconte l'histoire, j'ai l'impression que je vais mourir. Et maintenant, je ne pense qu'à leur réaction et à quel point ils vont me détester. Donc je n'ai pas besoin de tes leçons à deux balles, Connor. Conseille moi au lieu de me faire culpabiliser.

Les mots m'écorchent la gorge. J'ai été brutale, plus que je ne voulais l'être, mais je ne peux plus supporter d'autres reproches. Je déglutis douloureusement sans briser le contact visuel avec ses iris brillants. Je vois son expression changée, et montrer qu'il est heurté. C'est la première fois qu'il détourne les yeux, et que je le sens mal à l'aise.

— Oui, bon, marmonne-t-il. Désolé.

Je hausse les sourcils, mais ne montre pas trop ma surprise face à ses excuses.

— Mais comme je l'ai dit, n'est-ce pas Connor, s'empresse de dire Jason, ils vont t'en vouloir mais finiront par comprendre. (il tourne la tête vers moi) N'écoute pas cet abruti. C'est vrai que ça va être dur, mais ils ne vont pas en mourir. Tu vois, on continue de te parler, nous. Si on a réussi à accepter, ils y arriveront aussi.

— C'est plus compliqué que ça. Vous ne le savez que parce que vous l'avez deviné. Eux...

— Justement. Mieux vaut qu'ils l'apprennent par toi que par les infos, non ?

J'acquiesce lentement, le cœur battant. Puis, j'entends Connor soupirer, les bras croisés.

— Tu devrais en parler à Tyler avant.

Je lui lance un regard médusé, prenant son conseil sincère droit dans le cœur. Il sait que c'est pour Tyler que je m'inquiète le plus.

— Oui, sûrement, dis-je d'une voix à peine perceptible.

— Et pour les autres, il faudra attendre un moment où on sera tous réunis pendant assez longtemps et de bonne humeur.

— C'est assez fréquent, ça ne devrait pas être compliqué, ajoute Connor.

Je ne capte pas son regard, perdu dans la contemplation de la verdure et visiblement dans une réflexion indéchiffrable.

— Je ne sais même pas comment en parler, marmonné-je.

— Comme tu l'as fait avec April hier, répond doucement Jason. Je sais que ce n'est pas pareil, mais trouve les mots les plus justes, et sois sincère. Le mensonge va être dur à encaisser, mais dès qu'ils comprendront qui tu es et qu'ils verront que tu ne voulais pas leur faire du mal, ça passera. Ça pourrait prendre des jours, des semaines, mais ça passera.

— Tu as beaucoup d'espoir...

— Non, intervient alors Connor. Il a raison. N'aies pas aussi peur.

Je capte le regard du beau blond pendant un court instant, et y lit une véritable sincérité. Il est parfois brutal, mais au fond, il veut simplement prendre soin de ses amis. Et me rassurer, ne serait-ce qu'un tout petit peu.

Le silence s'installe autour de nous, me plongeant dans une torpeur redoutable. Je sens mon cœur s'emballer un peu plus, et frémis malgré moi. Évoquer mon secret avec une telle aisance me déboussole tant que je ne sais même pas comment me sentir. Je me projette déjà dans sa révélation, ce que je n'aurais jamais imaginé il y a à peine quelques jours. Jusqu'au plus profond de moi, j'ai accepté mon sort. Il a suffi que je voie April pour comprendre que mes mensonges devaient cesser, et que je devais faire face à la réalité. Je n'essaie même plus d'éviter la fatalité, je la prends de plein fouet. Mais je n'ai pas mal. Me rendre compte que je suis prête à souffrir pour aller un peu mieux après m'emplit d'une lumière que je pensais ne jamais voir réapparaître en moi. J'ai de l'espoir, et même si ce n'est qu'une toute petite once, elle me suffit pour croire que les choses s'arrangeront. Que Jason et Connor aient raison ou non importe peu. Car ils m'apportent simplement un peu plus de force pour ce que je suis déjà décidée à faire. Même s'ils m'en veulent toutes leur vie, j'aurais été honnête. Et ça fera mal, infiniment mal. Mais je serai Angie.

*  *  *

Quand je pénètre dans la salle de classe, je n'arrive pas à éviter le regard de Hailey et Tyler. La première m'adresse un sourire que je lui rends timidement avant de me diriger à la chaise derrière elle. Tyler, lui, détourne les yeux à peine ils entrent en contact avec les miens. Je réprime un soupir face à son attitude. Je ne lui en veux pas de se comporter ainsi, je le comprends même totalement, mais ça rajoute un poids sur ma poitrine dont je n'ai vraiment pas besoin. Comment est-ce que je suis censée lui avouer la vérité s'il m'en veut déjà pour quelque chose d'autre ?

À cet instant, je sens mes lèvres me picoter, brûlées par le souvenir du baiser que j'ai failli échanger avec lui. J'ai frôlé sa bouche, senti son souffle contre moi, j'ai caressé sa peau, j'étais prête à l'embrasser et à m'abandonner à mes plus bas instincts.

          Tu vas me briser le cœur, Malia ?

Je me rappellerai toujours de ses mots, de l'impact qu'ils ont eu, de la façon dont ils résonné en moi comme un coup de poignard. J'ai senti mon propre cœur se fêler un peu plus, dans une douleur qui a irradié tout mon corps. Il me fait mal sans s'en rendre compte, et je fais pareil. Notre relation, qui n'en est même pas vraiment une, n'est qu'un enchevêtrement de douleur pure, une masse informe pleine de mensonges, de secrets et de sentiments vains. Plus nous nous attachons l'un à l'autre, plus nous risquons de souffrir. Et je sais déjà que je ne me remettrai jamais vraiment de lui. Il a ouvert la faille en moi et elle ne se refermera plus jamais. Quant à lui, je ne sais pas ce qu'il a dans la tête, ni dans le cœur ; mais j'ai conscience que je me suis imposée à lui d'une manière tout aussi destructrice.

Je dois lui dire, à lui avant les autres, le plus vite possible. Une fois que ce sera fait, je n'aurai plus peur. Parce que rien ne pourra me faire plus de mal que le regard qu'il me lancera quand il apprendra la vérité.

          Tu m'as brisé le cœur, Angie.

Oui, je l'imagine déjà.

— Hé, Malia ?

Je sursaute et lève la tête vers une Hailey retournée et penchée vers moi.

— Quoi ? soufflé-je à mi-voix alors que notre professeur entre dans la pièce.

— Tu peux m'expliquer pourquoi vous ne vous parlez plus, avec Tyler ?

Prise de court par sa question, je ne réagis pas tout de suite. Évidemment que ça a dû se remarquer, qu'on ne s'adressait même plus un regard depuis hier.

— Euh... Je te l'écrirai pendant le cours, bafouillé-je finalement.

Elle acquiesce vivement, les yeux pétillants. Je me sens rougir malgré moi à l'idée de parler de mon rapprochement avec celui dont elle était presque amoureuse, mais me force à ne rien laisser paraître. Je n'arrive toujours pas à savoir si son détachement est sincère ou une façade. J'ai quand même envie de croire au mieux, donc je vais prétendre à mon tour que tout est normal.

Alors, je m'exécute quelques minutes plus tard. À moitié à l'écoute du professeur, je pose quelques mots sur les raisons du froid glacial entre Tyler et moi. Je résume le tout à un rendez-vous et un baiser que j'ai coupé avant qu'il n'aboutisse et qui a visiblement installé une tension certaine.

Quand elle le lit attentivement, je la vois écarquiller les yeux, et j'y découvre, mêlée discrètement à la surprise et l'amusement, une pincée de mélancolie, peut-être de jalousie. Je peux la comprendre. Elle a fait preuve d'une incroyable maturité en mettant fin à ses espoirs vains. Mais nous avions décidé que je ne lui cacherai plus rien. Enfin...

— Pourquoi tu l'as repoussé ? fait-elle soudainement en se retournant vers moi, sur un ton bien trop peu discret.

Je la regarde avec de gros yeux, priant intérieurement pour que personne n'ait entendu et ne voie à quel point je suis rouge. Heureusement, il semblerait que ses mots n'étaient pas très clairs, puisque seulement quelques élèves proches de nous réagissent.

— J'aimerais un peu de silence, si cela convient à tout le monde, résonne alors la voix du professeur avec sévérité.

Hailey m'accorde un bref coup d'oeil paniqué avant de se remettre droite comme un piquet sur sa chaise, faisant mine de rien. J'en pouffe presque, mais me retiens pour ne pas me faire encore dévisagée, et pose ma tête sur ma table pour la refroidir. Malheureusement, elle se tourne inconsciemment vers la table de Tyler, et mes yeux ne résistent pas à la tentation. En me rendant compte que ses yeux sont déjà fermement accrochés à mon visage, mon cœur fait un bond dans ma poitrine et je me raidis. J'espère qu'il n'a pas entendu Hailey...

Je soutiens le regard du beau brun assis deux tables à côté de moi, me perdant malgré moi dans toutes les pensées qui m'envahissent d'un coup. Je suis surprise qu'il ne brise pas le contact visuel, mais en suis aussi étrangement soulagée. Il peut me regarder dans les yeux. Et même si les siens expriment un sentiment reflétant une insoutenable peine, j'y puise une sorte d'énergie que je ne pourrais expliquer. J'aime le voir, j'aime qu'il me regarde, autant que j'aime l'avoir près de moi. J'ai presque besoin de sentir qu'il est là, même si c'est pour me haïr. Je déteste ça.

Je suis celle qui brise donc le contact, la tête trop embrumée par l'effet qu'il a sur moi. Je déteste vraiment ça.

Du coin de l'oeil, je le vois se retourner vers le cours, et m'autorise donc à l'observer à la dérobée. Puis, le cœur un peu serré, je me penche sur mon cahier pour griffonner sur un bout de papier que j'arrache et réduis en petite boule. Et sans trop réfléchir, je décide de la décocher dans le cou de Tyler. Mais à l'instant où il se penche pour l'attraper, l'air perplexe, je regrette mon idée. En lisant ces quelques mots, il en reconnaît forcément l'auteure. « Tu viens d'où ? ». Ces exacts mots qu'il m'avait lui même balancés dessus lors de notre première rencontre ; une approche complètement ratée. Quelle idée stupide de vouloir revenir à lui avec une telle tactique.

Mais alors que je me maudis intérieurement, les mains crispées sur mes genoux tremblants, je vois l'esquisse d'un sourire se dessiner sur les lèvres de Tyler. Il ne me regarde pas, mais il ne jette pas non plus le papier. Il se contente de le poser sur le coin de sa table, une expression indéchiffrable sur le visage. Mon cœur se réchauffe instantanément, comme si une vague de soulagement me prenait, et je n'arrive pas à la repousser. Il a trop d'impact sur mes émotions. Je déteste ça, aussi.

Le reste du cours et de la journée, se déroule comme si j'étais exclue du temps. Je suis avec le groupe mais à moitié présente, passant intérieurement en revue toutes les façons dont je pourrais leur expliquer mon histoire. Mais aucune n'évite qu'ils m'en veuillent. De toute façon, Connor a raison, je vais devoir le prendre en pleine face. Reste à savoir quand.

J'ai besoin d'encore un peu de temps. Juste quelques instants, quelques jours. Je veux encore profiter un petit peu, de leurs regards innocents, de leurs sourires, de leurs voix enjouées et de leur présence. Je veux profiter d'eux, une dernière fois avant qu'ils ne m'échappent.

Et merde. Je me suis vraiment attachée...

*  *  *

J'entends Jason prendre une grande inspiration derrière moi.

— Ça va ? m'enquiers-je alors que l'ascenseur s'ouvre sur l'étage de mon appartement.

— Oui, oui. Ça fait juste bizarre.

Je reste muette un instant, analysant son attitude. Il est visiblement nerveux, et impatient. Je n'aurais jamais cru voir cette expression sur lui, le garçon si calme et impassible.

C'est lui qui a demandé à m'accompagner chez moi, pour retrouver April. Il ne pouvait pas attendre plus longtemps, et préfère le faire le plus vite possible. J'ai tout de suite accepté. Je sais que mon amie veut aussi le voir. Et je dois avouer que je suis moi même curieuse de voir où cela va mener.

— C'est ici, indiqué-je en me plantant devant une porte. Tu peux encore changer d'avis si tu en as envie.

Je lui coule un dernier regard insistant, et il secoue vivement la tête. Alors, un léger sourire irrépressible sur le visage, j'entre.

Je referme la porte derrière moi en silence, puis me racle la gorge.

— April ? Je suis rentrée, tonné-je.

— Oh, enfin ! retentit alors de l'autre bout de l'appartement.

Je sens tout de suite Jason se raidir et faire un pas en avant pour arriver à mon niveau. Puis, la voix d'April se rapproche.

— Tu sais, je me demande si mon excuse de maladie va valoir pour...

Elle s'arrête à l'instant même où elle entre dans le salon et aperçoit Jason. Sa bouche s'ouvre en grand, ses jambes flageolent, et j'entends un hoquet de surprise s'étouffer dans sa gorge.

— Alors là... fait-elle d'une voix faible.

— Salut, April.

La voix de Jason me paraît différente, plus hésitante, même s'il fait tout pour ne rien laisser paraître.

— Tu ne pouvais pas me prévenir ?! s'exclame April en se tournant vers moi sans lui répondre.

— Désolée.

Elle doit entendre que je suis à moitié moqueuse, car elle me lance un regard lourd de sens et claque de la langue. Puis, sans un mot, elle s'avance vers nous et regarde enfin Jason, pour de vrai. Elle lève la tête vers lui, qui la domine de presque une tête, et je la vois lever la main pour poser ses doigts sur le torse de celui qu'elle retrouve après tout ce temps. À ce contact, Jason se paralyse, et ses yeux s'animent d'encore plus de trouble.

Je suis obligée de m'écarter un peu, me sentant tout de suite de trop dans ces retrouvailles qui expriment bien plus d'émotion que je ne l'aurais pensé. Les yeux d'April brillent comme rarement, ses mains tremblotent. Le visage de Jason s'illumine d'une expression inédite et difficilement camouflée. Ils se sont enfermés dans une bulle que je suis incapable d'atteindre, plongés dans leurs souvenirs et dans cette confrontation qu'ils pensaient sûrement ne jamais avoir. Le mois qu'ils ont passé ensemble les a visiblement bouleversés.

Les voir face à face provoque en moi une avalanche d'émotions perturbantes et contradictoires. Je regarde ma meilleure amie de mon ancienne vie et un ami de ma nouvelle. J'observe la collision de mes deux mondes, s'effondrant dans un silence absolu. J'assiste à la fusion définitive entre Angie et Malia. Et je n'ai même pas envie de l'éviter.

— Angie, on va s'absenter un peu, d'accord ? me glisse April d'une voix tremblante.

Je ne réprime pas un sourire amusé, et hoche la tête en me reculant pour leur ouvrir le chemin. Quelques secondes plus tard, mon amie et Jason ont disparu. Et je jugerai vu avoir Jason prendre sa main quand la porte se refermait.

Qui aurait cru que parmi tous les lycéens de Miami, je me retrouverais dans le groupe de l'amour perdu d'April ?

Je me retrouve seule dans mon appartement, abandonnée à ma réalité. Les heures passent et je ne fais pas grand chose, mais j'arrive à éviter la torpeur qui me faisait autrefois fumer une cigarette. J'alterne entre mon canapé et mon balcon, mes pensées valsant sur la mer et autour de la télévision.

Étrangement, je ne ressens pas la solitude comme un poids, aujourd'hui. C'est la première fois depuis que je suis arrivée ici que mes pensées ne me détruisent pas. Peut-être parce que j'ai déjà décidé de comment se terminerait toute cette histoire. Il n'y a plus de suspense, plus de remise en question. J'ai pleine conscience de mon identité et de mon mensonge, de mes erreurs. J'ai peur, certes, et j'ai horriblement mal à l'idée de ma confrontation. Mais pour la première fois depuis longtemps, je peux m'accrocher à la certitude que je fais ce qu'il faut faire. Je pensais que faire face à la fatalité me briserait, mais je suis... sereine.

Et alors que je puise dans cette sérénité longuement attendue, la sonnerie de mon téléphone retentit et déchire la douce atmosphère dans laquelle je m'étais plongée. La réception d'un message m'oblige donc à revenir à la réalité, et je baisse les yeux vers mon portable en fermant ma baie vitrée.

« Viens chez moi, je veux te parler. »

Mon corps entier frémit à la lecture des mots de Tyler. Je m'attendais à tout sauf à une telle requête. Je ne lui ai pas adressé la parole depuis notre baiser avorté, et je ne pensais pas qu'il serait le premier à venir à moi.

Alors, la pire hypothèse surgit en moi et mon cœur rate un battement. Et s'il avait appris la vérité ? Et si Connor ou Jason lui avait dit, si un journaliste l'avait croisé ?

À cette idée, je sens ma gorge se nouer sous la pression. Je tremble malgré moi et m'efforce de tenir entre mes mains mon téléphone pour tapoter une faible réponse :

« Pourquoi ? »

Son message arrive à peine deux secondes plus tard :

« Je devais bien répondre à ton petit mot. »

Je soupire avec un léger soulagement, mais toujours tendue. Il n'a pas l'air d'être au courant, mais on ne sait jamais.

Et à ce même instant, je me déteste de redouter autant ce moment. Je devrais plutôt me faire à l'idée qu'il l'apprendra, au lieu d'en être terrifiée.

Je jette un coup d'oeil au ciel déjà noir et étoilé dehors, et un frisson me parcourt en m'imaginant dehors.

« Le soir, comme ça ? » l'interrogé-je.

« Je te préfère la nuit. »

Je sens ma poitrine me brûler et mon visage suivre le mouvement. Je serre les dents, frétillant malgré moi. Alors qu'il est énervé contre moi, il persiste à me dire des choses pareilles. C'est comme s'il était en face de moi pour me voir m'empourprer comme une idiote.

Je n'ose pas répondre, ni lui demander plus de précisions. Pendant de longues minutes, je tourne en rond dans mon appartement, perdue dans un dilemme qui n'en est pas vraiment un. J'ai envie de le voir, même si le confronter me terrorise. Et... moi aussi, je le préfère la nuit. Mais je ne peux m'empêcher de me dire que justement, dans la nuit, mes secrets me paraissent briller, et mes barrières céder. Je sais que quand je croise son regard alors que nous ne sommes entourés que d'un néant silencieux, mon cœur s'exprime de lui même, et je m'abandonne à l'amour et à son pouvoir destructeur.

Mais je l'aime, ce pouvoir destructeur. C'est pour cette raison que, sans avoir vraiment réfléchi, j'ai pris ma décision.

Et, pour cette même raison, que je me retrouve face à l'appartement de Tyler, plongée dans le noir et dans le silence.

À la seconde où il ouvre la porte sur sa silhouette si attractive, je prends conscience que j'ai abandonné. La lumière éclaire son visage irrésistible, et mon cœur s'arrête, ma tête implose.

Mais c'est véritablement au moment où il ouvre la bouche que je sens mon âme flancher. Il n'a qu'à prononcer quelques mots, de sa voix rauque et pleine d'émotion, pour que je sache qu'une fois que j'aurais pénétré cet appartement, j'aurais scellé mon sort. Notre sort.

— Je savais que tu allais venir. Entre. Ce soir, on se dit tout.

_ _ _ _ _

J'espère que ce chapitre vous a plu !

L'étau se resserre, la fin approche pour Angie ;) Et avec Tyler, les choses se compliquent... ou pas ? En tout cas, vous allez être servis ;)

À bientôôôt !

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