Rebekah
Lorsque j'entre au salon, le son atroce d'un serpentin à mon oreille m'arrache un grognement. J'ai brusquement envie de tordre le cou à Caroline. Sa bonne humeur constante va finir par me rendre complètement barge. En plus, avec le chapeau en plastique qu'elle porte sur la tête, elle a l'air ridicule.
Tout en essayant de l'ignorer, je la contourne et me dirige vers la cuisine. D'un coup, je suis d'humeur plus que maussade et le pire c'est que je ne sais pas vraiment pourquoi.
J'ouvre le réfrigérateur, attrape une poche de sang frais et la transvase dans un verre.
— Comment trouves -tu la décoration de ma petite fête ? m'interroge soudainement Caroline que je n'avais pas entendu me suivre.
Interloquée, je rejoins la balustrade en fer pour observer la cour qu'elle a effectivement décoré en un temps record. D'ailleurs, je me demande comment j'ai pu rater ces atroces guirlandes multicolores qu'elle a eu le malheur d'accrocher au plafond.
— J'ignorais qu'une fête devait avoir lieu ! je lâche.
— Ton frère et moi avons décidé de partir demain pour notre petit tour du monde, elle m'informe.
Il est vrai qu'ils n'ont eu de cesse de repousser leur départ. Je ne peux qu'abdiquer devant leur envie de s'aérer. Peut-être que je devrais quitter la Nouvelle Orléans. Lui aussi l'a fait, après tout.
Maudissant mes pensées tournées vers lui, je bois une gorgée dans mon verre puis grimace aussitôt. Il n'a pas vraiment bon goût.
— J'ai pensé qu'organiser un repas tous ensemble avant notre départ pouvait être sympa. Il faut en profiter en ce moment, l'humeur de tous est au beau fixe.
Ce qu'elle dit est vrai, je n'ai pas le souvenir que nous avons été en si bon terme depuis longtemps.
— Je pense que c'est une idée excellente ! j'avoue dans un sourire sincère en observant le contenu de mon verre.
Je n'ai pas le souvenir d' avoir bu du sang aussi infect.
— Cool ! lâche-t-elle tout en sautillant gaiement.
Puis, d'un ton plus sérieux, elle ajoute :
— Il reste encore la table à mettre.
Et sans que je m'y attende, elle me place une pile d'assiettes dans les mains avant de disparaitre aussi vite qu'elle est arrivée.
— Tu plaisantes, j'espère ! je m'écris. Caroline ! Reviens ici !
En voulant retenir le service en porcelaine pour éviter qu'il ne tombe, je renverse le contenu de mon verre sur mes stilettos.
— C'est vraiment une journée merdique ! je peste.
Stefan en me voyant en mauvaise posture s'empresse de venir m'aider tout en riant.
— Ne rigole pas de mes malheurs, Stefan, je le préviens. Je te jure que je vais la tuer !
— Ne te plains pas, moi, elle m'a soudoyé pendant au moins deux heures rien que pour accrocher tous ces maudits ballons.
Ne pouvant me retenir, je me mets à rire.
— Je crois que Caroline est une vraie névrosée ! j'admets
— Je ne donnerais pas tort, dit-il en levant les yeux au ciel. Attends, donne-moi ça.
Serviable, il me prend les assiettes des mains. Lorsqu'il dépose un chaste baiser sur mon front, mes paupières se ferment. Un grand sourire aux lèvres, il me quitte pour dresser la table.
Chacune de mes relations amoureuses a tourné à l'horreur. Je ne veux plus jamais revivre ça ! Aujourd'hui, je mérite d'être heureuse, de trouver mon partenaire. Je mérite un homme gentil comme l'est Stefan et pourtant... il me manque quelque chose. Je souhaite le feu, la passion dévorante. Je désire me sentir consumé par l'amour. J'en ai cruellement besoin.
Caroline
Lorsque je passe devant la bibliothèque, je m'arrête aussitôt dans mes pas. Bientôt, des flashs m'assaillent à m'en donner le tournis. Le pieu en chêne blanc, le visage de Stefan. Mon originel se consumant dans les flammes. Toujours ces mêmes images qui se répètent en boucle et qui m'oppressent la poitrine.
À pas feutrés, je rejoins la bibliothèque jusqu'à ce que j'atteigne l'interrupteur secret. Du bout des doigts, je l'actionne. La cachette se révèle. La boite où est contenue l'arme ultime également. J'aimerais tant pouvoir nous en débarrasser. Malheureusement, il est indestructible.
— Tu souhaites l'emmener avec toi au cas où Nik ferait des siennes ! résonne une voix, derrière mon dos.
Heureuse d'entendre Magellan, je referme tout et cours dans sa direction avant de l'étreindre dans mes bras.
— Tu m'as tellement manquée ! je lâche.
Je dois reconnaitre que c'est bel et bien le cas. Lorsque j'ai fait le choix de suivre Klaus, elle était là pour moi. Elle m'a aidé à trouver ma place parmi eux. Je ne pourrais jamais oublier qu'elle a été l'oreille attentive à laquelle je murmurais mes craintes.
— Je suis contente que tu sois venue. Avez-vous réussi à avancer dans vos recherches ? je me renseigne.
Dépitée, elle soupire.
— Pas vraiment et pourtant ce n'est pas faute d'essayer. Je ne sais pas comment stopper le processus de vieillissement. La solution que je voyais était de retransformer Katherine mais puisqu'elle ne conserve pas le sang de vampire, j'ignore comment procéder. La seule chose que Davina a réussi à concocter c'est une sorte de ralentisseur, m'informe-t-elle en me dévoilant une petite fiole d'une couleur assez douteuse.
— Et en plus, ce n'est même pas toi qui l'as trouvé ! je la charrie.
— Même pas ! je dois reconnaitre que Davina se révèle être une sorcière talentueuse..
— Si Marcel l'a tenait captive, ce n'était pas pour rien, j'admets.
— Et toi, dis-moi, tu cherches quelque chose ? elle me demande en pointant du doigt la bibliothèque.
— Non ! pas vraiment ! Tu sais les visions que j'avais avant sur le pieu et sur la mort de Klaus, elles sont revenues.
À mon aveu, la sorcière fronce les sourcils.
— Et elles vont d'ailleurs finir par me rendre complètement dingue, j'admets en me grattant la tête. Alors, je ne sais pas... je voulais m'assurer que le pieu en chêne blanc était bel et bien là. Toujours en notre possession.
— Tu as besoin que je me renseigne !
— Tu as déjà suffisamment à faire avec Katherine. De toute façon, nous partons demain et le pieu, lui, reste ici. Car non ! je ne vais pas l'emmener avec moi, j'ajoute dans un rire. À la place, c'est mon originel que j'enlève.
— Je trouve que c'est un très bon projet !
— Yes ! Alors ce soir, on fait la fête !
L'entrainant avec moi, je nous fais rejoindre la salle. Tout le monde est présent et est déjà attablé. Je suis très heureuse de les voir unis tous ensemble. Même Elijah s'est décidé à sortir de son bureau pour l'occasion. Tous ces éclats de rire qui comblent cette imposante demeure réchauffent mon cœur.
Ce soir, La Nouvelle-Orléans est étrangement silencieuse mais je sais que nous, on nous entendra.
— ça fait plaisir de les voir si unis ! C'est tellement rare ! dit Magellan.
— Je suis d'accord !
Le sourire de Klaus est d'ailleurs inratable. Il est si bien, semble si heureux. Je suis si fière de constater les progrès qu'il fait. Lui aussi gagne au change. Aujourd'hui, à cet instant précis, il est en paix avec sa famille, avec lui-même.
— J'en connais un qui ne t'a pas quitté des yeux, depuis que tu es entrée, je murmure à Magellan. Et je dois reconnaitre qu'il y a de quoi, tu es plus que canon dans cette robe.
— C'était là tout le but de la manœuvre ! avoue-t-elle en attrapant une coupe avant de partir les rejoindre.
Accoudée contre le chambranle, je ne me lasse pas de tous les regarder. Désormais, chacun d'entre eux fait partie de mon quotidien. Je ne les échangerais pas pour le moins du monde. Chacun d'entre eux est unique. Après avoir appris à les connaitre, on se rend compte qu'au fond ils ne sont pas si différents.
Les yeux de Klaus se posent alors sur moi, m'invitant à le rejoindre. Je lui réponds d'un large sourire et pars m'installer à ses côtés. Sous la table, nos mains se trouvent, nos doigts s'entrecroisent.
— On va enfin pouvoir trinquer ! râle Kol. J'en avais marre de t'attendre !
— Tu avais peur de te dessécher ! je me moque
— Tiens en parlant de se dessécher, je souhaiterais profiter de ce moment mémorable pour porter un toast, dit Kol en se redressant. Merci, Caroline, ma nouvelle sœur, d'avoir organisé cette soirée et d'avoir permis à Nik de basculer son obsession des dagues sur toi. Désormais, nous serons tous d'accord que nous pouvons enfin dormir sur nos deux oreilles.
Nous éclatons tous de rire. Klaus également.
— Plus sérieusement, je vous souhaite... à tous les deux... de faire bon voyage.
Très émue par le plus jeune des frères, je lui souris et pars l'enlacer. Je sais à quel point cela a été difficile pour lui d'accepter que Klaus puisse s'en aller, et cela même si nous reviendrons.
— À votre petit tour du Monde !
Nos verres s'entrechoquent les uns contre les autres. Je crois que jamais je ne pourrais oublier cette soirée. Je ne me suis jamais senti autant à ma place. Aujourd'hui, je peux l'affirmer, il me considère tout comme l'une des leurs. Comme un membre de leur famille.
Je ris en voyant Kol lancer une serviette en tissu sur sa sœur. La bonne humeur règne et ça fait du bien. Elle lui rend l'appareil et lui fait semblant d'avoir eu mal.
— Cesse de te moquer ! elle le dispute gentiment, qui dit que je suis moins forte que toi !
— La réponse est évidente ! dit-il en plongeant ses lèvres dans son verre.
— Parce que je suis une femme ? Tu sais quoi ! s'offusque la blonde Originelle. Il n'y a qu'un moyen de le savoir ! Allez, lève-toi !
— Quoi ?
— Allez, debout ! elle insiste.
Dans les secondes qui suivent, une table ronde et deux chaises sont installées.
Fascinée par cette soirée, je regarde les deux Originels commencer un bras de fer. J'explose de rire et frappe dans mes mains. Rebekah lutte comme une lionne, elle veut gagner mais Kol ne lui facilite pas la tâche.
— Allez, Rebekah ! je m'époumone.
— Sale traitresse, après ce beau discours, ce n'est même pas moi que tu encourages ! peste Kol.
Je pose mon index sur mes lèvres et fais mine de réfléchir avant de dire :
— Eh bien non !
Kol force, Rebekah capitule. Cependant, elle est bonne joueuse et félicite son frère.
— Moi aussi je veux le faire ! je lâche, surexcitée en attrapant la main de mon meilleur ami.
— Caroline, j'ai plus de cent ans, tu ne pourras pas gagner ! il me prévient.
Ma main dans celle de Stefan, je n'arrive pas à perdre mon rictus malicieux. Au-dessus de nos têtes, Rebekah lance le compte à rebours. Une fois fait, je teste quelques secondes la force de mon meilleur ami. Ma main est à quelques centimètres de rencontrer la table. Un sourire sournois apparait sur mon visage, mes yeux virent à l'ambre.
Puisant dans le loup de Klaus à travers notre lien, je change la donne. Je reprends aussitôt l'avantage et gagne la manche.
— C'était de la triche ! se plaint Stefan en riant.
— Je m'en fou ! J'ai gagné quand même ! j'ajoute dans un clin d'œil.