𝐄𝐌𝐏𝐈𝐑𝐄 𝐑𝐎𝐔𝐆𝐄 (SOR...

By venomglazed

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Le royaume d'Elaria est séparé en 3 terres. Depuis la guerre qui a déchiré l'univers, les populations qui vi... More

Introduction / note auteure / playlist
Prologue / Personnages / Map
1 ✧ Jeux au clair de lune ✧
3 ✧ Terre Royale ✧
4 ✧ Réponse et illusions ✧
5 ✧ Convoitée ✧
6 ✧ Compromis ✧
7 ✧ Le masque tombe ✧
8 ✧ Sceau D'Argent ✧
9 ✧ Combat au pouvoir ✧
10 ✧ Obsidienne ✧

2 ✧ Traque rouge ✧

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By venomglazed



– La rafle. Elle a commencé. Soufflait Seda entre ses dents en plantant son regard affolé dans le mien.

Mes mains se faisaient moites pendant que mon rythme cardiaque accélérait tous les battements. Je ravalais difficilement ma salive en essayant de rassembler mon esprit afin de nous sortir de là en vie. Comme à chaque fois.

Je rabattais la fenêtre en un mouvement de bras et posais mes mains de part et d'autre des épaules de Seda, laquelle commençait à verser des larmes tremblotante.

– Eh ça va aller, je susurrai, on l'a déjà surmonté plusieurs années, on fait comme d'habitude, tu réveilles Ayleen et je vous escorte chez Fakir. Vous restez dans son sous-sol jusqu'au lever du soleil et ne sortez sous aucun prétexte. Vous y trouverez des rations de quoi tenir au moins quelques jours en cas d'intempéries.

– Et toi, tu vas où pendant ce temps ? Elle marmonnait entre deux sanglots pendant que je réunissais des sacs et des capes qui nous camoufleront durant le trajet jusque chez Fakir.

– Je m'en vais retrouver Miray en ville. On restera à proximité de la garde royale pour traquer leurs pas et vous prévenir s'ils venaient à vouloir entrer chez Fakir. On s'organisera pour le guet et arriver au bon moment pour avoir le temps de fuir.

– Tu vas te faire tuer Zehra... Tu-

– Tais-toi par tous les cieux Seda, entre sous cette cape et fait ce que je te dis pour une fois. C'est ça ou la mort plus rapide. Autant choisir de se battre pour quelque chose que de rester les bras croisés à attendre le destin, tu ne crois pas ?

Elle me regardait sans un mot, caché derrière un mur de larmes qui dévalaient encore ses joues tandis que je lui glissais la cape par-dessus les épaules et tirais la capuche sur sa tête, une voix se faisait entendre depuis la pièce attenante. Je me figeais et plaquais ma paume contre les lèvres de Seda instinctivement pour empêcher tout son de sortir.

– Zehra ?

Je baissais les yeux pour apercevoir une petite silhouette se dessiner dans l'obscurité.

– Ayleen. Je soufflais en retirant ma main et libérant le souffle que je retenais. Je m'accroupissais au niveau de cette dernière qui émergeait de son sommeil en se frottant les yeux. Eh ma grande, bien dormi ?

– Où est-ce que vous allez ?

– C'est le grand jour, tu te souviens ? Le cache-cache !

– Je n'aime pas le cache-cache je veux jouer à autre chose. Elle marmonnait.

– Demain on jouera à ce que tu veux d'accord ? Aujourd'hui tu vas jouer à cache-cache avec Seda et Fakir dans ton équipe et c'est moi qui vous chercherai ! Allez enfile ça on va se mettre en route ma grande.

Elle cessait de protester encore trop dans les vapes tandis que je la donnais aux bras de Seda qui la couvrait de sa cape la rendant invisible vu de l'extérieur.

Je hâtai le pas jusque dans les chambres afin de remplir un sac de vêtements avant de passer dans la mienne ouvrir le coffre de maman et récupérer les carnets poussiéreux.

Je fourrais ces derniers dans mon sac personnel et m'habillai d'un large pantalon sombre ainsi que d'une chemise noire surmontée de ma cape et du foulard qui camouflait mon visage.

Je revenais dans la pièce ou Seda fixait la fenêtre. En bas des femmes se faisaient mettre à terre et hurlaient à l'aide. Leur voix résonnait dans tous les quartiers. Je tirais les rideaux d'un geste ferme et me tournais vers cette dernière en lui tendant son sac.

– Tu ne me lâches pas d'une semelle une fois dehors compris ? Tu ne parles à personne, pas même à quiconque pourrais te demander de l'aide où te ferait des supplications. Tout enfant seul, bébé abandonné devra être ignoré. Si on venait à croiser un garde, tu me laisses faire et tu sauves ta peau et celle d'Ayleen. Tu ne te retournes jamais. Pas même s'ils venaient à m'attraper. Et enfin tu gardes ça. Je lui tendais une petite boite en bois. Ne l'ouvre qu'une seule fois que vous serez à l'abri chez Fakir. Tout est bien enregistré ?

Elle hochait la tête sans un mot d'un air sonné.

– Bien. Allons-y.

─━━━━━━⊱❉⊰━━━━━━─

Dehors la nuit était plus sombre. Plus rouge. Je levais les yeux au ciel et remarquais l'aspect rougeâtre de la lune qui nous faisait face. Les bâtiments en terre battue qui ornaient les villes ressemblaient à des murs peints de sang et de larmes.

Les chemins terreux que nous empruntions étaient ornés de traces de pas qui avaient livrés bataille et lutte avant de s'être rendu aux gardes qui arpentaient les rues tel un serpent en recherche de proie. Nous étions les proies.

Le repas.

Au lieu de notes, de musiques et de rires des enfants qui jouaient dans les quartiers de sables la nuit, tout n'était que pleurs, cris et supplications.

Sous ma cape, j'avançais dans de sombres ruelles étroites, parfois jonchées de traces de sang sur les sentiers ou les murs de terre et de brique. La garde royale était plus nombreuse que les années précédentes.

Plus cruelle.

Un garçonnet hurlait à l'aide seul contre une façade de maison, perdu et sans repère. Ses yeux se posaient dans les miens et il avançait en sanglots, les bras tendus en ma direction.

Je ravalais difficilement ma salive et avançais en feignant l'ignorance. Mes yeux se brouillaient un instant avant que je ne reprenne le contrôle et ne ravale le sentiment amer qui m'envahissait peu à peu. L'enfant me suivait sur plusieurs pas en intensifiant ses supplications et hurlant le nom de sa mère dans sa langue natale avant qu'un chien de la garde royale n'en fasse son affaire. Ses cris mourraient dans tout le fracas sonore qui nous entourait.

Tout ce sang n'était qu'habitude et normalité aux yeux de la royauté. Rien ne changeait et ne changerait dans les décennies à venir si le peuple ne se soulevait pas.

Je tournais légèrement la tête avant de bifurquer dans une ruelle plus étroite pour vérifier la présence de Seda derrière moi qui emboitais le pas, Ayleen à ses bras. Je scrutais les alentours. Nous étions plus qu'à 700 mètres de la demeure de Fakir, mais le plus dur restait à être accompli.

Il fallait passer par le grand bazar.

La ruelle la plus fréquentée d'Ankatra.

Je serrais ma cape contre moi et m'arrêtais brusquement, entrainant le trébuchement de Seda contre moi. Je la rattrapais pendant que mes yeux suivait le spectacle horrifiant sous mes yeux. La cavalerie royale déambulait sur le bazar complétement détruit.

Je ne reconnaissais plus rien.

Ces stands autours desquels nous courrions avec mes sœurs dans le but d'arriver à temps pour le camion de glaces, ou encore celui de fruits où il suffisait de sourire au marchand pour qu'il nous distribue gratuitement quelques figues avant que maman n'insiste pour payer.

L'orchestre qui frottait les cordes de leurs instruments dégageant des notes aiguës, provoquant des rassemblements durant lesquels tout le monde dansait, riait mais surtout s'unissaient.

Les stands étaient pour la plupart mis à cendre, le feu brulait encore sur les derniers étals. Les épices jonchaient le sol, les pots en terre cuite n'étaient qu'éclats et bris. Le coin de l'orchestre avait été détruit, ne faisant de leurs instruments qu'un tas de cendre qui gisait au sol.

Des hommes et femmes suppliaient de cesser le feu mais les Vassals n'avaient que pour seule réponse celle du sang.

– On va mourir là-dedans. Sanglotait Seda en serrant Ayleen contre elle.

Je laissais planner un silence avant de répondre.

– Ils mourront avant. Je tirais d'un geste vif sur ma cape et emboitais le pas.

Mes jambes se mettaient en marche et je me retrouvais à présent face aux soldats sur leurs chevaux qui me toisaient sous leurs masques qui dissimulaient leur visages dans la pénombre.

– Eh ! Vous en avez oublié une ! Je criais en agitant les bras les jambes tremblantes.

Je pouvais sentir mon pouls cardiaque jusque dans mes oreilles. Ma respiration était saccadée et mes mains plus que moites. Je n'avais plus d'échappatoire si ce n'est que de m'échapper.

Les soldats se regardaient un instant avant d'hâter le pas et lancer leurs montures à ma poursuite. Je me maudissais déjà intérieurement de m'etre fourrée dans une embuscade pareille. Mes chances de m'en sortir se résumaient aux nombres de dents de l'homme alcoolisé de la taverne d'hier, ce qui équivaut à pas beaucoup ou quasi rien.

Mes jambes entraient seules en action et je me retrouvais s à traverser les rues de la ville à vitesse éclair. Pendant ce temps là, Seda aura le temps d'atteindre le sous-sol et de se mettre à l'abri avec Ayleen.

Et moi, je pourrais peut-être avoir l'honneur de choisir la matière de ma pierre tombale. Je pense préférer le marbre blanc. Ma respiration se faisait courte et je comprenais rapidement que je ne ferais pas long feu face à la cavalerie qui me rattrapait assez rapidement.

Dans ma course, mes yeux se levaient vers le ciel. Là-haut quelques chose m'attendait.

Les toits.

Je bifurquais dans une rue étroite qui ne permettait pas aux chevaux d'y entrer et m'engouffrait dans une cage d'escalier rouillée qui menaçait de s'écrouler à tout moment. Un soldat s'engouffrait lui aussi, rendant l'escalier encore plus fragile et mon arrivée sur les toits compromise.

L'escalier tanguait de plus en plus, me faisant douter de mon espérance de vie.

– Descend de là le bougre, une fois arrivé en haut tu vomiras toutes tes tripes à cause du vertige, épargne nous ce spectacle. Je hurlais en montant les dernières marches, suivie du garde qui n'en démordait pas.

Une fois avoir atteint les toits, la ville se dressait devant moi. Je posais mes mains sur mes genoux un instant pour reprendre mon souffle et mes esprits et j'étais un œil en bas. D'ici, toutes les lignes de la ville se dessinaient comme sur un schéma.

La ville était triangulaire. La rive l'entourait avec les autres royaumes de l'autre côté. Les grands monuments aux formes arrondies et voutes imposantes sortaient leurs têtes, rougies, elles aussi, par les reflets de la lune qui engloutissait toute la ville dans un bain de sang. Les bâtiments étant assez hauts, les ruelles se creusaient assez bas et d'ici, le spectacle était funèbre.

Les ruelles de sable, de terre et de pierre étaient à présent remplacées par du sang, la lune rouge et les soldats.

Le garde terminait sa montée des marches et je reprenais ma course. Je sautais de toit en toit, sentant mes jambes hurler à l'aide à chacun de mes atterrissages. Mes genoux me provoquaient un mal de chien à chacun de mes mouvements et me ralentissaient dans ma course alors que le garde prenait une longueur d'avance et frôlai à présent le tissu de ma cape qui virevoltait derrière moi. Le garde n'en démordait pas alors, je tentais mon dernier coup.

Passer des toits sur lesquels nous étions à ceux de l'autre cotés de la rue en un seul bon.

Rejoins-moi si tu peux la sauterelle.

Je prenais mon élan et poussais le sol en décollant à plusieurs mètres de hauteur, sentant mon cœur à mes pieds j'apercevais toute la rue défiler sous mes pieds. Et le mur s'éloigner.

Mes calculs de distance n'avaient pas été correctement effectués et maintenant, je me dirigeais droit vers le rez de chaussée avant que mon corps ne soit violemment retenu par une poigne ferme.

Je levais les yeux pour retrouver de longs cheveux rougeâtres et bouclés se balancer au vent et un sourire angélique m'accueillir.

– Suis-je au paradis ? Je demandais en riant, toujours suspendue à des mètres du sol retenue par la poigne de mon amie.

– Si tu me vois après la mort, ce serait probablement confirmation que tu es bien arrivé à destination. C'est-à-dire en enfer. Elle tirait mon bras et me remontait sur le toit d'un seul geste.

– Merci Miray. Je chuchotais, essoufflée en arrivant à peine à articuler, couchée sur le toit de l'immeuble tandis qu'elle se relevait et époussetait ses vêtements sombres en replaçant sa cape.

– Tu l'as énervé on dirait. Elle pointait en direction de l'autre côté de la rue ou le garde décochait une flèche, mais Miray était plus rapide et lui jetait sa dague qui fendait l'air, le blessant à la jambe. Ce dernier s'écroulait au sol dans sa course et se tordait en deux de douleur.

– MIRAY TU NE PEUX PAS LES BLESSER TU VAS NOUS ATTIRER DES-

– Qu'ils brulent en enfer, je les accueillerai. C'est déjà l'enfer ici. Qu'est-ce qui pourrait nous arriver de pire.

Je soufflais en me relevant.

– Où sont tes sœurs ? Elle me demandait en fronçant des sourcils.

– Comme d'habitude chez Fakir. Mais cette année, ils sont plus nombreux. J'ai peur que les fouilles soient plus renforcées et que la planque soit découverte.

– C'est l'ordre du prince cadet.

– Hein?

– Les fouilles. Le nombre plus conséquent de gardes, l'avancement de la date de la lune rouge. Tout ça, c'est ce malade qui l'a ordonné. Il l'a veut sa foutue permission de diriger les armées.

– Quelles armées ? Je demandais perplexe en plissant les yeux.

– Suis moi, on en parle dans un endroit plus sûr.

– Non, il faut qu'on aille chez Fakir pour surveiller les allers et venues des gardes afin de s'assurer qu'ils ne découvrent pas le sous-sol.

– Tu veux surveiller des meurtriers ? Sans plan ? Sans arme et sans protection. A deux ? Je comprend bien ?

Je soufflais bruyamment.

– Je te croyais plus perspicace Zehra. Tu es mon amie depuis notre tendre enfance et tu ne m'avais jamais autant fait rire.

– Tu ne rigoles pas là, tu te fous de moi. Je crachais froidement.

– De l'intérieur. Je suis morte de rire à l'intérieur, ça ne se voit pas ? Elle demandait avec un visage impassible.

– C'est bon. Je te suis et tu la ferme. On se dépêche je ne veux pas perdre du temps inutilement.

– Je te retrouve. Elle souriait en se laissant tomber du toit.

Je laissais sortir un cri de stupeur en accourant vers le vide et la retrouvais sur le balcon de l'étage en dessous.

- On ne les a pas encore décimés. Tu croyais que je partirais de ce monde avant eux ? Elle souriait.

– Je te déteste.

– Tout l'honneur est pour moi.

Je sautais pour la rejoindre et enjamber plusieurs balcons afin d'atteindre le sol et se précipiter pour atteindre le quartier bleu. Il est appelé ainsi pour ses façades bleues à présents noircies par la terre et le sang.

Nous nous précipitions pour entrer dans la petite demeure de Miray tandis qu'elle se laissait tomber sur son canapé je me dirigeais vers la cuisine pour sortir une poche de glace du congélateur et le posais sur mon genou douloureux et gonflé après tous ces atterrissages sur les toits.

– Alors ? Pourquoi la lune rouge est avancée de quasiment trois jours ? Je demandais en la rejoignant sur le divan.

– Le fils du roi. Ce salopard. Il encadrera la lune rouge cette année. Le Sultan lui a promis de le nommer général chef des armées s'il réussissait cette épreuve.

– En quoi consiste son épreuve ? Se la toucher sur son foutu trône en applaudissant les tortures sur place publique ?

– On ne sait pas trop. Les rumeurs courent comme quoi, il serait quelques peu fragiles aux yeux de sa famille. Ils veulent l'endurcir. Quoi de mieux que de mettre ce psychopathe à la tête de l'armée royale. Il a déjà bien débuté avec toutes ces boucheries humaines dans les rues.

– Ils ont déjà trouvé des personnes dotées de dons ?

– Ouais. Un apothicaire s'est révélé cartomancien et une marchande pouvant contrôler les quatre éléments. D'autres captures ont été faites dans les autres quartiers.

Elle sortait une cigarette de sa poche et l'allumait en me la tendant. Je tirais une taffe et laissait la fumée me bruler la gorge.

– C'est pas du tabac Miray.

– Il faut te détendre ma grande ! T'es toute crispée là.

– Mes sœurs sont dans un foutu sous-sol loin de moi avec des meurtriers qui traquent tout ce qui bouge et un foutu psychopathe orchestre tout ça. Tu as raison Miray. Détendons-nous.

– Quel est ton plan ?

– Aller au sous-sol.

– Et ? Demander gentiment aux sympathiques gardes s'il serait possible de pas torturer tes sœurs parce que t'es adorable et qu'ils doivent forcément être gentils eux aussi ? Je soufflais en laissant la poche de glace tomber par terre.

– Tu as blessé un garde. S'ils nous attrapent, on aura de toute façon aucune chance de s'en sortir.

– J'aurais du l'achever sur place cette ordure humaine. Quoiqu'il en soi, ils auraient trouvé n'importe quel prétexte pour nous saigner. Il faut réfléchir intelligemment. Tu as ce que je t'avais donné la dernière fois ? Demandait Miray en agrandissant son sourire un peu plus.

– Le gardénia en poudre ?

– Exact. File-moi la.

– Pas avant que tu ne me dises le suicide dans lequel tu nous amènes.

– Zehra donne-moi la foutue poudre. On va juste s'amuser un peu. J'ai toujours rêvé de participer à un bal masqué. Aujourd'hui ce sera masqué, mais sans bal.

─━━━━━━⊱❉⊰━━━━━━─

Sous la lune rouge qui scintillait sur nos têtes à 22 heures 23 précises, je me tenais derrière un mur de pierre tapissé de sang des victimes, mon sachet de gardénia en poudre à la main.

Miray accroupie à mes genoux, observait les alentours. Nous étions sur le quartier du grand bazar à présent quasiment mis à cendre. Nos capes étaient tirées et mon sourire s'agrandissait quelque peu quand Miray hochait doucement la tête me donnant le signal approbateur.

Je détendais mes épaules et tirait de ma poche l'élastique qui me servirait à envoyer le colis à destination. J'utilisais l'élastique pour y piquer de fines aiguilles trempées dans la poudre de gardénia. Je portais l'élastique au niveau de mon visage et l'arquais en fermant une paupière et m'immobilisait quelques instants. Mon souffle se faisait plus régulier et mes membres plus stables.

– Bonne nuit. Je soufflais en lâchant l'élastique en même temps que Miray.

Ma cible était atteinte un peu plus bas que la jugulaire et atteignait le sol assez rapidement. Le second garde rejoignait ce dernier et tombait comme un pion de sa monture. Tous deux sombraient dans un sommeil qui durerait jusqu'à deux heures maximum.

- J'ai toujours rêvé de faire ça. Riait Miray en dépouillant les gardes de leurs uniformes.

J'enfilais la veste de l'Ashaf les mains tremblantes. Tous mes membres étaient paralysés, mais continuaient de fonctionner machinalement.

On venait d'assommer deux foutus gardes de la royauté et étions en train d'usurper leur identité afin de passer inaperçues le reste de la soirée et pouvoir se rapprocher de la plaque au plus près possible sans risquer de finir comme peinture rouge aux murs des habitats de la ville. J'enroulais mon foulard autour de mon visage et enfilais le chapeau pour camoufler mes cheveux.

Enfin, je retirais l'épée du garde de son fourreau et l'observait quelques instants.

Elle était maculée du sang de nos peuples.

Je ravalais ma bile et donnais le signal à Miray qui terminait de se vetir de l'accoutrement des gardes. Nous les tirions toutes deux jusqu'à une ruelle sombre pour n'attirer aucune attention et n'éveiller aucun soupçon.

– Monte. M'ordonnait Miray.

– Quoi sur ce truc ? Je m'exclamais en désignant le cheval qui soufflait. T'es malade ou quoi il à l'air plus enragé que toi. Plutôt mourir.

– Aucun garde ne se déplace à pied idiote bouge-toi ou on va finir en rôti pour le diner du Sultan ce soir !

– Aides moi à monter, il fait quatre étages ! Je chuchotais en rassemblant tout mon courage et utilisais la force de bras de mon amie pour me hisser sur l'animal qui ne présentait aucune difficulté.

Miray prenait place sur la sienne et nous nous dirigions vers la rue principale. Les bateaux de la cavalerie royale accostaient sur le port, puis ils se réunissaient en grand nombre sur le boulevard principal pour décider de quelles unitées se partageaient quelles parties de la ville.

Nous approchions tandis que je serrais mes rênes entre mes mains de la foule d'Ashaf. Le colonel nous détaillait du regard quand nous arrivions et je crus perdre toute notion de respiration.

– Soldats. Rien à signaler ? Nous demandai le colonel.

Je prenais les devants et secouais la tête négativement. Son regard nous sondait quelques instants avant de hocher
la tête positivement.

– Bien. À présent nous allons arpenter les derniers quartiers pour les nettoyer de la vermine. Sortez tout ce que vous voyez, repérez ou suspectez. Rien ne doit être laissé. Toute maison vidée et les pierres scintillantes annoncent des anomalies chez ces ordures. Chaque anomalie sera conduite sur les bateaux. Menottés et attachés.

Tous les muscles de mon corps se crispaient. Nous n'étions rien à leurs yeux. Notre peuple ne servait qu'à servir de déversoir de sang.

Nous étions des anomalies.

Le futur commandant des armées nous considérait comme des intrus.

Je voyais Miray me jeter un regard furtif entre les tissus de son foulard. Je détournais le regard et me concentrais sur l'éparpillement des soldats. Le colonel m'assignait avec Miray au quartier attenant à celui de l'habitat de Fakir et de la planque de mes sœurs.

Je ne voulais qu'une seule chose ; c'était de m'assurer qu'elles étaient toutes deux et Fakir en vie et en bonne condition.

Nous mettions nos chevaux aux galops en direction du quartier auquel nous étions assignées pour brouiller les pistes. Une fois éloignées du groupe d'Ashafs, nous nous dirigions à toute vitesse vers le sous-sol. Ma monture galopait entre les ruelles faisant mon foulard s'envoler et mon cœur battre à tout rompre. Les rues étaient quasi désertes.

Rien n'avait été laissé.

Je ne leur laisserai rien non plus.

En arrivant au quartier principal, une voix nous interpellait de l'autre bout de la rue. Je ralentissais ma monture et y faisais face les mains moites, mais la détermination qui m'envahissait.

– Eh ! Vous n'êtes pas assignés à ce quartier tous les deux ! Qu'est-ce que vous faites ? Hurlait l'Ashaf.

– Je m'en occupe. Soufflait Miray.

Un second Ashaf rejoignait celui qui nous interpellait. Ce dernier nous faisait affront de son mètre quatre-vingt-dix et son regard noir.

– Après je peux aussi te laisser l'honneur de t'en occuper. Chuchotait Miray.

– Fait chier. Occupe-toi de mes sœurs. Met les en sécurité.

– Qu'est-ce que tu comptes faire là Zorro ? Tu te fou de moi ?

– Vas y Miray je te dis. Je crachais avant de descendre de ma monture pendant qu'elle mettait son cheval au galop et disparaissait dans les rues d'Ankatra.

Je plongeais ma main dans ma botte et en ressortais ma dague que je faisais tourner entre mes doigts. Je me débarrassais de l'épée que je laissais tomber par terre sous les yeux interrogateurs des deux Ashafs.

– C'est quoi ton problème ? Crachais l'un d'entre eux.

– Tout ça. Tout ça, c'est un foutu problème. Assez de conversation, passons à la danse. On est masqués, autant improviser le bal messieurs ? Pas d'invitation ?

L'un des Ashafs s'apprêtait à hurler à l'intrusion pour prévenir le reste de ma présence au cœur de la cavalerie. Avant qu'il ne puisse prendre parole, ma dague traversait l'air pour venir se loger dans sa trachée. Le liquide rouge emplissait sa bouche et causait son étouffement.

Le corps du soldat s'écroulait et heurtait le sol dans un silence de mort.

Son cheval s'échappait en hennissant. Je n'entendais plus rien. Seulement un bourdonnement sourd emplissait mes oreilles. Mes jambes devenaient en coton et mon rythme cardiaque beaucoup trop rapide pour que mon corps puisse suivre la cadence. Je me laissais tomber au sol et m'asseyais et tailleur un moment en tentant de récupérer mes esprits. Plus aucun son ne me parvenait et ma vision se faisait de moins en moins nette.

Je fixai mes mains et les retournaient plusieurs fois afin de vérifier la réalité. Je revoyais la dague fendre l'air et se loger dans la peau du garde avant qu'il ne s'écroule. La scène était comme un disque rayé implanté dans mon esprit qui tournait durant des secondes. Des minutes. Des heures. Ou peut être même des jours.

Toutes mes notions de temps ou de perception venaient de s'envoler en un geste. Je voyais son corps au sol contre le ventre. Ses épaules ne se soulevaient plus, m'indiquant bien qu'il ne faisait plus parti de ce monde. Et j'avais contribué à ça. Je ne valais peut-être pas mieux que ces meurtriers.

Un gout amer s'emparait de ma bouche.

Celui du sang.

J'essuyais rapidement mes lèvres, mais n'y trouvait aucune trace de sang. Mon esprit me jouait des tours et mon cerveau s'embrumait à mesure que je fixais le cadavre entouré d'une marre de sang dans lequel il s'était étouffé.

Un meurtre.

Je venais de commettre un meurtre.

De sang froid.

L'Ashaf plus imposant descendait de sa monture en se dirigeant vers moi d'un pas rapide. Je me baissais pour récupérer l'épée que j'avait laissée au sol malgrès le fait que je ne sache pas m'en servir, je l'envoyais valser en sa direction mais aussitôt il m'en débarrassait.

– Ne me forcez pas à vous faire rejoindre votre ami. Je soufflais en reculant tandis qu'il avançait, je ne trouvais rien de mieux à faire que prendre fuite.

Le bougre n'arriverait certainement pas à suivre la cadence. Vu sa taille j'espérais qu'il se cogne contre un foutu pont ou bazar dans le genre. Plus mes membres s'activaient et plus mes poumons brulaient ma gorge.

J'apercevais le port d'Ankatra.

Nous étions arrivés au port ou le bateau des soldats de la royauté flottait sur l'eau sombre. Il se dressait de sa taille imposante devant moi pendant que je me retournais pour voir si le soldat s'approchait, je trouvais la bonne surprise de le voir plus qu'à quelques mètres.

Dans un élan, je sautais les barrières et m'engouffrait dans le bateau, le soldat à mes trousses. À l'intérieur tout était sombre.

J'étais dans la cale et avançait en essayant de calmer ma respiration, les mains en avant pour éviter de me cogner. Je n'avais à présent plus aucun plan si ce n'est sauver ma peau. Je réfléchissais même à sauter à l'eau.

Si je n'ai pas réussi à lui échapper en combat ou en course, peut-être qu'en nage, j'y parviendrais. Sauf que je ne savais pas nager non plus. En trottinant dans la cale, je tombais sur les canons.

Un mur entier était tapissé de tuyaux à canons. Essoufflée, j'observais les alentours. Des sacs lourds étaient disposés au sol. J'y plongeais la main précipitamment dans le noir complet et mon sourire revenait.

De la poudre à canon.

– J'ai toujours voulu faire un feu de joie sur l'eau.

Je prenais des poignées entières de poudre et l'étalait dans toute la cale du bateau. Je jetais la poudre à chaque parcelle de ce foutu bateau que je m'apprêtais à mettre à feu et à cendre comme ils le faisaient avec nos villes et peuples.

Ils mourraient avec nous.

Une fois la poudre assez éparpillée, je plongeais ma main dans la poche de ma cape en respirant fortement et jetant des regards aux alentours beaucoup trop obscurs pour essayer d'apercevoir le soldat s'il venait à me retrouver.

Un étrange silence qui n'annonçait rien de bon planait dans la cale du bateau qui tanguait au rythme des vagues qui tapaient contre la paroi. Mes mains étaient moites et tremblantes et mes jambes de coton menaçaient de me lâcher à tout moment.

L'objet métallique touchait enfin ma paume dans ma poche. Je le retirais, enclenchait la pierre et la flamme s'élevait du briquet. Sans perdre une minute, je jetai la flamme au sol, mais elle n'atteignait pas sa cible.

Elle remontait.

Elle remontait dans une poigne de main ferme.

La flamme disparaissait, la main qui l'a tenait refermait le briquet d'un geste vif.

- Je le savais. Il n'y a pas comme deux pour vouloir introduire la garde royale puis réduire le bateau royal à cendre. Audacieux. Mais pas assez. Échec et mat.



─━━━━━━⊱❉⊰━━━━━━─


HI GUUUUUYS !

OMG je suis si contente de revenir avec ce deuxième chapitre qui m'a pris deux semaines, entre l'écriture, la correction et la réécriture je suis contente de ne pas avoir abandonné, il est riche en rebondissements je me l'avoue mais il va mener à poser le contexte,

Beaucoup de questions se posent sur le fonctionnement des royaumes, les nombreux personnages pas encore apparus et bien d'autres et je compte y répondre petit à petit :)

Et ce dernier dialogue alors ? mouahahaaa les choses sérieuses vont commencer

gros love sur vous mes britneys spears <3

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