OCTAVIA
TW : cicatrices, mention d'automutilation
Un peu plus tôt...
Profitant des bienfaits de la vitamine D, je marche au-hasard, les bras tendus, profitant du silence apaisant de la plage. Mes cheveux bougent en accord avec le vent, tout comme mon kimono bleu, me donnant l'impression de vivre dans un clip des One Direction. Je ne comprends vraiment pas ce que peut bien reprocher Ginny à cet endroit. Tout est si... calme...
GRRRRRRR
Je pousse un cri et me tourne vers l'affreuse bête d'où émane le grondement.
WAFF ! insiste la créature.
Je fais un pas en arrière et Cerbère s'éloigne de moi.
– EH ! Espèce d'idiote, tu ne pouvais pas l'attraper ?!
Mais je connais cette voix ?
Pitié, mais qu'est-ce que ce blaireau fait ici ? Je croyais qu'il était plus du genre à s'exiler dans une cave sombre et morbide pour pleurer sur le sort de sa misérable vie comme le font les personnes de son genre.
– Bon sang ! Tu ne pouvais pas le retenir ? Ça fait une plombe que je lui cours après ! Démon ! Viens ici !
Non mais quel toupet !
Le retenir ? Pourquoi ? C'est SON chien ! un peu de responsabilité serait la bienvenue bon sang !
Je mentirais en disant que son maudit short de bain rouge et noir ne lui va pas. C'est vrai qu'il est assez séduisant. Le problème chez Castiel, c'est sa sale gueule et les conneries qui en sortent.
Lui aussi semble me détailler, malgré-moi, je resserre mon kimono contre moi et reprend :
– Attends, le chien des Enfers qui vient de passer c'est le tiens ? je m'exclame.
– Non c'est celui de mon voisin... Mais bien sûr que c'est le mien ! Tu ne t'en souviens pas ? C'est Démon, mon Beauceron... T'as vraiment aucune mémoire...
– Si, mais pour les choses qui m'importent ! je réplique.
Le blaireau aux cheveux rouges regarde autour de lui et soupire :
– Quelle plaie... J'ai voulu lui enlever son collier pour le laisser profiter de la plage et il s'éclate à me laisser lui courir après...
Oh pauv' chéri !
– Tu te souviens quand tu te foutais de moi à cause de Kiki ? je demande. C'est ce qu'on appelle un retour de karma mon cœur.
– Au moins lui, quand il a décidé de désobéir, tu peux t'accrocher pour l'appâter. La solution serait de l'attraper lorsqu'il est tout près de toi, mais t'en as même pas été capable...
– J'ai l'air d'être ton esclave ?
– Si c'était le cas, tu me parlerais pas ainsi, réplique Castiel. Et tu enlèverais cette tenue de nonne pour porter un bikini.
Je lève les yeux au ciel et tourne les talons.
J'hésite à rejoindre ma meilleure amie, mais de là où je me trouve, je voix un point noir accompagné d'un point vert. Préférant éviter les représailles qui s'avèreront, j'en suis sûre, absolument terribles, je choisis de m'éloigner doucement mais sûrement avant qu'elle ne me saute à la gorge.
GRRRRR
Le chien disparaît aussi vite qu'il est apparu.
Génial, moi qui voulais un peu de tranquillité, je me retrouve à chasser un monstre aussi gros que moi !
J'aperçois un Castiel aussi enthousiaste que ma meilleure amie baragouiner je ne sais quoi un peu plus loin et ne peux m'empêcher de l'observer en croisant les bras. Me délectant de sa souffrance.
– Qu'est-ce que t'as à me regarder comme ça ?
– Tu cherches pas ton chien ? je me moque.
– Il va finir par revenir tout seul. L'appel de la bouffe est plus fort que le reste.
– Ça valait bien le coup de me saouler à cause de ton chien, je marmonne. Et qu'est-ce que t'attends pour l'appater avec des biscuits ?
– Je lui ai rien amené, je n'avais pas l'intention de rester longtemps ici.
Sérieusement, de toutes les personnes que je pouvais croiser, il fallait que ce soit ce maudit blaireau ! J'aurais largement préféré croiser Nathaniel... oui, même accompagné de sa sœur !
– Tu voudrais pas garder un œil sur lui pendant que je vais lui chercher quelque chose ? finit par craquer Castiel. Il doit bien y avoir une supérette pas loin. Tu me dois bien ça, comme tu n'as pas été capable de le retenir tout à l'heure.
Ai-je vraiment le choix ?
– De loin seulement, je réponds. Je m'approche pas des chiens.
– Je vois vraiment pas pourquoi tu as peur de lui. T'es tellement maigrichonne qu'il aurait encore faim de toute façon.
Dit-il en me dévorant des yeux. Très crédible le mec.
– En fait, c'est pour ça que tu te montres pas en maillot, t'as peur que tout le monde voit que t'es une vraie planche à pain !
Bonjour le bodyshaming !
– Tes remarques complètement déplacées seraient sûrement plus crédibles si je ne t'avais pas vu me relooker !
Je me laisse tomber sur le sol et soupire.
Je voulais croiser Nathaniel moi, je me fiche de ce que Castiel cache sous son t-shirt de rockeur, moi ce que je voulais voir, c'est ce qu'il y avait sous la chemise parfaitement repassée du beau blondinet. Je suis sûre qu'il cache bien son jeu.
– Non mais n'importe quoi, je marmonne.
Je secoue la tête pour chasser ces pensées plus que déplacées et retire l'une de mes Doc pour retirer le sable qui s'est infiltré à l'intérieur.
WAFF !
– Quoi ? je demande à l'attention du chien.
Il remue la queue et s'approche de moi. Je me mets à sourire malgré-moi et retire le lacet d'une de mes chaussures pour lancer l'un des bouts vers le chien. Il saute dessus mais je tire sur le lacet pour le ramener vers moi. Il commence à le chasser et moi je me mets à rire.
Le chien semble y voir un signe puisqu'il finit par s'allonger devant moi, réclamant des gratouilles que je lui offre.
– T'as réussi à le rattraper finalement ?
Je lève les yeux vers Castiel qui lâche son sac à dos sur le sable.
– Il est venu tout seul, visiblement lui aussi aime les planches à pain
– Pas mal ! T'es pas aussi inutile que ça. Mais j'ai acheté tout ça pour rien.
Laisses-moi pleurer.
– C'est marrant qu'il soit resté vers toi, s'étonne Castiel. D'habitude, il s'énerve facilement contre les gens qu'il ne connaît pas.
– Je suppose qu'il a vu qu'il n'avait rien à craindre puisqu'on s'est parlé sans que tu me menace, un exploit dont je te félicite d'ailleurs
– Bon ben, merci, dit-il difficilement. Sympa le coup de main. On se revoit au lycée après les vacances.
– Tu t'en vas déjà ?
– Je t'ai dit que je comptais pas rester longtemps.
– T'es sûr ? je demande. Regarde Démon, il semble bien s'amuser, ce serait dommage de le forcer à rentrer.
– C'est une manière de me demander de passer du temps avec toi ? s'amuse Castiel. Si c'est le cas, il suffit de le dire clairement.
– Non pas spécialement, je réponds, blasée. Mais à choisir, je préfère ta compagnie à celle qui m'attend à l'autre bout de la plage.
– De qui tu parles ?
– Je sors mon vampire de compagnie, j'explique. Elle a besoin de vitamine D mais je crois qu'elle a envie de m'enfermer dans son cercueil.
– Un jour, je ferai l'effort d'essayer de comprendre votre amitié.
– Je doute que tu y arrives, c'est trop compliqué pour un esprit simplet comme le tiens.
– Tu viens de dire que je suis stupide là ?
– Très perspicace.
Du bruit retentit derrière nous et nous nous tournons d'un seul.
– Comme vous êtes mignons tous les deux ! s'exclame le vendeur ambulant. Vraiment, un très joli couple.
– Beurk ! nous exclamons-nous en choeur.
– Vous voulez quelque chose ?
– Oui ! je m'exclame. Je voudrais de la crème solaire, une bouteille d'eau et une corde pour étouffer cet imbécile.
Le vendeur me répond d'un sourire amusé avant de me tendre les deux premiers articles. Il s'en va, non sans lancer une dernière remarque sur notre prétendu couple.
– Je savais que j'allais m'amuser en restant ! se marre cet imbécile.
– Un seul mot de plus et je te pousse dans l'eau ! je rétorque.
– J'aimerais bien voir ça tiens !
Je lève les yeux au ciel avant de ranger la crème solaire dans ma poche et d'ouvrir la bouteille d'eau.
– Démon ! Viens là !
Le chien rapplique aussitôt et je fais couler de l'eau dans ma main pour qu'il puisse boire.
– Voilà, bon chien ! je murmure en le caressant, lui mouillant le visage par la même occasion.
Je me relève et lance la bouteille à moitié vide à Castiel avant de lancer :
– Penses à t'hydrater toi aussi.
Et sans un mot de plus, je débarrasser le plancher. J'ai vu bien assez de Castiel pour une journée.
Je reprends la route, enfin prête à affronter ma terrible meilleure amie quand un surfeur apparaît dans mon champ de vision. Mon cerveau tire immédiatement la sonnette d'alarme quand le blond aux tatouages mahori m'accoste :
– Hé! Salut ! T'es toute seule ?
– Non et cherche pas, je suis pas intéressée, je réponds du tac au tac sans m'arrêter.
– Ah ! on cherche à se faire désirer ! s'exclame-t-il. Laisse tomber ta copine ! Viens avec moi !
– Non merci, je réponds froidement.
– Allez fais pas ta timide ! Je vais pas te manger... Enfin pas tout de suite.
Je vais vomir.
Il saisit mon bras et cette fois, je tressaille.
Je ferme les yeux et essaie de penser clairement, ce qui devient quasiment impossible. Le mode d'urgence s'enclenche dans mon cerveau et je passe en pilotage automatique.
– Alors, dis-moi de quel lycée tu viens, que j'aille m'y inscrire tout de suite !
– Sweet Amoris, je réponds d'un murmure, incapable de faire le moindre geste.
– Je savais pas qu'ils avaient des filles aussi mignonnes là-bas... continue-t-il. Dommage c'est trop loin de chez moi.
Je ne réponds pas.
– Et comment tu t'appelles ?
– Octavia
– C'est aussi mignon que toi ! Moi c'est Dakota, mais ça sonne pas terrible alors tout le monde m'appelle Dake. Tu viens souvent ici ?
C'est surtout la dernière fois que je viens;
– Non, je réponds, préférant mentir. C'est la première fois.
– Ah ouais ? Moi non plus je suis pas de la région, je viens d'Australie. Je suis venu voir de la famille. J'étais content de venir quand j'ai su qu'il y avait une plage pas loin, mais y a pas de vagues, j'ai emmené ma planche pour rien.
Mon cerveau commence enfin à relâcher la pression, me permettant de répondre :
– C'est cool, pourquoi tu n' y rentres pas ?
– Je ne vais pas rentrer alors que je suis en si charmante compagnie...
Pitié, sortez-moi de là.
– Je trouve que tu es un peu rouge, j'ai de la crème solaire si tu veux, continue-t-il, visiblement inconscient de mon malaise. Tu veux que je te tartine le dos ?
– Non merci, je peux me débrouiller toute seule.
– Allez, fais pas ta timide ! Il fait super chaud, tu devrais te mettre en maillot !
– Eh ! Me touche pas !
Il pose une main sur ma taille et tire la ficelle de mon kimono et l'obscurité s'empare de moi alors que mes démons ressurgissent.
Incapable de faire le moindre mouvement, ma respiration se bloque alors que le surfeur continue de parler.
– Eh ! intervient une nouvelle voix. Je crois qu'elle t'a demandé de lui foutre la paix. Alors lâche-là.
Je ferme les yeux et remercie silencieusement l'apparition divine de Castiel.
– De quoi tu te mêles toi ? s'exclame le surfeur. Personne t'a sonné !
– Alors tu la lâches tout de suite mon vieux, sinon ça va mal se passer.
– Pfff... soupire le surfeur avant de me lancer d'un ton accusateur : Je croyais que t'étais venue avec UNE amie, t'aurais dû me dire tout de suite que c'était un mec, je n'aurais pas perdu mon temps...
Il part mais je suis toujours en plein état de sidération, sentant encore la brûlure de sa main contre mon ventre.
– Tu pouvais pas l'envoyer balader dès le départ ? me lance Castiel.
Mes fonctions cognitives se remettent peu à peu en marche alors que ma vision se trouble derrière mes larmes. Je ferme les yeux et fais un pas un arrière, puis un deuxième. J'aimerais m'enfuir mais mon corps refuse d'obéir, il reste bloqué à quelques pas de Castiel qui avance vers moi en me demandant si cela va.
Les yeux fermés, je sens ma malédiction s'abattre tandis que des flash s'emparent de mon esprit. Ma respiration se bloque et je me sens défaillir. Mes genoux touchent le sol et je bascule en arrière en position assise. Les coudes posés sur mes genoux, le visage caché entre mes mains, j'essaie de remonter à la surface, mais je coule aussi sûrement que le Titanic.
– Eh ! s'exclame Castiel en se mettant à mon niveau. Je déconnais ok ?
Inconscient de la bataille qui fait rage en moi, il tente de me rassurer comme il le peut, avec les informations qu'il a, mais rien ne fonctionne.
– Octavia ? m'interroge Castiel, ne sachant comment réagir. Eh qu'est-ce que... PUTAIN MAIS C'EST QUOI CA ?
Je rouvre difficilement les yeux alors qu'il saisit mon mollet, les yeux rivés sur l'intérieur de ma cuisse non cachée par mon short en jean. Je me dégage de sa prise et remet en place mon kimono mais c'est trop tard : le mal est fait. Castiel recule, sûrement dégouté par sa découverte et les paroles d'Ambre me reviennent à l'esprit : "une fois qu'il saura ce que j'ai découvert dans ton dossier, il sera aussi dégoûté que je ne le suis."
Je sens le garçon s'éloigner de moi, ce qui me permet de respirer un peu mieux. Je pose une main sur ma poitrine, essayant de reprendre mon souffle bloqué dans ma cage thoracique sans y parvenir.
C'est alors qu'une vague d'eau glacée me saisit. Prise de surprise, mon cœur loupe un battement. Lorsque je reprends ma respiration, mon souffle se fait plus régulier. Je lève les yeux vers l'ombre à ma droite, je fusille Castiel du regard.
– C'est bon ? lance-t-il. T'es calmé ?
Je ne réponds pas, me contentant de chasser les mèches qui me collent au visage. Il repart pour redonner le sceau qu'il a volé à un gamin et j'ai l'espoir qu'il me laisse tranquille mais ce serait bien mal connaitre Castiel.
Il s'accroupit à mon niveau et saisit ma cheville, dégageant ma chaussure d'un geste.
– Tu m'expliques ? demande-t-il. C'est quoi ça ?
Je déglutis à la vue des petites entailles qui ornent le bas de ma jambe. Puis son regard dévie vers le haut de ma cuisse, où des entailles plus profondes se trouvent, plus récentes aussi. Il jette un coup d'œil à mon bras gauche et avant que je n'ai le temps de réagir, il le saisit.
– CASTIEL ! je hurle. LÂCHE-MOI !
L'épaisse cicatrice ornant une bonne partie de mon avant-bras est cachée sous un tatouage à peine cicatrisé mais il lui suffit d'effleurer ma peau pour la sentir. Il lâche un juron avant de relever les yeux vers moi :
– Putain... Mais pourquoi tu fais ça ?
– Lâche-moi ! je m'exclame. Ça te regarde pas !
– Maintenant si ! réplique le rockeur. Pourquoi tu as fait ça ?
Il saisit mon bras et insiste :
– De quand ça date ? Qui est au courant ? Pourquoi tu... Depuis combien de temps tu... Mais pourquoi tu t'infliges ça bordel ?!
J'accuse ses interrogations en silence. Cela ne devait pas se passer ainsi. Personne ne devait savoir. Je devais arriver dans un nouveau lycée, porter des manches longues jusqu'à ce que je me fasse tatouer pour cacher cette immondice et ensuite personne ne se serait rendu compte de rien.
Ambre et Castiel ont tout gâcher et aujourd'hui plus que n'importe quand, j'ai envie de retomber dans mes vieux travers.
– MAIS RÉPONDS-MOI BORDEL ! s'énerve le garçon. POURQUOI TU TE FAIS CA ?
– PARCE QUE C'EST LA SEULE SOLUTION QUE J'AI TROUVÉ POUR SURVIVRE ! je craque.
Je pose ma main devant ma bouche pour m'empêcher de cracher d'autres informations mais c'est trop tard.
– C'est la seule so... répète Castiel avant de baisser les yeux sur mon bras et de comprendre : Tu...
Il perd toutes ses couleurs et même la couleur rouge de ses cheveux parait terne.
– Je suis désolée, je murmure en me relevant. Tu n'aurais pas dû voir ça, je voulais pas... T'en occupe pas, ok ?
Je fais quelques pas pour remonter vers le point de campement mais Castiel me suit :
– Que je m'en occupe pas ? répète-t-il. Comment je suis censé ignorer ça ?
– En jouant les parfaits bad boy qui se fiche de tout comme tu le fais toujours ? je propose.
– Te fous pas de moi là, me coupe-t-il.
– C'est exactement pour ça que je voulais que personne ne soit au courant ! je m'exclame. C'est mon fardeau, pas le vôtre ! Alors oublie ce que tu as vu et laisse-moi gérer.
– Oh c'est vrai que t'as l'air de vraiment bien le gérer ! répond sarcastiquement Castiel. Tes parents sont au courant ? Et Ginny ? Nath, est-ce que...
– N'en parle pas à Nathaniel, je le coupe. Je t'en supplie Castiel, personne au lycée n'est au courant... J'ai promis à mon père que j'avais arrêté ces bêtises et il doit continuer à le croire !
– Et Ginny ? demande Castiel. Elle sait que tu continue ?
Je marque une pause, ne connaissant pas la réponse à cette question avant de répondre honnêtement :
– Je sais pas.
Je reprends ma route et m'arrête quelques instants alors que nous approchons de Ginny, qui a visiblement été rejoint par Lysandre durant mon absence.
– Tu m'as aidé avec ce relou et je t'en remercie, sincèrement, je commence. Tu as vu quelque chose que tu n'aurais pas dû, et je t'ai expliqué ce qu'il en était. Le sujet est clos.