OCTAVIA
– Quoi ? je lance.
Armin, qui me fixait bizarrement, sursaute et répond :
– Rien, rien ! Tu changes de look toi aussi ?
Moi aussi ? Parce que quelqu'un a changé de look pendant les vacances sans que j'en sois informée ?
– Rosa m'a forcé à aller faire les magasins, je réponds finalement.
– Elle t'a conseillé des sous-vêtements ?
J'en entendrai encore parler sur mon lit de mort !
– Tu veux que je te montre peut-être ? je réplique.
Armin se met à bafouiller avant de fuir vers la salle de notre premier cours de la journée.
Je replonge le nez dans mon casier en maudissant Rosalya et son maudit relooking. C'est vrai que mon reflet dans le miroir est bien plus satisfaisant avec un ensemble jupe/blouse/manteau, j'ai l'impression d'être une étudiante en théâtre à Oxford, ce qui est vraiment trop cool ! Le problème, c'est que je reste très mal à l'aise à l'idée de porter une telle tenue en public. J'ai cette impression constante que tous les regards sont posés sur moi et je déteste ça.
– Alors, pas trop dure la reprise ? me demande Ginny en s'adossant contre son casier.
Je la détaille du regard, puis je baisse les yeux sur ma tenue et je bougonne :
– Avec toi à côté, j'ai l'impression d'être une mère qui trimballe son ado rebelle.
Ginny se met à rire avant de confirmer mon impression.
– S-salut...
Je suis certaine que mon regard s'illumine lorsque mon blondinet préféré entre dans mon champ de vision. Pour une raison que je ne comprends pas, son visage est légèrement rosé, je suppose qu'il a dû courir pour arriver à l'heure au lycée.
– Salut Nate ! je le salue avec un grand sourire. T'as passé de bonnes vacances ?
– O-oui... répond-t-il avant d'enchaîner : T-tu es... tu es... Enfin, je veux dire que tu es très...
Ginny ouvre son casier et se met à rire silencieusement tandis que j'essaie d'analyser la phrase de Nate. Il semble me regarder bizarrement, encore plus qu'Armin.
– Tu as... Tu as fait quelque chose à tes cheveux ?
Je passe une main dans mes cheveux pour les remettre en place. En effet, alors que je pensais avoir le temps de me remettre avant la prochaine séance de torture de Rosa, celle-ci m'a trainé chez son coiffeur préféré qui a pratiquement hurlé en voyant l'état de mes cheveux. J'ai donc eu le droit à un soin beaucoup trop long, un wolf-cut, une routine capillaire beaucoup trop élaborée pour ma personne et une interdiction formelle de toucher à un appareil chauffant. Rosalya m'a même confisqué mon lisseur ! Résultat, me voilà avec des cheveux frisés et une frange. D'ailleurs, je ne savais même pas qu'une frange pouvait être jolie lorsqu'on avait des cheveux frisés !
– Oui, je confirme avec un léger sourire. Rosa a décidé de se la jouer marraine la bonne fée.
– T-tu es très jolie, commente Nate. Enfin, je veux dire tu étais déjà très jolie avant mais là... Enfin, ça te va bien.
Je lui réponds par un sourire et le garçon passe devant moi en baissant les yeux sur son porte-document.
– Ce que c'était gênant... se moque Ginny.
– Tu veux que je te fasse une Débrah à toi ? je réplique en posant la main sur la porte de mon casier.
La sonnerie m'empêche d'envoyer ma meilleure amie aux urgences avec un nez cassé et je soupire en repensant avec regret à mon lit si confortable que je n'ai quasiment pas quitté des vacances. Heureusement, dans notre malheur, nous commençons par un cours d'histoire, qui est sûrement la seule matière acceptable de cette année !
Je m'arrête sur le pas de la porte, étonnée par deux choses : tout d'abord, Castiel est présent en cours, ponctuel et arbore une nouvelle veste : un perfecto clouté qui risque de faire tourner la tête de ma meilleure amie. La deuxième, et c'est là la plus étonnante, est un Nathaniel qui n'est pas déjà en train de sortir ses affaires sur mon bureau, mais adossé contre celui de Rosa :
– Bien sûr ! s'exclame Rosalya, les yeux pétillants. On peut y aller ce soir si tu veux !
– Vraiment ? répond Nathaniel. Merci beaucoup ! Et encore désolé de te demander ça d'un coup...
– Il n'y a pas de soucis ! J'adore ça !
– De quoi vous parlez ? je demande, les sourcils froncés.
– R-Rien du tout !
– Je trouve ta réponse un peu trop rapide pour être sincère, mon cher Nathaniel, je réponds, suspicieuse. Me cacherais-tu quelque chose ?
– Cela ne te regarde pas ! s'exclame Rosalya avec autorité. Tu verras demain ! Non mais oh ! Ton père t'a jamais dit que la curiosité était un vilain défaut ?
– Mon père est encore pire que moi, je réponds. Tu devrais le savoir vu que tu passes ton temps à commérer avec lui !
Rosalya me lance un regard fier avant de se reprendre :
– Oui et bien... Va à ta place et étudie ! Il te faut de bonnes notes pour entrer à la fac ! C'est une affaire entre Nathaniel et moi !
– M-mais ça n'a rien de personnel ! s'empresse de préciser Nathaniel. Enfin je veux dire c'est juste une sortie entre deux camarades de classe, ça n'a rien d'exceptionnel !
Rosalya lui donne une tape sur l'épaule :
– T'es vraiment pas doué pour garder un secret !
– Qu'est-ce que vous allez faire dehors tous les deux ? je demande, suspicieuse.
– Je viens de te le dire ! C'est un secret ! Mais ne t'inquiète pas ! Je ne vais pas te le voler ton Nathaniel !
Je sursaute en l'entendant prononcer "ton Nathaniel" avant de faire demi-tour et d'aller m'asseoir.
– Jolie chemise, commente Castiel. Dommage que niveau décolleté t'aies rien eu pour la remplir.
Je me contente de lever les yeux au ciel en ouvrant mon bloc-note.
– C'est amusant, je change de fringues, toi aussi... continue le blaireau. Si je vais me jeter d'un pont, tu me suis ?
– Non, meurs tout seul.
– Oh mais c'est qu'il sort les griffes, le chaton ! se moque le blaireau. Du calme.
– Parce que tu crois qu'un perfecto va changer le blaireau que tu es ? je réplique. Tu peux changer de veste, tu seras toujours le même looser qui s'est fait avoir par Débrah. Deux fois.
– Et toi tu devrais mettre des vêtements qui te mettent un peu plus en valeur, réplique Castiel d'un ton acerbe : Qu'on ait au moins l'impression qu'il y a quelque chose à toucher...
Il se penche vers moi avant d'ajouter :
– Quoi que, d'après mon expérience, je sais qu'il n'y a pas grand chose...
Je lève les yeux vers lui et murmure, les dents serrées :
– On avait dit qu'on en reparlerait jamais.
– Quoi ? T'as peur que ton prince charmant l'apprenne ?
Je recule sur ma chaise, frappée par sa réplique et Castiel semble réaliser qu'il a été trop loin puisqu'il ajoute :
– T'as raison, désolé.
Je détourne le regard pour me concentrer sur ma feuille, laissant mon stylo tracer des cercles dans la marge.
– Mais tu peux mettre tous les décolletés du monde, reprend le blaireau. Tu seras toujours une planche à pain.
Le bruit de mon bloc-note frappant le crâne rouge résonne dans toute la salle et M. Faraize me lance un regard désapprobateur.
– Octavia, s'il-te-plait, dit-il. Ne me force pas à te virer de cours dès le premier jour.
– Désolée, je réponds. C'est la saison du scorpion, je suis un peu sur les nerfs.
***
Ce n'est qu'en arrivant en cours de biologie le lendemain que je comprends quel était ce fameux rendez-vous entre Rosa et Nath.
– Eh ! s'exclame Ginny. Eh oh ! Octavia ? Êtes-vous avec nous ? Houston, ici la Terre !
Elle claque les doigts devant moi et je détourne les yeux de notre délégué principal.
– C'est la journée des clowns ou quoi ? lance Castiel en se postant à côté de nous, les yeux rivés sur Nate.
Ginny, au lieu de lui lâcher la réplique acerbe que ce blaireau mérite, se contente de détourner les yeux. Je lève les yeux au ciel avant de zieuter de nouveau Nate. Il semble avoir mis au placard son ensemble favori pour opter pour quelque chose de légèrement différent. C'est ainsi qu'il a débarqué au lycée avec un jean, un t-shirt et un blazer. Simple, mais terriblement efficace. Pas de dessins ridicules comme les t-shirts d'Armin, pas de veste clinquantes comme celles de Castiel, pas de pantalons colorés comme ceux d'Alexy ou Ken. Nathaniel est resté sobre, et cela lui va... merveilleusement bien.
Je regretterais juste qu'il n'ait pas gardé une chemise en stock, enfin non, surtout la cravate, j'avoue que j'avais un faible pour sa cravate, c'était pratique de s'accrocher à celle-ci quand on tombe dans les pommes. Je suppose que je n'aurai pas d'autre choix que de me m'accrocher à sa veste.
– Oh là, se moque Castiel. Je crois que le coincé a fait bugger ta pote !
Je soupire et lève les yeux au ciel avant de répliquer :
– Si c'est comme ça que tu comptes te rattraper après l'épisode D-word, va falloir faire mieux ! je finis par craquer en claquant mon casier.
– Je n'ai rien à me faire pardonner, réplique Castiel. Et certainement pas auprès de toi.
– Pourquoi ? je m'exclame. Tu l'as mal pris d'être traité de bouffon devant le lycée tout entier ? J'y suis pour rien !
– Non, on peut remercier ton délégué pour ça
– Mais tu vas la lâcher oui ? intervient une nouvelle voix.
Nous nous tournons d'un seul vers Nathaniel.
– Bouge ! lance Castiel. Tu vois pas que tu nous dérange ?
– Vu le ton de la conversation, je pense que c'est plutôt toi qui dérange.
– Les gars...
– Tu me fatigues... soupire Nathaniel.
– Et moi qui espérais un levé de drapeau blanc... je soupire à mon tour.
Ginny se met à pouffer, attirant nos regards. J'échange un regard avec elle et me mets à ricaner à mon tour.
– Je suis pas sûr de tout comprendre... murmure Nathaniel.
– Je suis pas sûr de vouloir comprendre... murmure Castiel.
Ça va finir en fanfiction sur Nath et Cassy cette histoire, moi je vous l'dit !
[la narratrice vient de se faire violemment agressé par Octavia et ne sera donc plus en mesure d'écrire la suite de l'histoire]
– Sérieux les gars, je reprends. Après cette histoire avec l'autre garce, j'espérais au moins un armistice ! Ou au moins un petit armistice... un armisticette...
– Pourquoi ? lance Nate. Je le déteste, il me déteste, peu importe qui est à la base du problème, il est là maintenant.
– Écoute donc ton coincé la planche à pai-AIE ! MAIS ÇA VA PAS ?!
– Désolé, répond innocemment Nathaniel. C'était un accident...
Un accident dans lequel le pied de Nath a atterri droit dans le genou de Castiel.
– Oui, comme avec les baguettes... marmonne Ginny.
Castiel marmonne des jurons qu'une fille bien élevée comme moi ne répétera pas et quitte enfin mon champ de vision.
– Tu sais, reprend Nathaniel. Ça fait du bien d'avoir quelqu'un qu'on déteste. On apprécie beaucoup plus les autres !
– Je ne suis pas sûre de bien saisir la logique... je réponds, sceptique.
La sonnerie nous coupe dans notre échange et Nathaniel tourne les talons. Je lui attrape la veste pour l'empêcher de s'enfuir et fais un pas vers lui :
– Au fait... Je vois que Rosalya a été de très bon conseil avec toi...
– Oh ça... souffle-t-il en baissant la tête, des fossettes marquant ses joues. C'est rien.
– En tout cas... Ça te va très bien.
– M-Merci...
Je me mets sur la pointe des pieds et dépose un baiser sur sa joue avant de murmurer :
– Et merci de m'avoir défendu.
– Toujours, répond-t-il alors que ses fossettes se creusent encore plus.
– Pathétique ! marmonne Ginny en claquant la porte de son casier pour se rendre en cours.