Ombre et poussière

By LiseAntunesSimoes

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FANFICTION GLADIATOR / Maximus, sur le point de s'enfuir à Ostie pour rallier l'armée et marcher contre l'emp... More

Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 11

Chapitre 10

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By LiseAntunesSimoes

On fit incinérer Commode au cours d'une cérémonie digne de son rang, mais intime, et sans le faste ni les longs jours de deuils habituellement réservés aux empereurs. Maximus, Lucilla et les sénateurs étaient présents pour saluer sans grande émotion celui que désormais on appelait seulement « le fils de Marc-Aurèle ». Seul le jeune Lucius avait sincèrement pleuré son oncle.

Les semaines qui suivirent ce renversement du pouvoir furent un épouvantable casse-tête pour les sénateurs, qui devait élire et nommer les nouveaux responsables des provinces, et recréer de toutes pièces la structure hiérarchique et décisionnelle qui aboutissait jusqu'au Sénat.

Gracchus s'en donnait à cœur joie, ne comptant pas ses heures ni sa peine, suivi par Gaius et une dizaine de sénateurs motivés, prêts à réinventer une république idéale. Les choses n'étaient pas si simples, mais chaque problème qui se présentait donnait lieu à d'interminables heures de débat et finissait, bon gré, mal gré, par trouver une solution.

Maximus, de son côté, avait renvoyé son armée à Ostie. Il n'avait gardé qu'un millier d'hommes dans la ville et autour du Sénat, pour assurer la sécurité des sénateurs – cette période de transition étant propice aux attentats en tous genres – et transmettre les ordres. Lui, officiellement réintégré dans ses fonctions de général, restait au palais pour régler les ennuis au fur et à mesure qu'ils se présentaient. Le reste du temps, il était libre d'organiser son propre départ, qu'il espérait voir arriver le plus vite possible.

Il avait fait libérer ses compagnons d'arène des prisons du Colisée, avait fait révoquer leur statut d'esclave et leur avait fait verser une récompense en or pour leur permettre de recommencer leur vie confortablement, où ils le voulaient. Il avait fait inhumer Proximo et le grand Hagen avec les honneurs qu'on réservait aux soldats morts en héros, et à cette occasion il avait pu revoir Juba. Le Numidien se préparait lui aussi à repartir vers le sud, dans son pays, et les derniers jours que les deux hommes passèrent ensemble furent chargés d'émotion et d'amitié. Puis, un matin, Juba embarqua sur un navire en partance pour Carthage et ce fut le temps des adieux.

_ Ta femme et ton fils vont t'attendre encore un peu, mon ami, avait dit le grand Numidien. D'ici là, sois heureux et rends-les fiers de toi.

Maximus s'y employait sans le vouloir. Car si ses journées étaient bien remplies par ses devoirs envers la nouvelle république, ses nuits n'appartenaient qu'à lui, et il ne les aurait pas échangées pour tout l'or du monde.

Le jour où Indira était venue le soigner, il s'était abandonné avec délices à ses massages et ses caresses, laissant son corps endolori se détendre et goûter un plaisir bien mérité. Elle avait passé la nuit avec lui. Elle revint la nuit suivante, et la nuit d'après, et finalement cela devint une habitude. Dans la journée, elle ignorait superbement Maximus, se contentant de tenir sa place invisible d'esclave, dans l'ombre de Lucilla. De temps à autres, le général parvenait à lui arracher un regard furtif, un vague sourire, mais la plupart du temps il la regarder aller et s'activer auprès de sa maîtresse sans mot dire.

Le soir, en revanche, alors qu'il renvoyait ses propres esclaves, il attendait avec délice le moment où elle paraîtrait dans ses appartements, complètement changée. Souvent, elle nouait de nouveau ses cheveux en une longue tresse qui tombait sur son épaule, et elle relâchait un peu les rubans de sa stola pour laisser apparaître ses épaules et la naissance de ses seins. Parfois, elle se parfumait, ou mieux : elle apportait des onguents et des huiles exquises dont elle enduisait le corps du général en de longs massages terriblement sensuels dont il ne se lassait pas.

Ils ne faisaient pas toujours l'amour. Parfois, épuisé par ses journées, parfaitement détendu par les irrésistibles caresses de la jeune femme, Maximus s'endormait tout contre elle. À d'autres moments, il la prenait contre un mur ou sur la terrasse, sous le vent tiède de la nuit, ou s'enroulait avec elle dans les draps fins de sa luxueuse couche.

En revanche, chaque fois qu'il s'éveillait le matin, c'était pour trouver le lit vide. La jeune femme disparaissait avant l'aube et il ne la retrouvait que plus tard, dans cette ombre d'elle-même qu'elle était lorsqu'elle servait Lucilla. S'il avait le malheur de s'approcher d'elle pendant la journée ou d'essayer de lui voler un baiser au détour d'un couloir, Indira le remettait sèchement à sa place. Il s'en amusait presque. Elle lui faisait penser à cette jeune chatte qui rôdait autour de la maison, à Tiujillo. Indifférente et sauvage, elle gardait ses distances, jusqu'à ce qu'au prix d'une infinie patience elle se laisse approcher un peu. Elle se couchait alors sur le flanc, dans la poussière, et se mettait à ronronner sous les caresses. Puis, à l'instant précis où Maximus pensait l'avoir enfin apprivoisée, elle lui décochait un vilain coup de griffe et s'enfuyait.

Le général en avait pris son parti. Pour profiter des nuits savoureuses qu'il passait avec la belle esclave, il acceptait sans broncher toutes ses conditions.

-----

Peu à peu, ce qui avait été l'empire de Rome prit une nouvelle forme. On vit apparaître au Sénat des sénateurs nouvellement élus, et on redressa certaines des situations dans la capitale qui laissaient à désirer depuis longtemps. On lança des travaux pour assainir certains quartiers, et lorsque Lucilla révéla – au grand scandale des sénateurs ! - que son frère avait vendu une bonne partie des réserves de grain pour payer les jeux qu'il avait organisés, on durcit le prélèvement des récoltes dans les campagnes pour renflouer les greniers de la ville. Il fallut lever de nouvelles taxes, ce que la population n'apprécia guère, mais par ailleurs les commerçants, enfin libérés de la priorité et des prix bloqués que le palais impérial leur imposait depuis toujours, se frottèrent les mains : leurs affaires allaient pouvoir reprendre.

Maximus aussi avait bien réorganisé son armée. Il avait renvoyé les hommes de Commode pour remettre à leur place ses anciens lieutenants de confiance. Avec Quintus, malgré la bonne volonté que ce dernier avait montré, il n'y avait malheureusement pas grand-chose à faire, et l'ancien commandant de la garde prétorienne le savait fort bien : il donna lui-même sa démission pour se retirer sur ses terres. Les prétoriens furent réaffectés à différents corps d'armée de sorte que la garde fut totalement dissoute. Et Maximus, qui songeait toujours à sa propre retraite, prit avec lui Claudius pour le préparer à lui succéder, avec Dias comme second.

Parallèlement, il lui fallut gérer Lucilla. Il était heureux de la voir chaque jour, car c'était toujours pour lui l'occasion de revoir Indira, mais il n'oubliait pas le léger trouble qu'avait amené entre eux le baiser qu'ils avaient échangé le soir où le complot s'était enclenché. Lucilla, elle, n'avait rien oublié. Très occupée elle aussi par son propre départ du palais, elle restait malgré tout le plus souvent possible auprès de Maximus, amenant toujours son fils avec elle. Lucius était un enfant vif, intelligent et affectueux, qui savait apprivoiser n'importe qui, et il était peut-être le meilleur atout de sa mère, d'autant que Maximus était son héros et qu'il lui vouait une admiration sans borne. En retour, le général, lorsqu'il avait un moment, se faisait un plaisir de jouer avec l'enfant ou de lui raconter certaines de ses plus belles batailles, au front ou dans l'arène.

La confrontation n'allait pas tarder et Maximus en était conscient. Il ne fut donc pas surpris lorsque Lucilla, un après-midi qu'ils se tenaient sur une des terrasses donnant sur les jardins, vint s'asseoir à ses côtés.

_ On dit que tu es toujours décidé à rentrer chez toi, en Espagne ? demanda-t-elle.

_ Toujours.

_ Tu n'as pas envie de rester à Rome ? Tu pourrais être riche, pourtant, et devenir un homme important...

_ La richesse ne m'intéresse pas. Je veux simplement rentrer chez moi, là où je suis né, là où sont mes ancêtres et ma famille.

_ Que vas-tu y faire ?

_ Faire pousser du blé, récolter le fruit de mes vignes.

_ Mais si ta maison est en ruine, est-ce que tout ça en vaut vraiment la peine ? Tant d'efforts alors que tu pourrais recommencer ici...

Maximus eut un sourire.

_ Ce qui est en ruine peut toujours se reconstruire. Il suffit de le vouloir, répondit-il simplement.

Lucilla resta silencieuse un moment. Maximus, lui, coula un regard en direction d'Indira, qui venait de passer derrière lui. Elle se dirigeait vers Lucius, occupé un peu plus loin avec un jeu d'osselets qu'il manipulait d'un air très concentré, visiblement perdu dans des calculs compliqués. La jeune esclave s'agenouilla près de l'enfant et lui pointa quelque chose, lui donnant vraisemblablement des conseils.

_ As-tu songé à te remarier ? demanda soudain Lucilla, ramenant à elle l'attention du général.

Il sourit, un peu mal à l'aise.

_ J'y ai songé, oui. Mais je ne suis pas pressé.

_ Si tu restais à Rome, tu pourrais faire un bon mariage.

Il leva les yeux vers elle et Lucilla soutint son regard sans fléchir. Elle savait qu'elle n'avait pas besoin de déguiser son discours, il avait déjà compris.

_ Tu serais un bon père pour Lucius. Tu vois bien comme il t'aime déjà, dit-elle simplement. Et moi... moi je pourrais être une bonne épouse, ajouta-t-elle, la voix légèrement tremblante.

Maximus tourna de nouveau la tête en direction d'Indira. La jeune femme, inconsciente de ce qui était en train de se jouer entre sa maîtresse et l'homme de ses nuits, continuait à discuter avec Lucius.

Lucilla avait suivi son regard.

_ Oui, tu serais un bon père pour lui... répéta-t-elle doucement, croyant que Maximus regardait son fils.

Ce dernier poussa un soupir.

_ Je suis désolé, Lucilla. Je n'ai pas l'intention de rester à Rome.

_ Et si je te suivais ? insista-t-elle. Et si je partais avec toi en Espagne ?

Mais le regard de Maximus répondait pour lui et le ton plein d'espoir de la jeune femme mourut dans sa gorge alors qu'elle finissait sa phrase.

_ Non, Lucilla, ce n'est pas possible. Pardonne-moi si je t'ai fait espérer des choses que je ne peux pas t'offrir.

-----

En digne héritière de Marc-Aurèle, habituée à porter un masque de convenances selon les besoins, Lucilla avait accepté avec beaucoup d'élégance le refus de Maximus. Mais leurs relations, dans les jours qui suivirent, furent d'autant plus tendues que le général annonça finalement la date de son départ.

Cela se passa lors de la réunion quotidienne au Sénat à laquelle Maximus et Lucilla assistaient toujours. Bien que la fille de Marc-Aurèle ne soit plus directement concernée par la politique, elle avait été un des plus proches conseillers de son frère et elle possédait des informations vitales pour la réorganisation de la ville. On l'invitait donc toujours, autant par courtoisie que par véritable besoin.

Ce jour-là, on débattit justement de la réorganisation de l'armée. Il s'agissait d'envoyer plusieurs corps d'armée sur différentes frontières de l'empire afin de renforcer les effectifs, car les barbares de tous horizons, profitant de l'instabilité du nouveau gouvernement de Rome, cherchaient à reprendre le terrain perdu.

_ Le général Maximus pourrait emmener ses hommes sur le front germain, fit un des sénateurs. Ce sont nos victoires les plus récentes, celles que nous sommes le plus susceptibles de perdre si nous n'y prenons pas garde.

_ Non, Claudius ira à ma place, répondit Maximus tout net. En ce qui me concerne, je quitte l'armée.

Il y eut dans l'assemblée un vent de protestation.

_ Je vous avais prévenu, lorsque j'ai renversé Commode, que mon but était de mettre Rome entre les mains du Sénat. C'est chose faite : mon devoir est accompli, je m'en vais. C'est aussi simple que ça.

_ Quand comptes-tu partir ? demanda Gracchus.

_ Dans une semaine. Mes hommes sont à vos ordres et je leur fais pleinement confiance. Vous n'avez plus besoin de moi.

Cette fois, il n'y avait plus le regard doux de Marc-Aurèle pour empêcher Maximus de rentrer chez lui. Il mûrissait cette décision depuis que Commode était mort et il savait qu'il ne laisserait plus personne – pas même le Sénat – lui retirer sa récompense ultime : quitter l'armée.

Contrairement aux autres, Gracchus était bon joueur. Il avait compris que l'ancien gladiateur était un homme de parole, et il lui était reconnaissant d'avoir tenu sa promesse. Si les autres sénateurs voyaient là une perte importante – on n'avait jamais assez d'homme de confiance pour prendre l'armée en main – il comprenait qu'il était temps pour Maximus de se retirer, comme il avait dit qu'il le ferait.

Mais il n'était pas non plus naïf. Même si Maximus avait fait passer le bien-être de ses hommes avant lui, il ne partirait sans doute pas les mains vides.

_ Alors, général, en plus de notre reconnaissance éternelle pour tes services, quelle récompense réclames-tu ?

Derrière, les sénateurs se mirent à gronder. Gracchus aurait dû faire lui-même une offre à la hauteur de ce que le Sénat pouvait se permettre, plutôt que laisser le général décider seul. À présent, Maximus pouvait demander n'importe quoi.

_ J'ai repéré deux très bons chevaux, dans les écuries du palais, fit celui-ci d'une voix tranquille. Je voudrais aussi une mule, des vivres, des couvertures... et ma solde de ces trois dernières années.

Il y eut un silence. On attendait la suite, mais elle ne vint pas.

_ C'est tout ? demanda Gracchus, surpris.

_ C'est tout pour moi. Mais je demande aussi la liberté pour cette femme.

Il se leva et désigna Indira, debout derrière sa maîtresse, absente et les yeux baissés, comme à son habitude. Sur le moment, la jeune esclave ne réagit même pas, mais comme Lucilla se trémoussait sur son fauteuil et qu'on s'agitait autour d'elle, elle finit par lever la tête et croisa le regard de Maximus. Ses yeux s'agrandirent de surprise.

_ Indira m'a aidé à quitter Rome et à rejoindre mon armée. Sans elle, Commode m'aurait pris et je serais mort. Elle a amplement mérité la liberté et de l'or pour faire de sa vie ce que bon lui semblera.

Cette fois, ce fut au tour de Lucilla de réagir. Elle bondit de son siège et se tourna vers son esclave, la bouche ouverte sur des mots qu'elle ne parvenait pas à formuler. Puis, furieuse, elle tourna les talons et quitta le Sénat en faisant voler les voiles de sa stola autour d'elle.

Tous les regards étaient tournés vers Indira qui n'avait pas bougé, raide comme une statue.

_ Hé bien, j'ignore ce que tu as fait, ma petite, reprit Gracchus sur un ton ironique, mais il semble que tu aies gagné ta liberté...

Puis il se tourna à nouveau vers Maximus.

_ Est-ce tout, général ?

_ C'est tout. Rome est à vous, conclut celui-ci.

Le temps qu'il s'adresse à Gracchus, puis se tourne de nouveau vers Indira, celle-ci avait disparu.

-----

Le soir, la jeune esclave ne se faufila pas dans les appartements de Maximus, comme elle en avait pris l'habitude.

Inquiet, celui-ci attendit jusqu'à la nuit noire. Puis, il descendit vers les cuisines où se tenaient la majorité des esclaves lorsqu'ils n'étaient plus auprès de leurs maîtres.

_ Toi ! fit Maximus en interpellant une jeune femme qu'il lui semblait reconnaître. Tu connais Indira, non ?

_ Tout le monde ici la connaît, maître. Que puis-je faire pour te servir ?

_ Où est-elle ?

_ Indira ? fit la jeune femme, surprise.

_ Oui, Indira ! Où est-elle ?

_ Elle a quitté le palais, maître. Il paraît qu'elle a obtenu sa liberté.

_ Elle est partie ? Où ça ?

_ Je ne sais pas. Elle est partie, c'est tout.

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