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L'aube pointait déjà au-dessus de l'horizon, les vagues claquaient contre la coque et le vent était si froid qu'il en irritait la peau.
Rio était solidement attaché au mât avec une corde sur le pont humide du navire de Mor et Riky. Cette position des moins agréables ne l'empêchait pas pour autant de dormir, mais la fraîcheur du matin l'émergea peu à peu de sa pénible torpeur.
Dès l'instant où elle avait posé les pieds sur les planches du bateau, les deux hommes n'avaient pas attendu une seule seconde pour lui entraver les mains avec des menottes. La réalité était qu'elle aurait pu facilement s'échapper. Elle aurait pu également demander de l'aide aux pirates du Heart et était persuadée que Bepo serait venue l'aider ainsi que tous les autres d'ailleurs, même Law. Elle en éprouvait l'infime conviction.
Mais elle ne l'avait pas fait.
Elle s'était contenté d'observer la clé verrouillée ses lourdes menottes d'acier d'un claquement bruyant sous la lueur faible d'une lampe à l'huile.
Ses paupières s'ouvraient lourdement. Elle humidifia ses lèvres, asséchées par le vent marin, froid et salé. C'était déjà le troisième jour où elle passait la nuit dehors, une situation qui lui était certes familière mais quitte à être prisonnière, elle aurait préféré y être à l'abri du vent. Dans son malheur, elle avait la chance que la combinaison blanche des pirates du Heart l'isolait bien du froid.
Encore à moitié somnolente, elle laissa échapper le nom d'une figure familière qu'elle avait retrouvé cette nuit en rêve.
— Marta...
Des bribes de souvenirs un peu flou, une grande femme robuste à la peau brune, dont la généreuse chevelure frisée d'un jolie rose pêche, ne faisait qu'agrandir sa carrure. Et à ses oreilles, une paire d'anneaux d'un joli éclat cuivré, gravée de motifs raffinés. Rio se revoyait auprès d'elle, pas plus haute que son genou, lui montrant fièrement un livre d'exploration qu'elle venait de lire.
Un bruit métallique assourdissant retentit à ses pieds et la sortit de sa rêverie.
Riky avait posé, sans grande délicatesse, un plateau avec une modeste miche de pain et un verre d'eau, avant de desserrer les cordes qui maintenaient son buste fermement immobile contre le mât. Un des rares moments de la journée où elle pouvait étirer ses membres engourdis ou son dos endolori le temps d'un court repas malgré ses menottes et le regard circonspect de ses deux bourreaux.
En dépit de la circonstance dans laquelle elle se trouvait, Rio se sentait étrangement calme. Sa respiration était paisible et son visage préservait une certaine relaxation. Elle avait cependant maintenu un mutisme pesant avec les deux sbires de Silvas depuis le début du voyage, par simple rancune évidemment. Sa peur avait disparu, ou du moins elle arrivait à l'appréhender d'une manière plus sensée.
Dès l'instant où elle avala la dernière goutte d'eau de son verre, ils la rattachèrent immédiatement au mat. Pendant que Riky ramassa le plateau vide à ses pieds, un vent frisquet la fit éternuer.
La tête de Rio percuta violemment le haut du crâne du petit rondouillard. Le choc ne manqua pas de lui léser la tempe, alors que Rio n'en eut qu'une légère rougeur. Un coup à moitié prémédité, car Rio avait fait exprès de percuter la tête de celui-ci en y ajoutant plus de force que cela aurait dû être. Elle esquissa un sourire insolent quand elle vit la plaie de celui-ci saigner à travers son visage.
Riky grinça des dents avec une sombre colère dans le regard face à cette provocation ouverte. Il n'avait jamais apprécié cette sale morveuse attachée au poteau, et cela, depuis qu'elle était petite.
Il leva son point pour la frapper avec haine, mais son coup fut interrompu par la main de son collègue au ton las.
— Contient-toi Riky. Faut pas que sa blessure se rouvre, sinon elle risque de crever. Trafalgar l'avait spécifié.
Le petit rondouillard extirpa sa main de son étreinte avec dédain, puis repartit vaquer à ses affaires, tambourinant bruyamment ses pieds agacés sur le plancher.
Le regard de Mor se posa ensuite sur Rio, il souleva d'un air menaçant la pointe de son menton avec son arme à feu.
— Profite bien de ce voyage Roselyne, le chef ne sera pas aussi tolérant que nous une fois rentrés au bercail.
— Je n'en doute pas. Souria-t-elle, désabusée.
Silvas était ce genre d'homme prêt à tout pour accomplir ses objectifs, quitte à tuer ou torturer sans vergogne si cela était nécessaire, l'oreille de Marta qu'il lui avait expédiée n'en demeurait qu'une preuve de plus.
Mor haussa un sourcil, presque étonné d'entendre la voix fine de Rio après trois jours de mutisme. Il s'éloigna d'elle en rangeant son arme, pour s'asseoir sur la caisse qui lui servait de point de surveillance depuis le début du voyage.
— Hey, Mor. Donne-moi la boîte avec l'oreille de Marta, je veux l'enterrer quand on sera arrivé.
— En quel honneur, je te ferais cette faveur ? Ce n'est qu'une oreille, la vieille baraquée n'est pas morte... Pour le moment du moins. Il souffla, désintéressé.
— Mais son oreille, oui ! S'agita Rio sous son entrave.
Elle reprit sa respiration pour calmer l'ardeur qui s'éveillait en elle.
— Allez Mor ! En souvenir du bon vieux temps... On s'amusait bien à l'époque où mon père était encore vivant.
Elle n'avait pas pu s'empêcher d'avoir un ton froid derrière son sourire tendu qui se voulait d'apparence amicale.
— Ah ! Ricana-t-il. Tu parles de cette époque où tu étais un vrai petit démon intenable qui faisait des farces et coups tordus dès qu'on posait un pied dans ta cour.
— Bah quoi ? C'était pas drôle ? S'offusqua-t-elle, presque étonnée.
— Bien sûr que non. Il rétorqua instantanément.
Une légère migraine se réveilla dans la tête de celui-ci quand il repensa à cette époque terrible où il devait subir en silence les espiègleries de la jeune Rio. Dans combien de ses pièges était-il tombé ? Lui, ainsi que Riky qui, en plus, n'avait jamais porté les enfants dans son cœur, on pouvait même dire qu'il les détestait. Entre les trous creusés dans le sol ou les mixtures inquiétantes qui les gardaient auprès des toilettes pendant des heures et bien d'autres expériences désagréables, il n'aurait pas su dire ce qui était le pire.
Un frisson lui remonta le long de l'échine. Le grand homme quarantenaire en costume secoua la tête en exhalant un lourd soupir, pour effacer ces mauvais souvenirs de sa mémoire.
— Dans tous les cas, je refuse. Il avança avec nonchalance, la tête avachie dans sa main.
— Et si je suis sage comme une image jusqu'à la fin du voyage ?
— Marché conclu. Mor répondit sans une seconde d'hésitation.
Cette proposition était plus que bienvenue, car même attachée cela ne l'empêchait de faire des croche-pieds soi-disant involontaires ou autres embuscades tordues comme le coup de boule qu'elle avait donné à Riky. Elle avait même réussi à les faire tomber à la mer pas plus tard qu'hier.
Elle avait beau avoir grandi, Rio était toujours ce même sale petit démon qui leur compliquait la vie.
— Mais je te la passerai qu'à la fin du voyage. Ajouta-t-il.
Ce que Mor avait intentionnellement omis de révéler à Rio, c'est qu'il avait perdu la petite boîte noire qui contenait l'oreille. Il avait beau avoir cherché dans chaque recoin du bateau, il n'avait pas remis la main dessus depuis le début du voyage, comme sa vivre card d'ailleurs.
Mais il n'allait pas gâcher son plaisir de pouvoir voyager les dix jours de trajet restant dans la plus grande des sérénités et garda ce petit secret très précieusement.
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C'est déjà la semaine glacière. Pensa-t-elle, le regard brillant. Chaque bouffée d'air qu'elle expirait se transforma en un petit nuage de brume.
La neige crépitait sous le poids de ses pas, seule ses menottes claquaient à travers le silence particulier que l'on pouvait constater seulement lorsque la neige tombait. Rio s'arrêta un instant pour admirer le paysage nostalgique qui s'offrait à elle. Les flocons tombaient un à un sur le dessus de son crâne, s'assimilant à la couleur de ses cheveux et fondaient quand ils effleuraient sa peau.
Weekly Ice, l'île où Rio avait vu le jour, ce morceau de terre où elle avait passé toute son enfance jusqu'à ses onze ans. Une île au climat habituellement printanier, mais qui subissait chaque mois une semaine d'hiver rude et glacial.
La modeste ville portuaire aux maisons colorées était recouverte d'un épais manteau blanc. Les rues, habituellement bondées et animées, étaient complètement vides à cette période du mois. Les habitants s'enfermaient chez eux bien au chaud une semaine complète, le temps de passer cette rude semaine d'hiver.
— Reste pas planté là, avance.
Mor la bouscula dans le dos, ce qui fit avancer Rio de quelques pas, manquant de glisser sur une plaque de verglas. Elle se retourna face à lui, visiblement agacée et lui donna un coup bien placé dans le tibia. Le grand barbu au chapeau noir sautilla de douleur sur place, énervé à son tour.
— Grr ! Sale petite merdeuse ! Grogna-t-il.
— C'est pour avoir perdu l'oreille de Marta ! Dire que j'ai respecté ma promesse, moi, pendant ces dix derniers jours ! Tu vas payer, sale schnock !
Alors que leur chamaillerie empruntait une allure de plus en plus importante, Riky en arrière-plan perdit patience. Il cessa leur querelle d'un coup, en percutant violemment l'arrière du crâne de Rio avec une barre de fer.
Rio laissa échapper un gémissement de douleur avant de s'écrouler bruyamment sur le sol, face contre neige.
Ses cheveux blancs se teintèrent de rouge, Riky légèrement inquiet d'y avoir été trop fort, retourna le corps de jeune femme avec l'aide de sa barre de fer. Le front de Rio était également ensanglanté, mais il constata avec soulagement qu'elle avait juste perdu connaissance. De la buée sortait de sa bouche, signe qu'elle respirait toujours. Il arbora un petit sourire malsain, satisfait d'avoir pu assouvir une rancune réelle sur cette peste insolente.
Mor, abasourdi par la soudaine violence de son collègue, se tue quelques secondes avant de lui reprocher son acte.
— T'avais pas besoin d'y aller si fort, abrutie ! On aurait fait quoi si tu l'avais tué ? Le boss nous aurait massacrés !
Mor soupira, d'un air presque désolé. Il observa Rio inerte, gisant sur la neige, les épais flocons la recouvrant peu à peu.
— Faut la porter en plus maintenant.
Riky lança sa barre au loin et ignora les râlements de son collègue. Il commença à traîner Rio dans la neige en la tirant par le pied. Cela laissait une traînée de sang sur la neige, et il n'y avait rien de plus indiscret sur de la neige blanche. Même si au final, les flocons allaient tout recouvrir au bout d'un temps.
Cette façon qu'avait son collègue de traiter Rio, dérangeait Mor, se convaincant avec toutes les excuses possibles que s'il la traînait ainsi jusqu'au manoir, son visage serait boursouflé et elle ne pourrait plus parler convenablement, et leur chef rejetterait forcément la faute sur eux. Oui, c'était évident ! Il ne le faisait pas par pitié ou pour aider Rio ! C'était avant tout pour sa propre sécurité.
— Pfeuh. Non mais, j'te jure. Pousse-toi Riky, je vais la porter.
Mor attrapa Rio par les aisselles et la plaça sur son épaule tel un sac de patate.
Les deux hommes reprirent leur route à travers les rues enneigées.
Leur chef, Silvas, les attendaient tranquillement dans son manoir, sirotant un thé bien chaud, un sourire carnassier ornant son visage. Il observait la neige tomber près de la fenêtre, en humant une mélodie guillerette à travers les crépitements de feu de cheminée.
Prêt à recevoir cette invitée spéciale qu'il avait attendue pendant douze longues années.
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— Une île hivernale, hein ? Ça faisait longtemps.
Law gorgea ses poumons d'une grande bouffée d'air froid. La dernière fois qu'il avait enfilé son long manteau noir, c'était quand il avait infiltré Punk Hazard. L'île où son plan pour défaire Doflamingo avait commencé, ainsi que celle où il avait scellé son alliances avec le chapeau de paille.
Lui et son équipage venaient tout juste de débarquer sur l'île. Ils avaient caché le Polar Tang dans une petite crique discrète éloignée de la ville, au nord-est de l'île.
Law regarda le petit carré de vivre card avancer dans la paume de sa main. Les mouvements devenaient de plus en plus précis et il ne faisait aucun doute que Rio avait bien débarqué sur cette île. Elle devait être, maintenant, quelque part en ville.
❦ La nuit où Rio quitta les pirates Heart. ❦
— Capitaine ! Hurla Bepo. Ils ne sont pas partis depuis longtemps ! Avec un peu de chance, ils n'ont même pas encore pris la mer ! Je pars sauver Rio dès maintenant !
— Moi aussi ! Le rejoignit Penguin.
Bepo, Penguin ainsi que quelques autres membres s'empressèrent de prendre la direction dans laquelle Rio et les deux hommes en costume étaient partis. Mais leur capitaine interrompit immédiatement leur élan d'une voix autoritaire.
— Attendez ! ... Ne vous précipitez pas. Si Rio a accepté de partir de son plein gré, sans même demander notre aide, c'est bien pour une raison.
Law serra les dents en repensant à ce court moment où Rio avait craquée, pleurant à chaudes larmes allongé sur les caisses en bois et à cette oreille tranchée qu'ils avaient découverts. Il montra de nouveau la petite boîte noire à Bepo et les autres.
— Ses poursuivants détiennent sûrement un otage et ils la font chanter avec ça. Le mieux que l'on puisse faire pour elle, c'est de les suivre discrètement grâce sa vivre card. On agira en conséquence dès que l'on aura atteint leur point de destination.
❦ Retour au présent. ❦
— Jean Bart, je te laisse gérer en cas de problème.
— À vos ordres, Capitaine.
Law regarda son équipage derrière lui. Il avait décidé que seule la moitié de son équipage l'accompagnerait.
En réalité, il était persuadé qu'il aurait pu rondement menée cette mission de sauvetage seul, à coup de Room et de Shambles, juste sauver Rio avec l'otage sans provoquer de grabuge inutile.
Mais ils ne voulaient pas évincer les sentiments qu'avaient ses camarades envers Rio, ainsi que leur envie de participer à ce sauvetage.
De plus, son instinct lui disait que cette affaire n'aurait pas pu être résolue aussi simplement.
— Vous êtes prêt ? Demanda Law.
— Aye, Capitaine ! Hurla Bepo en résonance avec les autres.
Bepo, Shachi, Penguin, ainsi que les cinq autres membres de l'équipage étaient tous armés de leurs armes respectives, déterminés et prêts à en découdre. Ceux qui restaient sur le bateau les encourageaient avec hargne.
— Ramenez-nous Rio ! Hurla Ikkaku.
— Ouai ! Cassez leur gueule à ces débiles en costume !
— Ils vont voir ce que ça fait de s'en prendre à une amie des pirates du Heart !
Rio n'avaient été que trois semaines au bord du Polar Tang et pourtant ils étaient là, en colère, ne pouvant pas pardonner le mal qui était fait à leur amie.
Law ne put s'empêcher de laisser échapper un sourire, sous l'ombre de son chapeau tacheté, face à la détermination de sa bande de pirates. Il amorça le premier pas en direction de la ville.
— Allons-y !
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NDA : Tiens j'ai fais une illu en couleur c'est fois-ci. Pourquoi ? J'étais motivé ! J'ai bien aimé dessiner la tête torturé de Rio, hin hin hin- >:V
À la base, j'avais pas prévu de donner autant de personnalité à Mor et Riky, ça devait être juste de sbire random qui l'amène à Silvas. Mais vu qu'il la suivent depuis 12ans et qu'ils font potentiellement partie du passé de Rio, je le suis que plus d'interactions entre eux serait intéressant.
« Weekly » ça veut dire « une fois par semaine » en réalité mais je trouvais que ca sonnait mieux que « Monthly » ahah :v
J'espère que le chapitre vous à plus ! N'hésitez à me donner un petit vote et/ou commentaire, ca me fait toujours plaisir ! :D
Btw j'ai très active niveau dessin One Piece dernièrement, je vous invite à aller voir mon Twitter : @/ _PolarPage, pour voir tous mes dessins ! o/