Ekaterina Shelehova - Savage Daughter
Raquel
Isaac était parti. Il lui avait laissé un mot et l'avait désignée responsable du QG, ou du moins de ce qu'il en restait. Elle avait accepté, la boule au ventre. Prête ou pas, il allait falloir gérer.
Elle restait faible, mais ses brûlures et blessures avaient été soignées. Elle se dirigea vers sa salle de bain avant de se regarder dans le miroir. Elle ne ressemblait à rien. Elle se demandait même comment Isaac avait pu l'embrasser. Lui qui était toujours parfait. Dans un élan de rage elle attrapa les ciseaux dans le tiroir. L'instant d'après, de longues mèches de cheveux brulés tombaient dans l'évier. Elle ne voulait pas garder ça avec elle. Elle ne pouvait pas. Ses longs cheveux qu'elle avait mis tant de temps à faire pousser, sa fierté. Mais aussi son enfance et son adolescence sous les ordres du Colonel Diane. Elle braqua ses yeux sur son reflet, les larmes aux yeux. Elle prenait la charge du QG sur les épaules. Elle fréquentait Isaac d'Europe, héritier du Général, mais surtout une figure importante des rebelles. Quelques minutes après, elle laissa l'eau couler sur son corps, effaçant les larmes, la douleur et le sang. Lorsqu'elle sortirait, elle serait forte. Elle serait aussi forte que ses parents, puis que Diane avant elle.
Avant de partir de sa chambre, elle se pencha sur les comptes rendus qu'Isaac avait déposé sur son bureau. Nombre de morts. Nombre de blessés. Étendue des dégâts. Autant dire qu'ils ne pourraient pas rester très longtemps ici. Leur localisation avait été découverte, une grande partie du matériel avait brulé, c'était catastrophique. Le problème c'est que pour le moment, elle ne savait pas où ils allaient aller. Elle avait bien une idée. Il existait un autre QG. Mais elle ne connaissait pas la localisation et elle n'avait aucun moyen de les contacter. Leur chef, le Colonel Miller, ne s'était pas vraiment quitté en bons termes avec ses parents et avait décidé de faire route à part. Elle glissa une mèche de cheveux mouillés derrière son oreille. Il allait falloir qu'elle trouve une solution. Pour le moment, le Général ne semblait pas vouloir attaquer tout de suite, mais ils restaient à sa merci.
Hope
Elle avait passé une bonne partie de la journée avec Juan. Pour ne pas dire toute la journée. Il avait passé son temps à dormir et elle avait somnolé à ses côtés. Lorsqu'ils passèrent la porte du self, des applaudissements retentirent. La salle était en ruine. Mais les rebelles étaient toujours là. Parfois blessés et mal en point, mais toujours prêts à se battre et à suivre leur Lieutenant.
- Ils n'applaudissent pas que moi, lui souffla Juan.
Elle allait protester lorsqu'une recrue posa ses yeux sur elle avec admiration.
- Merci. Vous nous avez sauvés.
Elle eut un sourire, surprise. Elle sentait que son statut avait encore une fois changé.
Alexia était installée à côté de Jacob et Sarah, elle lui fit un petit sourire de loin. Tout avait tellement changé depuis qu'elle était arrivée chez les rebelles. Elle était chez elle désormais. Lorsqu'elle senti le bras de Juan se caler autour d'elle, elle se posa doucement contre lui. Elle avait peur pour la suite. Elle savait que ce n'était pas gagné, que ce n'était que le commencement. Mais ils étaient ensemble désormais, envers et contre tout.
Ils commencèrent à manger, mais alors que Juan la mettait au courant de l'état de sa mère, qui s'était amélioré, le silence se fit dans la salle. La porte venait de s'ouvrir sur la nouvelle cheffe du QG, la nouvelle Colonel. Elle sentit un frisson parcourir sa colonne et Juan se tendit à côté.
Colonel Hernandez.
Adieu les longs cheveux et ondulations rousses. Ils étaient désormais coupés dans un carré strict, juste au-dessus de ses épaules. Elle était la même, mais son énergie était différente. Elle venait de passer de soldat à leader. Son regard était aussi sévère que d'habitude, mais sa nouvelle médaille forçait même les officiers à se tenir droits devant elle. Chacun se levait sur son passage, en signe de respect.
Elle marcha droit jusqu'à la place du Colonel Diane, là où on avait déposé l'ancien blouson de Diane, le blouson de Colonel. En arrivant devant, elle marqua une pause, le poing sur le cœur.
- Je jure de protéger ce QG au péril de ma vie, comme ceux qui m'ont précédé, s'exclama-t-elle d'une voix forte, malgré ses yeux brillants.
Ses paroles résonnèrent dans la salle. C'était une promesse, un sacrement.
Hope la vit alors enfiler le blouson, puis par s'installer pour manger. Elle pouvait presque sentir d'ici le pouvoir des responsabilités retomber sur les épaules de son amie. Mais elle ne s'en faisait pas. S'il y avait une personne capable de reprendre ce rôle maintenant c'était elle.
Deux semaines plus tard...
Les rebelles avaient fait du bon travail. Le QG était à nouveau habitable. Si l'on oubliait les rondes des soldats, la pression aux entrainements qui laissait présager une bataille, et les réunions interminables des officiers, tout était presque redevenu normal.
Lorsque Hope se leva, elle ne pu retenir un soupir. C'était son anniversaire. Elle avait toujours détesté son anniversaire. On aurait dit les pensées d'une mauvaise héroïne de roman qui cherchait juste un peu d'attention, mais c'était vrai. Il coïncidait douloureusement avec le décès de ses parents.
Elle avait l'habitude de le fêter, mais ça sonnait toujours un peu mal, un peu mélancolique. Elle se souvenait de la journée où ils n'étaient jamais venus la chercher à l'école. Ce jour où elle avait compris que son frère serait désormais sa seule famille. Puis ils étaient arrivés chez son oncle. Elle avait appris à faire comme si. Faire comme si c'était son père. Puis Jake était parti. Du jour au lendemain, il avait fugué. Il l'avait laissée seule et ça, elle ne l'avait jamais accepté.
C'est pourquoi elle n'avait rien dit à Juan. Enfin jusqu'à ce que ses cousins ne crachent le morceau la veille. Ainsi, en arrivant dans la salle d'entrainement ce matin, il lui tendait une petite boite entourée d'un ruban.
- Joyeux anniversaire.
Comment pouvait-elle lui en vouloir ? Il n'y avait rien de frivole, rien de trop. Juste une petite boite, et puis lui, toujours là pour elle. Dans la boîte, il y avait une chaîne et au bout se trouvait un pendentif en forme de J, taillé dans une balle en argent.
- Je me suis dit que comme je portais le tien, autant qu'on soit raccord.
Hope releva la tête vers Juan, elle mordit sa lèvre doucement avant venir prendre Juan dans ses bras.
- Merci, murmura-t-elle lorsqu'elle sentit ses bras se refermer sur elle et ne plus la lâcher.
Elle resta longtemps contre lui. Elle en avait besoin. Elle avait besoin de lui aujourd'hui. Elle sentait que ça allait être une longue journée.
- Je vais te le mettre, dit-il d'une voix douce lorsqu'elle se recula finalement.
Il glissa ses mains dans son cou, puis ferma le collier et en profita pour poser un baiser dans sa nuque.
- Il te va bien. C'est parfait. J'ai un autre cadeau pour toi. Mais on va devoir aller voir Raquel. Elle est dans son bureau. Tu viens ?
Elle le regarda, perdue. Pourquoi le bureau de Raquel ? Mais elle ne protesta pas et lui suivit. Il devait y avoir une raison.
Raquel avait un immense sourire aux lèvres. Affalée dans son fauteuil, une simple boite sur le bureau.
- Salut les amoureux.
Hope n'avait pas besoin de se retourner pour savoir que Juan venait de lever les yeux au ciel.
- J'ai un petit cadeau. Ouvre, reprit la colonelle.
Hope posa les yeux sur la boite, puis elle finit par l'ouvrir. Lorsqu'elle découvrit ce qui s'y trouvait elle eut un mouvement de recul. C'était impossible.
Un blouson d'officier était soigneusement plié dedans. Par-dessus, un insigne de caporal brillait, accordé d'un petit mot.
"Pour ton courage et ton sens du sacrifice. Pour toutes les vies que tu as sauvées. Pour tes missions et tes combats"
- Je... Merci, bégaya-t-elle en sortant l'insigne.
Elle n'y croyait pas ses yeux. Elle venait de devenir officier.
- Ne pense pas que c'est parce qu'on est amies. C'est mérité. Pour avoir ramené Juan, pour ton courage, pour ton engagement. Joyeux anniversaire Caporal Jensen.
Juan lui sourit tendrement, il était fier d'elle. Elle le voyait d'ici.
À midi, ils avaient pris une grande table avec les cousins de Hope. Au moment du dessert, Alexia arriva avec un gâteau et des bougies. Il était écrit "Joyeux anniversaire Hope" en chocolat sur le dessus. Tout le monde se mit à chanter. Encore une fois, cette journée permettait à tous d'avoir une parenthèse de calme et de fête en dehors du sang et des balles.
Hope pinça ses lèvres toute en regardant le sol. C'était le fameux moment du gâteau. Le fameux moment où on ne sait pas vraiment quoi faire pendant ce temps-là, mis à part sourire. Elle regarda tout le monde, assez gênée. Puis quand Alexia déposa enfin le gâteau, elle souffla sur ces bougies et tout le monde applaudit.
- Merci à tous, et je vous laisse manger ce gâteau qui a l'air vraiment bon, sérieux qui l'a fait ?
Ses cousins levèrent alors la main.
- C'est nous ! On l'a fait avec Sarah. C'est elle qui nous a appris.
Juan sourit légèrement. C'était tellement adorable. Il attrapa alors Hope par la taille et l'embrassa tendrement.
- Joyeux anniversaire. Je te laisse couper le gâteau.
Hope commença à rougir avant d'attraper le couteau.
- Tu peux pas le faire ? Je vais me foirer dans le nombre de parts.
Elle tendit le couteau vers Juan qui l'attrapa. Pendant ce temps-là, elle s'approcha de Charlie et Meï et les serra dans ses bras. Reconnaissante de les avoir avec elle. Puis elle posa ses yeux sur Juan, concentré à servir tout le monde. Dire qu'il y a quelques mois, il était un inconnu. Maintenant, c'était sa famille. De ses yeux sombres à ses petits sourires, de son air sérieux à ses rares éclats de rire. Elle savait qu'elle voulait passer le restant de ses jours à ses côtés.
- Comme quoi ton anniversaire c'est top ! s'écria alors Meï en attrapant l'assiette avec la part de gâteau, la sortant de ses pensées.
- Oui, c'est le meilleur anniversaire de tous les temps ! sourit Charlie en allant lui faire un câlin.
A la fin de repas, Jacob s'approcha alors de Hope pour lui souhaiter un bon anniversaire. La toute nouvelle caporale le remercia avant de le prendre dans ces bras quelques seconde. Elle attrapa une assiette de gâteau et lui tendit. Une fois fait, elle se tourna vers Juan qui fixait Jacob d'un mauvais œil.
- Tu es vraiment drôle quand tu es jaloux, ria-t-elle.
Il passa ses bras autour de sa taille et l'embrassa sur le front.
- Je ne suis pas jaloux. J'aime pas Jacob c'est tout, soupira-t-il. Je déteste qu'il mette ses mains sur toi.
Il fit alors apparaître une jolie rose blanche avec son pouvoir.
- Je t'aime Hope. Je t'aime énormément.
Comment ne pas craquer face à ça ?
Elle l'embrassa alors comme si tout autour d'eux avait disparu, comme s'ils étaient seuls tous les deux. Il lui rendit son baiser avec la même fougue, mais Sarah finit par aller les voir et leur dire de se trouve une chambre.
- On se roule pas des pelles devant les enfants. Je veux plus vous voir tous les deux.
Juan rigola légèrement. Sarah était pire que sa mère. Il tira alors Hope dans sa chambre.
- Je t'aurai bien emmenée dehors, mais c'est compliqué. Alors c'est le seul endroit que je peux te proposer pour se poser ensemble.
- C'est parfait, souffla-t-elle. T'en fais pas.
Elle se laissa tomber sur son lit et le laissa venir à côté d'elle.
- Dis-moi, ce serait quoi ton rêve le plus fou ? demanda-t-elle alors que ses mains caressaient légèrement son torse.
Juan laissa tomber sa tête, réfléchissant. Ses doigts faisaient des allers-retours dans les mèches de Hope et elle se sentait de plus en plus relaxée.
- T'embrasser sur le balcon du palais du Général. Quand on était petits avec Isaac. On s'était promis d'emmener notre copine là-bas quand on serait grands. C'est toujours dans mes projets. La vue est merveilleuse. On a l'impression que le monde entier nous appartient. Tout l'inverse d'ici confinés dans ce bunker.
Elle sourit en posant sa tête contre l'épaule de Juan le regard vague.
- Projet intéressant, c'est vrai...
Elle ferma les yeux sentant une légère fatigue lui prendre d'un coup. Elle était si bien ici. Elle avait envie d'oublier tout le reste. Oublier le fait qu'il y avait quinze ans ses parents étaient morts. Oublier le fait que son frère l'avait abandonnée. Mais évidemment, c'était impossible.
- Juan... commença-t-elle sans savoir s'il allait pouvoir accepter.
Il tourna légèrement la tête vers elle, la serrant un peu plus fort.
- Il y a un petit cimetière dans mon village et normalement, j'y vais toujours le jour de mon anniversaire. J'aimerai juste... déposer un bouquet de fleurs. Je sais que c'est dangereux de sortir en ce moment et-...
- Je t'emmène, lâcha-t-il. On sera prudents.
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On se retrouve dimanche soir pour... le dernier chapitre.
Je posterai un épilogue et des remerciements la semaine prochaine. Mais le dernier chapitre officiel c'est dimanche.