Point de vue d'Adam :
Nos lèvres étaient à présent à quelques millimètres les unes des autres, jusqu'à ce que je me stoppe net. Qu'est-ce qu'elle attendait pour m'embrasser ? D'habitude n'importe quelle fille aurait attrapé mon visage et m'aurait embrassé ! Pourquoi ne réagissait-elle pas ? J'étais pourtant Adam Klein ! Je me reculai dans le bain pour me remettre à ma place. Noa me dévisageait, je n'arrivais pas à déchiffrer ses pensées.
— Je suis pas assez bien pour toi, c'est ça ? Tu préfères les filles moins coincées ? Ou c'est simplement un petit jeu ?
Je n'osais pas répondre. Pour une fois dans ma vie, j'avais honte. Moi, j'avais honte de ce que j'avais dit. Qu'est-ce qui m'arrivais ? Elle me retournait complètement le cerveau. Pourquoi toutes ses réactions étaient-elles imprédictibles ? Elle ne faisait pas ce que je voulais, et c'est ça qui me frustrait. Pour appuyer sa question, à laquelle je n'avais pas répondu, elle pencha la tête sur le côté, mécontente.
— Je pense qu'au contraire, tu es trop bien pour moi Tigresse.
Je n'avais quand même pas dit ça ? Si, au vu de son expression de stupéfaction, je l'avais dit. Cette fille, qui était-elle ? Pourquoi est-ce que je me sentais bien avec elle ?
— Tu sais, ton petit jeu ne fonctionne pas avec moi, ajouta-t-elle enfin.
— Hein ?
Son regard avait changé.
— Ton jeu du garçon qui fait craquer toutes les filles, indifférent, qui s'en fou de tout. Qui croit que le monde est à ses pieds, qui croit que tout lui ait dû. Le jeu du garçon qui peut se taper toutes les filles qu'il veut en claquant des doigts. Mais tu joues très mal Adam Klein.
Je soupirai. Elle avait raison au fond, elle m'avait bien cerné.
— Qu'est-ce que t'en sais ? Fut la seule chose que je pue répondre.
Elle gigota dans l'eau dont la mousse disparaissait à vue d'œil.
— Tu ne me connais pas, tu ne sais pas ce que j'ai vécu. Tu crois que pendant deux ans, je n'ai rien fait de ma vie ? Que je suis restée sous un pont, toute seule ? Tu crois être le seul mec à avoir un tel comportement ? T'es un petit joueur comparé aux rencontres que j'ai faites...
Je restai sur le cul. Alors il existait pire que moi ? Et moi qui croyais être le plus grand des salopards. J'avais envie de savoir, qu'elle me raconte. Mais je voyais bien dans son regard qu'elle avait souffert.
— Tu sais, continua-t-elle alors, je suis sûr qu'au fond, tu n'es même pas comme ça. Tu fais le fort, mais la mort de Maxime t'a chamboulé, je suis même sûre que tu as pleuré en cachette. Tu tiens énormément à Sacha et aux autres, et si tu t'entoures comme ça, si tu te tapes des tonnes de filles, c'est juste pour une raison.
— Laquelle Sherlock ?
— Tu as peur d'être seul.
Son regard se plongea dans le mien, et une douleur aiguë me transperça la poitrine. Peut-être qu'elle avait raison ? Ses mots me chamboulèrent, d'habitude personne ne s'intéressait à moi de cette façon. Noa était vraiment intrigante, et cela commençait à me plaire. Je pris alors une décision, j'allais l'épargner. J'allais mettre ma fierté de côté et ne pas la faire souffrir.
— Tu as peut-être raison Tigresse.
Elle soupira et me prit les mains. À ce moment, un frisson me traversa tout le corps, un frisson d'excitation.
— Même si je te déteste, si je hais ton comportement, sache que je serais là si tu en as besoin. Tu as tenu ta parole, tu m'as aidé à retrouver ma sœur. Tu es venu me chercher à Heaven et tu m'as emmené ici. Merci.
Noa venait de me remercier. Après tout ce que j'avais fait ? Cela faisait bien longtemps qu'on ne m'avait pas dit un merci aussi sincère.
— Bon, marmonnai-je. Ça te dit pas qu'on parle dans le salon plutôt qu'ici ?
Elle hocha la tête et lâcha enfin mes mains, les joues rouges. Noa ferma les yeux pour ne pas me voir sortir du bain. J'enfilai rapidement une serviette qui était posée là autour de ma taille. Puis, je me tournai face à la porte le temps qu'elle sorte de l'eau à son tour.
Elle m'autorisa ensuite à me retourner. Elle avait une petite serviette vert-pâle autour du corps, laissant apparaître ses jambes élancées. Bon sang qu'elle était belle quand même.
— Je ne pensais pas qu'un geek pouvait avoir des abdos, se moqua-t-elle.
— Qu'est-ce que tu crois ? Ricanai-je à mon tour.
Noa s'approcha de moi, et me demanda de contracter mes muscles.
— Voyons voir si c'est pas du faux, plaisanta-t-elle.
Puis, de ses petits doigts froids, elle toucha mon ventre. À chaque contact avec elle, j'avais l'impression qu'une énergie indescriptible inondait mon corps.
— Et toi, fait voir puisque tu fais la maligne.
Je touchais son ventre à travers la serviette mouillée. Noa me dévisagea pendant que j'appuyais sur ce qu'elle croyait être des abdos musclés. Je relevai la tête et nos regards se figèrent. J'essayai de déchiffrer ses yeux bleus-gris.
Je ne sais combien de temps nous restâmes ainsi à ne rien faire. C'est comme si tout autour avait disparu, il ne restait plus que nous deux, seuls dans le silence. Puis, je pris son visage dans mes mains, et elle devint rouge comme une tomate. Un sourire narquois se dessina sur mon visage et je l'embrassai sur le nez.
— T'as eu peur hein ? M'esclaffai-je.
— Idiot ! Souffla-t-elle en me donnant une tape.
Nous décidâmes finalement de sortir, pour aller nous habiller avec des vêtements propres dans nos chambres respectives. Lorsque nous l'encadrement de la porte, la lumière du salon s'éclaira, et nous tombâmes nez à nez avec Sacha, Shark et Crash. Tout le monde se figea. Sacha me fusillait du regard, s'il avait pu, il m'aurait poignardé sur-le-champ. Nous allions voir qui de nous deux Noa choisirait. Et le rendre jaloux me permettrait de gagner l'argent du pari. On n'est pas jaloux pour rien.
— Je vois que ça ne perd pas de temps, dit-il les dents serrées.
Je me mis à sourire comme un benêt.
— Vous faîtes pas d'idées, annonça Noa. Il ne s'est rien passé, ce n'est pas c'que vous croyez. Sur ce, je vais m'habiller.
Noa ne salua personne et grimpa les escaliers. Je la suivis tout en serrant les mains au passage.
Une fois tout le monde bien habillé, Sacha nous fit réunir au salon.
— Bon, dit-il, toujours irrité par la situation. Shark et Crash ont trouvé des infos. Ils savent où est Élisa.
Les yeux de Noa s'illuminèrent. Je ne l'avais jamais vu comme ça, elle était encore plus belle. Je devais vraiment arrêter de penser comme un débile.
— Où ça ? S'inquiéta-t-elle. Comment va-t-elle ? Elle n'est pas blessée ? On s'occupe bien d'elle ? ...
Je posais ma main sur son épaule pour la calmer, sous le regard foudroyant de Sacha.
— Elle est chez son oncle Franck, répondit Shark. On a réussi à retracer son téléphone et trouver son adresse, et on a envoyé un drone chez lui pour voir ce qu'il faisait. Mais on n'a pas pu aller bien loin, les forces de police l'ont abattu dès qu'on a survolé la rue.
— Les forces de police ? Répéta-t-elle.
Elle n'était pas au courant... C'était maintenant ou jamais.
— Noa, commençai-je. Tout Paris est en guerre civile, et ça s'étend sur les autres villes de jours en jours. Les hommes et les femmes qui s'étaient cachées manifestent dans les rues. Ils cassent tout, s'attaquent à la police. Les forces de l'ordre se sont déployés dans tout Paris, et on ordre de tirer sur quiconque possède une arme ou représente un danger.
— Quoi ?! S'étouffa-t-elle, horrifiée.
— Et... Continuai-je. Tu es portée pour responsable de tout ce qu'il se passe, tu es recherchée par la police... Vivante ou morte...
Ses épaules s'affaissèrent, elle porta sa main à sa bouche. C'était le coup de grâce.