Même si Harry est sorti de l'hôpital pour passer des jours plus paisibles ailleurs qu'entre quatre murs blancs, les rendez-vous avec le professeur, eux, sont toujours aussi fréquents. Une fois par semaine, Harry doit aller faire un bilan complet afin de voir comment avance la maladie. Je ne rentre pas en général, je préfère l'attendre dans le couloir. Les cours reprennent dans quelques jours, mais je n'ai pas la force d'y aller. Je ne peux pas me résoudre à passer des heures entières assis sur une chaise alors que le temps nous est compté. Le professeur a dit qu'il lui restait deux mois à vivre, trois dans le meilleur des cas, mais rien n'est sûr. Ça pourrait être plus, comme moins. Personne ne le sait et en sachant que Harry peut partir à tout moment, je refuse tout simplement de le laisser seul. Même si on ne fait pas grand chose de nos journées, au moins on les passe ensemble, de la manière qu'on le veut. Les examens commencent la semaine prochaine, et j'ai révisé, mais eux aussi, j'ai décidé que je ne les passeraient pas. Toute ma vie est centrée sur Harry, et rien d'autre.
La porte s'ouvre et je me lève d'un bond, prêt à retrouver Harry, mais c'est le professeur qui sort de la pièce. Toujours dans sa blouse blanche et avec ses lunettes rondes, une impression de déjà-vu s'empare de moi. Je sens mon ventre se serrer. Il veut nous parler à tous les deux, ça ne présage rien de bon. Alors sans un mot j'entre dans son bureau et Harry me fait un sourire. Il est assis sur l'une des deux chaises, je me mets à côté de lui en pressant délicatement ma main sur son épaule. Je n'arrive pas à déchiffrer l'expression de son visage. Ses traits sont tirés, il n'est jamais reposé, mais il sourit légèrement. Il a l'air en paix, et j'ai le cœur au bord des lèvres.
'Harry m'a dit que vous voulez lui faire découvrir l'océan', commence le médecin de son ton posé.
'Oui', je réponds simplement. 'Enfin, si c'est possible... Je voulais vous en parler.'
'Je pense que c'est une excellente idée.'
'Vraiment ?!'
'Absolument. L'air marin est bénéfique pour de nombreuses pathologies, alors pourquoi pas pour Harry ?'
Je ne m'attendais pas à ce genre de réponse, et je suis tellement heureux d'entendre ces mots que je me tourne vers Harry, les yeux brillants. Il n'avait pas cessé de me regarder depuis que je suis entré dans la pièce et le simple fait de voir son visage s'illuminer me donne envie de pleurer. Il est heureux, ça se voit.
A peine sorti du bureau du professeur, je me mets à courir dans le couloir tout en poussant Harry dans le fauteuil roulant. Je suis trop excité pour me contenir, alors je cours manquant de glisser dans un virage, ce qui fait rire Harry. Une fois dehors, je me mets à courir de plus belle jusque dans le parc de l'hôpital. Harry me demande de ralentir, ce que je fais avant de m'arrêter pour lui faire face. Je me mets à genoux devant lui et je l'embrasse tendrement. Il a les joues rouges, comme si c'est lui qui venait de courir. Il rigole tant il est à bout de souffle et pendant une seconde je m'en veux, je ne veux pas qu'il se sente mal par ma faute, mais il tousse et ses deux fossettes creusent ses joues. C'est la première fois que je l'entends rire comme ça. Vraiment rire. Et ça fait un bien fout.
'Tu vas enfin voir l'océan !' je m'exclame.
'Oui', il sourit avec ses fossettes.
'On part demain ! Oui, c'est ça, je veux qu'on parte demain, sans plus attendre !'
Je suis tellement heureux que je tourne en rond autour de Harry, en lui disant tout ce que l'on peut faire à la mer. Je sais que c'est encore l'hiver et qu'il fera sans doute froid, mais j'ai hâte qu'il connaisse la sensation des pieds qui s'enfoncent dans le sable.
'Louis !'
Sa voix me sort de ma rêverie, et je m'arrête de tourner en voyant son air bien trop sérieux.
'Louis, doucement, s'il-te-plaît.'
'Ça ne va pas ?'
'On ne peut pas partir si vite, et tu le sais. Tu as entendu ce que le professeur a dit.'
J'ai bien entendu ce qu'il a dit, mais je n'ai voulu garder que ce qui m'intéressait de la conversation, c'est-à-dire le feu vert pour partir. Sauf que ce n'était pas le plus important. C'est la santé de Harry qui compte avant tout, et les recommandations du médecin ont été claires. Harry doit faire une prise de sang et d'autres bilans sanguins dans quelques jours pour s'assurer qu'on ne prend pas trop de risques en partant à quelques heures de la maison. Alors même si le professeur est d'accord pour que Harry prenne quelques jours de vacances, ce sont les résultats aux examens qui détermineront si l'on peut réellement partir.
'Oui bien sûr que j'ai entendu.'
Je pose mes lèvres sur les siennes et il me rend mon baiser. On reste comme ça pendant quelques secondes, histoire de se retrouver après toutes ces émotions, puis je me relève.
'Aller, je te ramène à la maison.'
Le soir, Harry refuse de manger et veut seulement dormir. Je le trouve bien plus pâle que d'habitude et il n'arrive pas à se réchauffer, mais il me soutient qu'il est juste fatigué après avoir passé du temps dans les couloirs de l'hôpital. Je l'aide à enfiler l'un de mes pulls avant de se mettre dans le lit et j'allume les guirlandes lumineuses, celles que l'on a récupérées de son ancienne chambre d'hôpital. Je l'embrasse sur le front et je vais dans la cuisine pour dîner avec mes parents. Ce n'est pas la première fois que Harry ne mange pas avec nous le soir, il n'a plus beaucoup d'appétit, mais quelque chose m'inquiète. A table, j'en profite pour discuter avec mes parents de notre week-end au bord de mer que je prépare pour Harry et ils ne tiennent pas à ce que l'on parte seuls.
'Ce n'est que trois jours, papa.'
'Je l'entends Louis, mais pour Harry c'est un gros voyage. Il est épuisé, tu le sais mieux que personne.'
'Si tu tiens à partir seul, ce n'est que pour une nuit', intervient ma mère.
Au fond de moi, je sais qu'ils ont raison mais j'avais promis à Harry qu'on ne partirait que tous les deux et je ne veux pas trahir ma promesse. Je ne veux pas le trahir, lui, même si c'est pour sa santé. Je sais comment il fonctionne, je suis parfaitement capable de prendre soin de lui. D'ailleurs, personne ne prend soin de lui tel que je le fais.
'Vous partez à quelle date ?' demande mon père après avoir donné raison à ma mère.
'La semaine prochaine, si ses examens sont bons.'
'Tu te moques de nous j'espère, Louis. Tu as tes premiers devoirs la semaine prochaine et il est hors de question que tu n'y ailles pas. On en avait discutés !' Le ton de ma mère est catégorique, et ça me met carrément en colère.
'Bordel maman, tu vas un peu arrêter avec ces cours à la con ?!' j'explose. 'Quand est-ce que tu vas comprendre que dans même pas deux mois Harry ne sera plus là ? Il va mourir maman, alors excuse moi si j'ai autre chose en tête plutôt que de vouloir réussir mon année scolaire !'
A ces mots, je me lève de table et je pars dans ma chambre pour retrouver Harry, sans écouter ma mère qui me demande de revenir dans la cuisine. Je claque la porte de ma chambre avec fracas lorsque je réalise que Harry dort dans mon lit et que tout ce boucan a dû le réveiller. Il fait sombre et je me dirige vers mon lit à pas de loups, jusqu'à sentir son pied sous la couette.
'Harry ?' je murmure.
Mais je n'ai aucune réponse, alors je m'approche pour l'embrasser doucement lorsque je sens quelque chose de mouillé sur mon visage. Je porte ma main à l'endroit mais je ne distingue rien, alors j'allume la lumière et mon cœur cesse littéralement de battre lorsque je me rends compte que Harry est inconscient et qu'il saigne du nez. Il y a du sang partout. J'appelle mes parents en criant, je leur hurle d'appeler une ambulance et je tente de réveiller Harry, mais il ne répond plus de rien. Je tremble tellement que je n'arrive même pas à me relever lorsque mes parents arrivent dans la chambre et les larmes brouillent ma vue. Je n'ai aucune idée de combien de temps il s'est écoulé entre le moment où ma mère a appelé les secours, lorsqu'ils sont arrivés et quand ils ont transportés Harry jusque dans le camion. Ils ne voulaient pas que je monte avec lui, mais je me suis accroché à sa main, si bien qu'ils n'ont pas eu le choix. Ma vision est flou et j'appelle Harry pour qu'il se réveille, mais rien n'y fait. J'entends les secours parler entre eux mais je ne comprends rien à ce qu'ils racontent. J'essuie les larmes qui coulent à flot d'un revers de manche et je m'aperçois que mon pull est plein de sang d'avoir tenu Harry dans mes bras. Mais je m'en fiche. Tout ce que je veux, c'est qu'il se réveille. Lorsque l'ambulance arrive aux urgences, le brancard sur lequel repose Harry inconscient s'engouffre en une fraction de seconde à l'intérieur, et je n'ai pas le temps de les suivre. Je ne sais pas où ils l'amènent, ni ce qu'ils vont lui faire. Je suis juste dehors comme un con, ne comprenant pas ce qu'il a bien pu arriver cette dernière demi heure. Je me laisse tomber contre le mur des urgences et j'allume une première cigarette, avant d'en enchaîner trois autres à la suite. Je n'avais plus fumé depuis que Harry est entré dans ma vie parce que je ne voulais pas risquer de le rendre encore plus malade, mais au final ça n'a rien changé puisqu'il est quelque part dans ce foutu hôpital, complètement inconscient. Au moment où j'allais allumer une autre cigarette, mes parents arrivent en courant et ma mère se jette sur moi pour me prendre dans ses bras. Elle a l'air terrifiée et si au début je me débats de son étreinte, je finis par m'écrouler complètement. Je pleure à en avoir mal au ventre et je m'accroche à sa veste de toutes mes forces. Toute la pression que j'ai encaissé ces derniers mois, toute l'inquiétude, la peur et la tristesse que j'avais enfoui ressortent enfin. Je me suis toujours montré fort et positif devant Harry pour qu'il se sente le mieux possible, mais je n'avais pas remarqué à quel point ça me bouffait de l'intérieur. Et ne pas savoir ce qu'il lui arrive me rend malade. Il ne peut pas partir comme ça. Pas maintenant. Pas avant de l'avoir amené voir la mer. Je refuse qu'il me laisse seul dans cette vie pourrie et remplie d'injustice. Pas sans me dire au revoir. Je me sens brisé à l'intérieur et je suis à bout de forces. Ma mère me tient toujours contre elle, faisant de son mieux pour m'apaiser, mais rien ne marche. C'est la fatigue qui m'oblige à me calmer après ce qui semble être une éternité, et la première chose que je murmure entre deux sanglots est 'je ne veux pas qu'il meure...' et les yeux de ma mère deviennent humides à leur tour. Elle me serre de nouveau contre elle, ne trouvant pas les bons mots pour ce genre de phrase. Il n'existe pas de mots justes pour ça. Je ne sais pas quelle heure il est, mais je suis frigorifié après avoir passé tout ce temps dehors et c'est mon père qui nous incite à rentrer pour nous asseoir sur les fauteuils de la salle d'attente. Je suis crevé et mes yeux se ferment tout seuls, mais je lutte pour resté éveillé. A chaque fois qu'un médecin ou une infirmière arrive, mon cœur s'arrête de battre, espérant que quelqu'un vienne me donner des nouvelles de Harry. Sauf que cette personne n'arrive jamais...
Dehors, le soleil commence à se lever et ma mère s'est endormi contre l'épaule de mon père. Si l'on s'engueulait quelques heures plus tôt et que j'étais en colère après eux, le fait de les voir comme ça, ici avec moi pour me soutenir et pour prendre soin de Harry me serre le cœur. Je m'en veux de leur faire vivre des choses pareilles. Je me sens sale et le sang séché sur mon pull me donne la nausée, alors je me lève après avoir dit à mon père que j'ai besoin de me dégourdir les jambes. Je déambule dans le couloir des urgences pour trouver un ascenseur qui m'amène au neuvième étage. Lorsque les portes s'ouvrent, je me sens comme mis à nu. Complètement. Depuis que Harry est venu à la maison, je n'étais pas retourné à cet étage dans lequel j'ai passé plusieurs mois. Je n'ai pas revu les enfants dont je m'occupais, ni même les infirmières avec qui je travaillais. J'ai absolument tout laissé tomber parce que mon monde ne tournait qu'autour de Harry. Je lui ai consacré toute ma vie, toute mon énergie, parce qu'il est ce que j'ai de plus précieux sur cette terre. Alors revenir là et savoir qu'il n'y est pas me donne l'impression de ne plus être à ma place. Sans lui, je n'ai plus ma place nul part. J'avance sans réfléchir à travers les couloirs que je connais par cœur et je croise quelques infirmières, mais je les ignore. Je ne veux voir personne, et encore moins leur parler. Une partie de moi s'est éteinte quand j'ai trouvé le corps de Harry inanimé dans mon lit. Je m'éloigne peu à peu du bruit constant des bips pour finir par être enveloppé par le calme plat. Ce n'est pas un calme rassurant ou apaisant. Juste du calme. Pas un seul bruit. Je m'avance jusqu'au milieu de l'immense espace et je m'allonge à même le sol. Je suis juste en dessous du toit en pyramide, et je regarde le ciel. Il a des teintes rosées, violacée à quelques endroits, virant dans un dégradé de bleu au dessus. Le soleil se lève à peine et la lune est toujours visible dans un coin. On dit que le soleil se lèvera toujours, même après la pire des tempêtes. Que la lumière triomphe face à la noirceur de la nuit. On dit que tout ira mieux après une nuit de sommeil ou encore que la nuit porte conseil. Mais personne ne dit rien quand la tempête s'abat sur notre tête avec une telle force que ça nous anéanti et qu'elle ne s'arrête jamais. Et si le soleil ne se levait plus jamais ? Harry aimerait la couleur du ciel ce matin. Mais il n'est pas là pour le voir et ça me tue. Je sens une boule se former dans ma gorge et je me lève, refusant de pleurer encore. Mais je suis à bout et je déteste cet endroit si Harry n'y est pas avec moi. Je déteste tout s'il n'est plus là. Je suis incapable de contenir tous ces sentiments en moi plus longtemps, alors je me mets à crier. Je hurle de toutes mes forces à m'en faire mal à la gorge, les points serrés, prêt à mettre mes mains en sang. Je hurle jusqu'à en perdre haleine et je finis par m'effondrer.
Ce n'est que dans l'après midi que les médecins nous ont prévenu que Harry est en soins intensifs, mais qu'il n'est pas encore réveillé. Mes parents sont rentrés à la maison pour se changer à tour de rôle, mais j'ai catégoriquement refusé de faire comme eux. Je voulais être là à tout moment, alors c'est ma mère qui m'a apporté de quoi me changer. Et sans qu'elle ne le fasse exprès, elle a pris un pull qui appartient à Harry dans ma chambre. Je suis dans les toilettes de l'hôpital et lorsque j'enfile le pull, je souris malgré moi parce qu'il porte son odeur et que ça me réconforte pendant quelques secondes. Comme si Harry était là, avec moi, et qu'il m'enveloppait de ses bras. Et même s'il n'a pas un poids très élevé, le pull reste trop grand pour moi, et j'adore ça. Une fois changé, je retrouve mes parents dans la salle d'attente des soins intensifs et un médecin est en train de leur parler. Je m'approche, mais je ne comprends pas ce qu'ils se disent puisque je prends la conversation à la volée. En revanche, le médecin annonce qu'on peut aller voir Harry pendant quelques minutes et des papillons dansent dans mon ventre.
'Qu'est-ce qu'il vous a dit ?' je demande une fois le médecin parti.
'Il s'agit de complications de la maladie' explique mon père. 'C'est assez fréquent lors de l'arrêt du traitement.'
'Mais il va aller mieux, pas vrai ?'
'On ne le sait pas encore, Louis. Ce qui est sûr, c'est qu'il est très faible...'
Je ravale la boule qui s'est formée dans ma gorge difficilement et je tente d'ignorer mon cœur qui bat beaucoup trop vite en me dirigeant vers la chambre de Harry. Lorsque je rentre, il n'est pas dans sa chambre du neuvième étage comme j'avais l'habitude de le trouver, assis dans son lit avec son livre, autour des guirlandes lumineuses. Non. Là, il est entouré de perfusions et de machines qui tentent de le maintenir en vie plus longtemps. Il est faible et ses cernes virent au noir. C'est une vision d'horreur, mais je n'en montre rien. Il est réveillé, les yeux tout juste ouverts, et ça me rassure. La dernière fois que je l'ai vu, la nuit d'avant, il était totalement inconscient dans mes bras, du sang partout sur lui.
'Salut toi', je murmure en passant une main dans ses cheveux bouclés tout emmêlés. 'Coucou...'
Sa voix est rauque et il me sourit légèrement.
'Comment tu te sens ?'
'J'ai soif.'
Et sans vraiment savoir pourquoi, je me mets à rire. C'est sûrement mes nerfs qui lâchent et parce que je suis heureux de pouvoir enfin le voir et l'entendre. Il aurait pu me répondre n'importe quoi, mais à la place il me dit qu'il a soif et ça me fait rire.
'Je vais appeler une infirmière pour lui demander si tu as le droit de boire', je réponds après m'être calmé.
'Non, ne pars pas Louis.'
A ces mots, il attrape ma main et je m'approche un peu plus de lui. Il sent l'hôpital et j'ai envie de le sortir au plus vite de cet endroit, je ne supporte pas de le voir comme ça.
'Eh, je suis là Harry, ne t'inquiète pas.'
'J'ai tellement peur...'
Il se met à pleurer et c'est bien la première fois que Harry me montre à quel point il est terrifié par cette maladie, et par tout ce qu'il est en train de vivre. Le voir dans cet état me brise le cœur et je sens mes yeux se remplir de larmes à mon tour, mais je fais de mon mieux pour ne pas lui montrer. Il a besoin que je m'occupe de lui et que je sois fort. Parce que s'il n'en a plus la force, je dois me battre pour lui. Pour nous deux. Je veux lui offrir le plus de temps possible, alors si ça veut dire que je ne dois pas craquer, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir.
Harry a le visage mouillé par les larmes et j'ai envie de le prendre dans mes bras, mais je ne peux pas à cause de tous ces fils autour de lui. J'ai envie de tout arracher, mais je sais que c'est pour son bien. Alors je garde ses mains froides entre les miennes et je les serrent de toutes mes forces. J'embrasse son visage et je lui parle pour qu'il se calme un peu, mais je le sens trembler sous les couvertures et j'en crèverai de le voir comme ça. Il ne mérite pas d'endurer tout ça. Pas lui. Pas mon Harry. Et là, mes lèvres sur son front, mon nez perdu dans ses cheveux, je prie à qui veut bien l'entendre, de me prendre moi si ça peut permettre à Harry de rester en vie. J'en oublie parfois qu'il n'a que dix-sept ans et qu'il ne saura jamais ce que ça fait d'être majeur. Il a encore tant de choses à vivre, à découvrir. C'est moi qui aurait dû être sur ce lit d'hôpital, pas lui. Il devrait être en cours, en train d'étudier la poésie, lui qui aime tant ça. Mais il ne devrait pas être là, en train de se laisser bouffer par les propres cellules de son corps. C'est moi qui devrait être à sa place, mais les anges en ont décidés autrement et ça me tue. S'ils ont besoin de quelqu'un là-haut, qu'ils me prennent moi alors. Qu'ils prennent n'importe qui, mais pas Harry, bordel. Je ne le supporterai pas.
'Louis ?'
La petite voix de Harry me ramène à l'instant présent.
'Oui ?'
'J'ai vraiment besoin que tu m'amènes voir l'océan, Louis.'