Le dernier jour de l'année, j'étais dans la salle de bain de notre dortoir avec les autres filles et je faisais le tri dans mon tiroir bien trop encombré.
– Ella, tu prends ton boucleur ? a demandé Daphné en vidant l'étagère réservée aux objets de chauffe.
– Non, j'en aurais pas besoin cet été, et si c'était le cas, j'en achèterais un deuxième, ai-je répondu, les yeux rivés sur le miroir.
– A quoi tu penses encore ? a soupiré Pansy en voyant mon air pensif.
– Je me ferais bien des mèches roses.
Bien évidemment, Pansy aimait la tradition et l'élégance alors l'idée que je me fasse des cheveux roses lui provoqua une grimace de dégout qui fit rire Daphné et Tracy.
– Est-ce qu'un jour vous arriverez à vous entendre toutes les deux ? a lancé Millicent.
– Non ! avons-nous répondu en chœur avec Pansy.
Au fond, on s'appréciait... A notre façon. C'est-à-dire en passant notre temps à nous insulter.
– J'arrive pas à croire que le vieux fou ait nommé un loup-garou comme prof de défense contre les forces du mal, s'est exclamé Pansy, qui n'avait visiblement aucun instinct de survie.
– En fait c'est quoi le problème avec les loups-garous ? a demandé Tracy. Du moment qu'on les croise pas un soir de pleine lune, on s'en fout non ?
– Et moi qui commençait à perdre espoir en l'humanité... ai-je soufflé, soulagée d'entendre ce genre de réaction.
– Ouais enfin c'est un coup à ce que l'année prochaine il embauche un vampire, a commenté Millicent.
– Alors ça ce serait trop cool ! a lancé Daphné, toujours optimiste.
Quelques minutes plus tard, je faisais enfin le tri dans les affaires que je gardais et celles que j'emportais et celles que je gardais ici pendant les vacances.
Bien évidemment, ma première pensée a été que je devrais peut-être ralentir mes achats de livres et de cassettes audios avant de me dire que je ferais sans doute mieux d'investir dans un objet magique extensible qui me permettrait d'en racheter encore plus.
Quelques heures plus tard, après avoir rangé mes affaires dans notre compartiment, je l'ai quitté et je suis entrée dans celui que partageait Cédric avec son ami énervant et j'ai lancé sa batte à ce dernier qui l'a réceptionné avec une étrange souplesse.
– Merci de me l'avoir prêté.
– Je te l'ai pas... a-t-il commencé. Comment tu l'as eu ?
J'ai lancé un regard à Cédric qui a ensuite regardé son ami et je leur ai souri avant de dire :
– Je vous laisse vous expliquer... Bonnes vacances !
Puis j'ai refermé la porte pour repartir dans mon compartiment.
– Je suis allée voir le professeur McGonagall ce matin, juste avant le petit déjeuner, et j'ai décidé d'abandonner l'étude des Moldus, nous a informé Hermione.
– Mais tu as eu ton examen avec trois cent vingt pour cent de bonnes réponses !
– Je sais, a soupiré Hermione. Mais je ne pourrai pas supporter une autre année comme celle-ci. Sans l'étude des Moldus et la Divination, j'aurai de nouveau un emploi du temps normal.
Elle s'est tournée vers Harry qui regardait le château disparaître derrière une montagne en pensant qu'il faudrait attendre deux mois avant de le revoir...
– Ne sois pas triste, Harry, dit Hermione.
– Je pensais aux vacances, a répondu Harry.
– Vois le bon côté des choses, suis-je intervenue en sortant mon livre spécial trajet.
Bien sûr, les trois autres se sont tournés vers moi, intrigués. Puis, comprenant qu'ils ne pouvaient pas lire dans mes pensées, j'ai ajouté :
– Et bien ton parrain est le criminel le plus recherché de Grande-Bretagne, s'ils sont pas sympas avec toi, t'auras qu'à les menacer de tout lui raconter.
– Tu es machiavélique ! s'est exclamé Harry avant que nous n'éclations tous de rire.
– Moi aussi, j'ai pensé aux vacances, dit Ron. Harry, il faut que tu viennes à la maison. J'arrangerai ça avec mes parents et je t'appellerai. Je sais comment me servir d'un fêlétone, maintenant.
– Un téléphone, Ron, a rectifié Hermione. Tu devrais étudier les Moldus, l'année prochaine...
Ron ne lui répondit pas.
– Et toi Ella, tu vas faire quoi ?
– Oh, je vais squatter le chaudron baveur, c'est assez sympa finalement, on est au milieu, entre le monde sorcier et le monde moldu.
– Tu devrais venir à la maison, papa en serait ravi ! Il a adoré ta leçon sur la musique moldu, je suis sûr qu'il aimerait en apprendre plus, et puis ce sera plus sympa que d'être seule, a proposé Ron.
– C'est super sympa mais je compte suivre les cours d'été à Oxford, puisque je peux pas y aller l'année, autant que je profite de la session d'été, ai-je expliqué. En plus j'ai un intermédiaire là-bas qui était historien dans le monde magique il y a genre 50 ans, donc qui maîtrise la poudre de cheminette !
– Je comprends toujours pas pourquoi tu insistes pour te rajouter tant de travail ! a lancé Ron.
– Je pense que je ferais pareil en sortant de Poudlard, dit Hermione à son tour. C'est toujours intéressant d'avoir un pied dans les deux mondes.
– Pour ma part, je préfère largement me contenter des cours de Poudlard, c'est bien assez de travail ! a lancé Harry.
– Entièrement d'accord ! a confirmé Ron avant d'ajouter : Au fait ! La coupe du monde de Quidditch, cet été ! Qu'est-ce que vous en dites ? Venez à la maison et on ira ensemble ! Mon père s'arrange toujours pour avoir des billets par le ministère.
Cette proposition eut pour effet de remonter sensiblement le moral de Harry. Avec Hermione nous avons échangé un regard entendu, n'étant pas de grandes fans de Quidditch, mais cela pouvait être une aventure sympa et surtout, ça nous donnerait une occasion de nous moquer de nos garçons.
– J'imagine que les Dursley seront ravis de me laisser partir... Surtout après ce que j'ai fait à la tante Marge...
Vers la fin de l'après-midi, alors que j'étais plongée dans un livre, quelque chose voleta jusqu'à notre compartiment. Une petite boule grise venait d'apparaître derrière la vitre. J'ai tourné la tête pour mieux voir : c'était un minuscule hibou qui portait deux lettres beaucoup trop grandes pour lui et un petit paquet. Le hibou était si petit qu'il avait peine à voler dans les remous d'air provoqués par la vitesse du train. Harry s'est hâté d'ouvrir la fenêtre et a tendu le bras pour attraper l'oiseau. On aurait dit un Vif d'or en peluche. Le hibou laissa tomber les lettres sur la banquette et se mit à voleter d'un air joyeux dans le compartiment comme s'il était très fier d'avoir accompli sa mission. Il fallait bien reconnaître qu'il était particulièrement mignon. Hedwige fit claquer son bec en signe de désapprobation tandis que Loki observait d'un œil ensommeillé la scène, se fichant bien de ce qu'il pouvait se passer autour de lui. Pattenrond se leva et suivit l'oiseau de ses grands yeux jaunes. Ron attrapa alors le hibou pour le protéger. Les lettres étaient adressées à Harry et moi. J'ai pris la mienne et l'ouvrit pour la lire en silence tandis qu'Harry s'exclamait :
– C'est Sirius !
– Quoi ? se sont écriés Ron et Hermione d'une même voix. Lis-nous ça !
Cher Harry,
J'espère que cette lettre te parviendra avant que tu n'arrives chez ton oncle et ta tante. J'ignore s'ils ont l'habitude de recevoir du courrier par hibou postal. Buck et moi, nous nous cachons. Je ne te dirai pas où, au cas où cette lettre tomberait en de mauvaises mains. Je ne sais pas si on peut faire confiance à ce hibou, mais c'est le seul que j'aie trouvé et il avait l'air très content de faire ce travail. Je crois que les Détraqueurs me cherchent toujours, mais ils ne me trouveront jamais ici. Je vais m'arranger pour que des Moldus m'aperçoivent bientôt très loin de Poudlard afin que les mesures de sécurité du château soient levées. Il y a quelque chose que je n'ai pas eu le temps de te dire quand nous nous sommes vus. C'est moi qui t'ai envoyé l'Éclair de Feu...
– Ah ! dit Hermione d'un air triomphant. Tu vois, je te l'avais dit que c'était lui !
– Oui, mais il ne l'avait pas ensorcelé, a fait remarquer Ron. Aïe !
Le minuscule hibou qui hululait allègrement dans la main de Ron lui avait mordillé un doigt dans ce qu'il pensait être un geste d'affection.
C'est Pattenrond qui a apporté le bon de commande à la poste de Pré-au-lard. J'ai indiqué ton nom, mais je leur ai dit de prendre l'or dans le coffre numéro 711 de Gringotts. C'est le mien. Considère qu'il s'agit d'un cadeau de ton parrain pour tes treize ans.
Je voudrais aussi te demander pardon pour la frayeur que j'ai dû te faire le soir où tu as quitté la maison de ton oncle. Je voulais simplement t'apercevoir un bref instant avant de continuer ma route vers le nord, mais je crois bien que tu as eu peur en me voyant. Je t'envoie également quelque chose qui devrait te faciliter la vie à Poudlard, l'année prochaine. Si jamais tu as besoin de moi, écris-moi, ta chouette saura où me trouver.
Je t'écrirai bientôt une autre lettre.
Sirius
Harry s'empressa de regarder dans l'enveloppe et y trouva un autre morceau de parchemin sur lequel était signé une autorisation de sortie à Pré-au-lard.
– Ça suffira pour Dumbledore ! dit Harry d'un ton joyeux. Il y a un P.S...
J'ai pensé que ton ami Ron aurait peut-être envie de garder ce hibou, puisque c'est à cause de moi qu'il n'a plus de rat.
Ron écarquilla les yeux.
Le minuscule hibou continuait de hululer avec ardeur au creux de sa main.
– Le garder ? a répété Ron, indécis.
Il examina attentivement l'oiseau pendant un moment puis, à la grande surprise de Harry et d'Hermione, il le tendit à Pattenrond pour que celui-ci puisse le flairer.
– Qu'est-ce que tu en penses ? a demandé Ron au chat. Un hibou, ça te va ?
Pattenrond se mit alors à ronronner.
– Pour moi, c'est d'accord, dit Ron, d'un air ravi. Ce hibou est à moi.
– Et toi Electra, il a écrit quoi dans ta lettre ? a demandé Harry.
– Désolée, c'est privé, ai-je répondu
En effet, ma lettre n'avait pas vraiment le même ton...
Electra,
Quand j'avais ton âge, je ne cessais de me répéter que je ne serais jamais comme mes propres parents, que je ferais mieux, et malheureusement, tu as raison sur un point : j'ai échoué, et en beauté, presque autant que la fois où Servilus a essayé de se laver les cheveux en sixième année (je doute qu'il n'ait un jour réitéré l'expérience).
Je sais ce que c'est de grandir dans une famille brisée, ou pas de famille du tout, et j'espérais vraiment que tu n'aies pas à vivre ça, mais on ne peut pas changer le passé, alors tout ce que je peux faire, c'est te promettre de changer les choses, d'essayer de faire mieux. Pour des raisons évidentes, je dois rester loin pour le moment, mais l'année prochaine, j'espère pouvoir m'arranger pour revenir.
Et j'espère bien pouvoir veiller sur toi comme j'aurais dû le faire ces douze dernières années.
Et peut-être qu'un jour, je te raconterai les terribles secrets de notre famille, mais je ne doute pas qu'un petit génie comme toi les découvrira avant.
Sirius.
J'ai mis de côté la lettre pour ouvrir le paquet qui accompagnait la lettre, à savoir un carnet de notes vierge en cuir et relié.
J'ai souri.
Peut-être que ce cadeau coûterait moins cher qu'un Éclair de feu, mais au moins il me serait utile pour l'année prochaine.
C'est donc d'excellente humeur que notre petit groupe franchit la barrière magique du quai 9 ¾.