Les Tribulations d'Agathe

By Juliettelem

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Les tribulations d'Agathe - Wattys 2017 catégorie Maître Conteur : Adolescente déjantée, Agathe croque... More

1 - La gifle
3 - Un ange tombé du ciel
4 - Adopte-un-ange.com
5 - Un mobile pour Agathe
6 - Le frère de l'ange
7 - Appâter la Dorade !
8 - Rupture
9 - Souvenirs
10 - Tours de Piste (1)
11 -Tours de piste (2)
12 - Remise en forme
13 - Cinéma
14 - Sortie nocturne
15 - Au coeur de la nuit
16 - Règlement de comptes
17 - Déclarations
18 - Trahison !
19 - KO Debout
20 - Tensions
21 - Secret...
22 - Le coeur de Sasha
23 - Manipulations
24 - Echec au Roi !
25 - Plongeon et Vol plané...
26 - Coup de foudre...
27 - Cupidon en eaux troubles
28 - Questions délicates
29 - Propositions indécentes...
30 - La famille s'agrandit...
31 - Leçon de vie...
32 - Confessions
33 - Un Chat, une robe et... un chapeau ?
34 - Ange et Vipère
35 - Les larmes d'Hugo
36 - Absence
37 - Fugue !
38 - Coup pour coup !
39 - ALERTE !!!
40 - Mystère du Coeur...
41 - Larmes et chagrin
42 - Malentendu et Confessions...
43 - Fiesta et...
44 - Égaré...
45 - Extraction...
46 - Dragon-Fâché
47 - Confidences et Rencontre...
48 - Confrontations
49 - Enzo...
50 - Retrouvailles et présentations
51 - Réveil à l'aube
53 - Randonnée
54 - Dans les eaux bleues
55 - Glu, sourires et chocolat
56 - Comment pratiquer le "Théo curieux"... ?
57 - Chalet et chamalows...
58 - Petites conversations
59 - Au secours d'Agathe...

2 - Un plan parfait

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By Juliettelem

Dans l'épisode précédent, je vous ai raconté comment j'ai provoqué intentionnellement la colère de ma belle-mère et pris une gifle. Mais qui chercherait à se prendre une claque  ? Et dans quel but... ?

Soyons clairs : je ne m'attaque jamais à plus faible que moi. Cibler en priorité les empêcheurs de vivre en paix, style Face d'oignon (ma belle-mère), voilà ce qui m'amuse. Bon parfois, je m'exerce aussi à planter mes crocs sur des gens pas très malins et jamais très innocents.

Au bout de la rue, le propriétaire du tabac-épicerie déteste me voir entrer dans son magasin pour mes supers pastilles de menthe forte... Il faut dire que je l'ai surpris à entourlouper une petite vieille qui venait acheter son journal et faire son loto. Oui à cet âge, l'internet c'est compliqué alors la presse papier a encore quelques années devant elle, comme la Française des jeux. Quand les gens n'ont pas de sou, leur fourguer de faux espoirs et leur faire dépenser quelques euros en plus...

Donc l'affreux, au lieu de rendre la monnaie sur un billet de vingt, rendait sur dix Euros. Quand la mamie a tenté de protester, il l'a convaincue qu'elle confondait. Placée juste derrière la vieille dame, je tordais du nez à cause de l'écoeurant parfum de muguet qu'elle dégageait (une horreur chimique à vomir). Occupée à reluquer d'un œil son col de fausse-fourrure un peu mité (je m'occupais à chercher les mites justement), j'observais le manège de l'autre, de mon autre œil vu que le premier zieutait la fourrure. Haussement de sourcil, ton faussement aimable, regard de tueuse, et je lâche à tue-tête pour les clients alentours :

- Mamie ne s'est pas trompée, d'ailleurs vous avez glissé le billet de vingt...

Un ton plus bas, menaçante, le regard plissé, planté droit dans les petits yeux du faux-jeton et penchée vers lui, j'ai glissé dans un murmure.

- ...dans votre poche. Vous avez pris dix dans la caisse pour le rendu monnaie puis vous vous êtes dit que vous pourriez... voler cette petite dame !

La face rouge comme une tomate première fraîcheur, il a happé l'air. Ressemblance étonnante avec un poisson échappé de son bocal. Une sueur coupable dégoulinait de ses traits grassouillets. Miracle ! Quinze euros vingt-cinq centimes déposés dans la paume de Mémé en un clin d'œil. Plus que prévu, l'émotion de s'être fait pincer, vous comprenez... Mamie a fourré le tout dans son antique porte-monnaie puis attrapé son espèce de chariote. Vous savez ces cabas sur roulettes qu'affectionnent certaines générations d'anciens, très anciens même... Il parait que ça revient à la mode avec des coques dures et des décors plus en vogue. Euh ! Merci mais non merci, pas pour moi. Le Drive est pas fait pour les chiens et tout va direct dans le coffre de voiture, enfin grâce aux biscotos d'Agathe. Oui, pendant que Bajoue de Hamster cause à ses copines avec son portable en mains libres, ça fait plus classe. Mémé a couiné un « au revoir » et s'est carapatée. La pauvre sera quand même obligée de revenir. Les autres commerces sont trop loin, il faut une voiture. Pas sûr qu'elle possède un véhicule, sauf la fameuse chariote, sans parler du permis, de voiture, pas pour le cabas à roulettes.

Pour revenir à l'épicier, mon petit côté justicier se trouve aidé par ma taille athlétique, un mètre quatre-vingt et un physique un peu particulier. Un déficit en mélanine, explication du médecin de la famille, me donne une peau très pâle et des cheveux blonds presque blancs. Je vous vois venir. N'allez pas imaginer une ascendance « vampiresque» dans mes gênes ! Mon histoire familiale ne comporte aucun truc bizarre. D'accord, j'ai parlé de planter mes crocs tout à l'heure. Mais moi en petite amie de Dracula, grosse erreur de casting. Pour les personnages à grandes dents et buveurs de sang, ben faites comme tout le monde, chauffez le pop corn, sortez le Coka et matez-vous Twilight ou Chica Vampiro. CV, ça c'est pour les très jeunes si je me rappelle les passages captés à l'occasion. Pour vous faire peur, il faudra choisir des versions anciennes. Ce que j'ai pu flipper avec le Coppola qu'un cousin m'avait laissée regarder. J'avais à peine onze ans à l'époque. L'oeuvre a nourri mes cauchemars certaines nuits.

Quelques jours après l'incident « Mémé », un tract sympa trouvait le chemin des boîtes aux lettres du quartier. Une imprimante du bahut pour l'édition, la mention « toute similitude avec une personne connue... n'est pas totalement fortuite » et une discrète virée de nuit par le toit de la véranda... Le tour était joué et l'affreux maté ! Je me marre encore aux commentaires de Picasso Trombine (vous visualisez j'espère ?), choquée de la dénonciation mais pas du contenu... et des paroles tranquilles de mon père.

- Le propriétaire peut porter plainte mais s'il s'avère que l'histoire est vraie, il n'aura plus qu'à vendre son commerce.

Œil de Morue n'a rien répliqué et piqué du nez dans son assiette. Comme ce soir d'ailleurs. Vous attendez avec impatience la réaction de mon père à la gifle. Voilà, je vous la sers toute chaude.

De retour dans ma chambre après avoir claqué la porte, vous vous rappelez ? Les pneus de la voiture paternelle crissent en douceur sur le gravier de l'allée. Pour m'assurer que la trace sur ma joue se remarque, j'effectue une vérification dans le miroir. Cette trace rouge..., pas la faute de Peinture-ambulante , n'exagérons pas, mais le résultat de quelques pincements répétés. Et un dernier pour la route ! Je gagne le pallier. En temps normal, mon père passe la porte et un troupeau de buffles dévale l'escalier pour lui sauter au cou. Oui, grave atteinte du « complex father », traduction : « j'adore mon père, je le porte aux nues et je montre les dents à toute femelle qui veut se l'accaparer ». Ce monsieur est séduisant, gentil, super cultivé, intelligent bien sûr et capable de jouer à Lol (league of legend) jusqu'à deux heures du mat avec moi, mais le samedi soir seulement ! Elfe de Maison, bien sûr, ça la rend dingue.

Pas le genre de détail que je raconte aux nanas de la bande, le fait de jouer à des jeux en ligne avec son paternel. La plupart ne discutent jamais avec leurs géniteurs ! Le mien n'est pas du genre papa gâteau mais il ne me traite pas comme une gosse débile et irresponsable. Bon, il ne sait pas tout de ce que je trame non plus... j'ai dans l'idée qu'en dehors des cas où je prends des risques, et oui ça m'arrive et des vrais..., il trouverait les choses marrantes. Mais si je commence à causer, il pourrait combler les blancs. Trop risqué. Un coup à me retrouver cadenassée dans ma chambre et interdite de sortie jusqu'à mes quatre-vingt dix ans !

Les yeux braqués sur mes pantoufles, je descends les escaliers sans enthousiasme et me limite à un petit sourire de bienvenue. Froncement de sourcils de l'arrivant qui me dévisage. Depuis que je suis toute petite, je lui saute au cou dès qu'il franchit la porte. Pas facile quand j'étais « rase moquette ». Du bout des doigts, il effleure ma joue. Avec un teint blême comme le mien, une pancarte et une flèche indiquant « regarde c'est là où elle m'a cognée » serait moins efficace. Ses doigts glissent sur ma peau, il ne pose pas de question et patiente. Mon père est comme ça. Jamais de pression, il attend que je sois prête. Je lui sers une petite grimace désolée, elle marche à tous les coups celle-là. Vous avez déjà vu ces mangas où le personnage qui joue de vilains tours se retrouve avec de petites ailes démoniaques dans le dos et une queue fourchue qui frétille ? Et bien là, tout pareil !

- Je suis arrivée en retard. Je suis passée à la bibliothèque rendre des livres, il y avait une expo de sculptures modernes, c'était le dernier jour. Et je n'ai pas vu le temps passer. Je n'ai pas pu prévenir avant... Ségolène s'est inquiétée.

La sculpture moderne, je ne comprends pas grand chose à ses formes étranges. Je n'ai pas l'œil artistique. Mais lui, oui. L'emprunt des bouquins, ça fait une excuse. Parfois, je les ouvre. Et bien entendu, l'expo existe et elle se termine aujourd'hui. Une des girls, photographe amateur, a photographié les pièces exposées et je peux décrire ces horreurs les yeux fermés. La bibliothèque, proche du collège, un choix stratégique : un lieu que ne fréquente pas Dorade Peinte.

Son petit nom, Ségolène, je n'ai rien dit à ce sujet. Ses origines bretonnes et par conséquent des vacances tous les étés en Bretagne. Encore heureux avec des activités sympathiques à voir et à faire, le temps passe vite sinon je crèverais de déracinement et d'ennui. Sans parler du temps, toujours variable. Bon là j'exagère un peu mais tout ce qui vient d'elle, je ne veux que le démolir. Vous connaissez des ados qui ne sont pas entiers dans ce qu'ils aiment et ce qu'ils détestent ? Avec moi, c'est la guerre totale mais tout en camouflage, en batailles souterraines. Je travaille dans l'usure.

Mon père m'a souri sans un mot. Aucun sentiment de honte, je suis juste la fille unique dans toute sa splendeur et j'assume. Et les mensonges envers son gentil papa... Je vous vois venir : je ne suis pas une sainte, je joue avec l'équipe d'en face ! Les vilains, les méchants, les petits démons !

- Va aider Ségo à mettre la table. 

Le couperet ne tombe pas encore mais la chute est imminente. Léger frisson d'excitation intérieure qui descend jusque dans les orteils... Comme chaque fois que le résultat de mes petits plans diaboliques s'annonce.

La voilà qui me regarde, lèvres pincées, outrée de ce qu'elle vient d'entendre et incapable d'admettre un malentendu. J'entre dans la cuisine. Les éléments en pin blond ont été remplacés par une cuisine vintage « dernier cri » qui me débecte. Je me lave les mains puis j'installe le couvert. Mocheté-cubique, rapport au cubisme en peinture, rejoint mon père dans la salle de bain. Je les entends discuter. Je surprends les mots.

- Je ne veux pas de violence, Ségo. Agathe n'est pas si difficile !

Le reste de la conversation ne me parvient pas, dommage. Tout ça dit sans hausser la voix, je me demande si ça n'est pas pire que s'il hurlait à pleins poumons ? La voilà qui rapplique et qui évite de me regarder. Mon père me sourit. Vous vous dites : « et c'est tout ? ». Attendez !

Au milieu du repas, mon père balance.

- Agathe, Samedi après-midi, nous irons te choisir un portable. Tu pourras prévenir si tu risques d'être en retard. Tu as quinze ans, tu es en âge de posséder un i-phone.

J'ai le triomphe modeste et ne laisse rien deviner à l'extérieur, mais à l'intérieur c'est la fête, la danse de la victoire du sol au plafond. Ségo serre les mâchoires. Elle refuse que je possède mon téléphone depuis plus de deux ans ! Au début, je m'en fichais... Mais aujourd'hui, pour une ado, c'est indispensable. Et puis c'est important que je sois en contact avec la bande. J'ai bien un vieux Nokia à carte, refilé en douce par le cousin Théo, oui celui des films d'horreur, et planqué avec soin. Le phone, pas le cousin. Mais ça commençait à faire limite sérieux. Question de prestige. Et les articles "tombés du camion", je ne suis pas pour, sans parler que j'aurais à financer mon abonnement et, grâce à qui vous savez, mon argent de poche fait à peine le mois. Bières, cigarettes, pastilles de menthe, déo, biscuits, recharge d'unités pour mon vieux portable, le budget est serré. Au moins je saurai gérer plus tard.

Opération I-phone terminée, l'objet du délit sera bientôt en ma possession. Succès sur toute la ligne et la mine révoltée d'Iguane Peinturlurée en cadeau.


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