Chapitre 11

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Le chant des mouettes résonnait à travers la brise marine et le claquement des vagues contre les coques des bateaux.

Les navires accostaient un à un au port de Tónos, et les pêcheurs déchargeaient leur prise de la matinée, des thon argenté géants qui faisaient la réputation de l'île.

Le vacarme était présent à chaque recoin du quai. Autant les poissonniers avec leurs voix criardes que les marchands étrangers négociant les meilleurs prix.

Enfin, arrivé ! Quel enfer cette traversée. J'ai cru que j'allais crever trois fois ! S'essouffla un marin.
Pas pire que d'habitude. Soupira l'autre, plus chétif.

Les deux marins s'essuyèrent le front, étirant leur dos endoloris après avoir déchargé une bonne partie de leur cargaison.

En soulevant le dernier tonneau, le marin chétif le posa aussitôt. Le poids de celui-ci étant anormalement trop léger, il ouvra le couvercle d'un coup sec avec un pied-de-biche. Mais le referma aussitôt.

Quoi ? Il a un problème ce tonneau ? S'interloqua son collègue.
Y-Y'a une grosse bestiole dedans...
C'est pas... le tonneau que nous a filé la vieille foll-

Le tonneau bougea.

Ils se sautèrent dans les bras, effrayés, en émettant chacun un couinement aigu.

Leur capitaine, perplexe, s'approcha d'eux las de constater qu'il avait engagé de telles mauviettes sur son navire.

Tch, je vous jure.

Il soupira avec flegme et enleva le couvercle du tonneau, en imaginant quel gros rat avait bien pu manger sa marchandise.

Quand il laissa échapper un cri de stupeur, les deux marins hurlèrent en se cachant derrière une caisse.

Au fond du tonneau, des pupilles sauvages et fatiguées. Les bras et jambes couverts de boue sèche et de tâches de mûres. Une robe tellement imbibée de jus qu'elle en était devenue à moitié violette. Ses genoux égratignés avaient commencé à cicatriser malgré les croûtes de sang craquelées qui les décoraient toujours.

U-une gamine...

Cette gamine était évidemment Rio.

Elle plongeait son regard sombre et cerné dans les yeux, merlan frit, du capitaine. Gobant les dernières mûres au fond du tonneau dont elle s'était gavée toute la semaine de la traversée. Ses lèvres et son menton dégoulinaient de jus violet, comme un tigre sauvage qui viendrait de dévorer une proie fraîchement chassée.

Plus loin sur les côtes de Tónos, après avoir traversé plusieurs rangées de belles maisons en pierres blanches –décorées par endroits de mosaïque atypique–, et une large plaine, les marins et Rio arrivèrent au bord d'une falaise, où prônait l'église de l'île.

Après une course-poursuite des plus chaotique sur leur bateau, ils l'avaient ficelée tel un saucisson et s'étaient diriger ici suite au conseil d'un vieux marin.

Elle avait beau s'être débattu, s'être laissé traîner sur le sol comme un cadavre, ou agripper chaque tronc d'arbre qu'elle croisait avec ses jambes, la force du capitaine avait eu raison du peu d'énergie qu'il lui restait.

Il aurait pu la laisser filer à son gré dans la ville, mais il avait bien trop cœur à imaginer cette pauvre jeune fille seule face au monde à mendier au bord de la rue quelques écailles de poisson pour son dîner, ou pire encore lorsqu'elle aurait quelques années de plus.

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⏰ Last updated: Feb 18 ⏰

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