Le Tour de l'Univers en 10-43...

By ManuBreysse

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Sareth est Pharaon sur une planète perdue à l'extrémité d'un bras de la voie lactée, jusqu'au jour où il est... More

Avant-propos - Fermi, Humains et Paradoxe
Chapitre 2 - Vortex, Taxi et Georges
Chapitre 3 - Bibliothèque
Chapitre 4 - Désespoir, Bar et Diabolo-plutonium

Chapitre 1 - Olhem, Rêve et Assassinat

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By ManuBreysse


Abandonnons ici ces débats de théoriciens, les Terriens, et les Tetpleinaraboriens. Ce n'est pas leur histoire que je vais conter, mais celle plus prosaïque de l'Olhem... Pardon ? Ah oui, je ne me suis pas présenté. Veuillez m'excuser. Je n'ai pas de nom à proprement parler. Appelez-moi comme tous m'appellent : Narrateur.

L'Olhem, comme je le disais, est un vaste pays gouverné par un ef'atrah... comprenez : un genre de pharaon. Ce pays est situé sur l'un des trois continents que comprend la planète Teth'oa de la constellation du Capricorne. Le peuple qui y vit ignore l'existence des différents continents qui la composent, la sphéricité du monde, et les principales lois qui gouvernent l'univers. Pour synthétiser, les Olehmites n'ont du monde qui les entoure qu'une vue plane, antique, et presque totalement fausse.

La nuit tombait sur la rayonnante capitale. Sareth, créature humanoïde et roi de l'Olhem, était appuyé contre la balustrade du balcon de sa chambre royale. Il contemplait, de ses yeux clairs, les soleils jumeaux se couchant sur la vallée. Leurs rayons projetaient sur sa peau ambrée une lumière rouge-orangée, et ses cheveux noirs bouclés dansaient au gré de la brise vespérale qui se levait. Alors que le ciel se tintait progressivement de pourpre, les derniers rayons de lumière projetaient l'ombre des plateaux bordant la vallée sur le fleuve, qui, loin en aval, scintillait encore de mille éclats. Déjà, le plus petit et le plus rouge des deux astres franchissait l'horizon. Dans la culture Olehmite, c'était le Dieu Kéon qui se couchait quelques minutes avant son grand-frère Kase. Ces Dieux laissaient ensuite à leur sœur Tethra, Déesse nocturne, le soin de veiller sur le royaume durant leur absence.

Faisons un petit aparté. S'il existe une chose complexe dans l'univers, c'est bien l'histoire des Dieux que content les peuples. Ces histoires, d'une richesse extrême, permettent d'une part d'en apprendre plus sur un peuple, et d'autre part de se rendre compte combien la représentation qu'il se fait du monde est éloignée de la réalité. Néanmoins, je ne vous ferai pas un exposé des mythes de l'Olhem, car ceux-ci pourraient être assimilés à une valse éternelle d'échanges familiaux sexuels plus ou moins moraux sans véritable intérêt. Je me contenterai donc de vous dire que la culture Olehmite, est, somme toute, assez banale, et comparable à celle de l'Égypte antique de la Terre.

Sareth n'avait cure de tels débats. Il se contentait de rêvasser, repensant à son enfance. Il n'avait que douze ans lorsqu'il était monté sur le trône. Il succédait à son père, mort à quarante-et-un ans, un bel âge aux vues des connaissances sanitaires de la culture Olehmite. Son père avait toujours été un mystère pour lui. Enfant, il le croisait rarement. Les quelques échanges qu'ils eurent avaient été tout au plus respectueux. C'était son tuteur et sa mère qui lui avaient enseigné l'art de la politique, et tenté de combler l'absence paternelle. Son géniteur, Sareth s'en rendait mieux compte aujourd'hui, ne lui avait rien légué. Aucune connaissance, aucun conseil, aucun moyen de comprendre. Pas même un manuscrit autobiographique lui permettant de donner un sens à sa vie. Ces pensées le rendaient mélancolique ; il chercha un autre endroit pour laisser vagabonder son esprit.

Il repensa à ses Dieux, puissants cachés par-delà l'horizon, qui veillaient sur le monde. La tradition voulait qu'ils apportent à l'Olhem la prospérité. En échange, le roi et ses sujets se dévouaient à eux corps et âme. Et, de temps en temps, ils pratiquaient le sacrifice Olehmite : « Il faut savoir donner » scandaient les bourreaux comme un précepte moral. En tant que roi, Sareth devait guider les siens avec honneur, et respecter la volonté des Dieux créateurs du monde. Dans sa culture, seule une telle alliance, scellée dans le sang, évitait à leur monde de disparaître. Il était convaincu de la puissance des Dieux, de la véracité de ses croyances, et du sens que l'ensemble conférait à sa vie. Sareth avait bien entendu une femme. Elle et sa première courtisane lui avaient donné cinq enfants qui jouissaient du luxe de la royauté. Les affaires politiques marchaient plutôt bien. Depuis plusieurs années, plus personne ne convoitait la terre d'autrui, ce qui permettait au commerce – et aux impôts – d'être florissants.

Ce soir-là, il se coucha de bonne humeur avant de se mettre à rêver. Dans son rêve, il voyageait à dos de scarabée géant, lorsqu'une lumière éblouissante l'aveugla. Un être familier apparut au travers de cette lumière : il avait les mêmes cheveux bruns bouclés, les mêmes yeux clairs, et la même cicatrice au menton que lui. Il faisait face à son jumeau.

— Bonsoir, Sareth.

Son double tenait dans une main ce qui ressemblait fortement à un canard en plastique jaune – matière encore inconnue des Olehmites. Ayant repéré son regard, le roi psychédélique s'expliqua :

— Oh, ne fais pas attention à ça. Je venais juste te prévenir que demain tu risques de... de mourir.

Une sorte de taureau portant la vague inscription « c'est elle » en lettres de feu traversa devant eux.

Son double ajouta :

— Demain soir, euh... fais attention, un... un de tes sujets...

Son double marqua une pause avant de reprendre.

— Erslan voudra te poignarder, voilà.

Son jumeau sembla se retourner pour parler à une personne que Sareth ne pouvait pas voir. Il crut discerner ces paroles :

— ... sûr que j'ai tout dit ? D'accord.

Son double s'adressa de nouveau à lui :

— Je te souhaite une bonne nuit.

Sur ce, un second taureau passa entre eux avec la même inscription, et se transforma en un soleil flamboyant à l'image du Dieu Kase. Sareth se réveilla en sueur.

Le lendemain soir, le roi averti, pour lequel les rêves étaient le plus sûr moyen utilisé par des Dieux pour communiquer avec les ef'atrah, fit précautionneusement tout ce que Kase lui avait dit : il se méfia. Il se méfia d'autant plus que, ce soir-là, il avait organisé un grand repas. D'une part en l'honneur de Kase et de sa manifestation – car celles-ci, il fallait l'avouer, étaient bien trop rares. D'autre part, parce qu'entouré de plusieurs servants, il était protégé, ou du moins le croyait-il. Il fixait d'un mauvais œil Erslan, à son service depuis sa naissance. Jamais il n'aurait cru que ce gamin, si serviable et si dévoué, soit capable de commettre une telle félonie. Mais les Dieux avaient vu son véritable visage. Si Erslan ne passait pas aux aveux d'ici l'aube, il serait offert à la clairvoyance des Dieux. Le repas terminé, Sareth ordonna à dix de ses meilleurs officiers de conduire discrètement Erslan au cachot.

— Alors Erslan, on prépare un mauvais coup à son roi ?

— Majesté, je ne vois pas de quoi vous parlez... Si vous faites allusion à ma cuisine, sachez que je peux vous arranger la ch...

— Silence ! Installez-le sur la planche. On verra si tu restes muet longtemps.

— Mais, attendez, mon roi ! Je ne sais pas de quoi vous parlez !

— Ah bon ? Eh bien je vais te rafraichir la mémoire. Vois-tu, l'autre nuit, j'ai eu une vision de notre Dieu qui m'a dit que tu allais m'assassiner.

— Quoi ? C'est une méprise...

— Ne blasphème pas ! La parole des Dieux est irrévocable.

— Mais... ce n'est pas possible ! Je n'ai jamais voulu ni même pensé à vous tuer !

Le jeune innocent versa des larmes.

— Ce n'est pas la peine de tenter de m'apitoyer. Vu ton hygiène de vie et ta classe sociale, tu mourras d'ici quinze ans de toute façon, alors ne te plains pas. Tu accompliras le dessein des Dieux et ils t'en seront reconnaissants. Gardes ! Préparez-le pour l'échafaud, il a avoué.

— Mais je n'ai...

Tout à coup, il se passa une chose étrange. Les gardes qui allaient enlever les liens du prisonnier venaient tout bêtement de disparaître. Sareth resta bouche bée. L'instant d'avant, deux colosses d'un mètre quatre-vingt se trouvaient à ses côtés. Erslan ne comprit pas plus que son roi ce qui se passait ; il n'y vit qu'une occasion pour s'échapper. Malheureusement, lui aussi disparut. Le Roi vacilla. Il prit une torche, son courage à deux mains, puis balaya l'espace clos de la salle creusée à même la roche.

Personne ne pouvait disparaître de la sorte, pensa-t-il, c'était impossible... Était-ce encore une épreuve envoyée par les Dieux ?

C'est alors qu'il vit la chose. Il cligna une vingtaine de fois des yeux, se pinça au moins autant de fois, avant d'être certain qu'il voyait bien une sorte de sphère, en forme de toile d'araignée bleue et dorée, flotter à la hauteur de son visage. Le monarque observa la chose assez longuement pour définir son degré d'agressivité, qui se voulait heureusement nul, si ce n'est qu'elle venait de happer trois Olehmites. Il s'en approcha avec la témérité de la souris s'approchant du chat en train de faire ses griffes, et finit par ne plus en être très loin du tout. Il s'arrêta, avança et contourna le curieux objet. Un instant, il crut que celui-ci avait disparu, avant de s'apercevoir que l'objet n'était pas une sphère, mais un disque très fin suspendu en l'air – ce qui ne le rassura pas totalement.

Dans la vie, il y a des moments où il faut savoir prendre une décision, surtout si vous êtes roi. Il y a d'autres moments où rester immobile et contempler, bouche bée, est la seule chose qu'il vous serait possible s'il se trouvait, comme dans le cas présent, un disque lumineux à moins d'un mètre de votre tête. Mais comme la vie est pleine de surprises, Sareth fit un geste, un seul. Il toucha l'objet de sa main. Au moment du contact, il n'aurait su dire si c'était sa main qui traversa le disque ou si c'était le disque qui l'enveloppa entièrement. Une chose est sûre cependant : après avoir effectué ce geste en apparence anodin, Sareth se retrouva face à une maison lui fonçant dessus à toute allure.





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