Texte 28 : Jessica ~ Dernier Noël

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Genre : Drame

Époque : Décembre 2998

Protagonistes : Jessica (Combattante Active, connue sous le nom de « Gaz Mortel »), Noël

Lien avec : L'Œil de Teikono (l'histoire principale)

Notes : Ce petit texte a été écrit dans le cadre d'un petit concours de Noël auquel je me suis engagée à participer :)
Comme il était demandé d'être original et de faire ressentir des émotions, j'ai eu l'idée d'écrire ce moment entre Jessica et son frère ^^ j'espère que ça vous plaira ! :D

Il s'était plaint de maux de têtes, il frissonnait et semblait anormalement fatigué. Nos parents ont immédiatement réagi et en quelques instants, nous étions tous dans la voiture pour foncer en direction de l'hôpital. Ma mère conduisait tandis que mon père était assis à l'arrière avec mon petit frère. Moi, j'avais eu le droit d'aller devant. Un privilège au goût pourtant particulièrement amer. Nous étions à quelques jours de Noël.

Noël Hellgenna. 9 ans et 3 mois. Admis en urgence à l'hôpital Katsushika Hokusai pour septicémie.

Nous avons attendu des heures. Il y avait une vue sur un parc depuis la salle d'attente. La neige recouvrait tout, jusqu'aux petits stands du minuscule marché de Noël de l'hôpital. Quelque bonbons et jouets s'alignaient sous les tonnelles scintillantes. Au centre de la place pavée se dressait un gigantesque sapin décoré de milliers de lumières multicolores. C'était magnifique, mais rien de tel ne parvenait plus à me toucher. Je ne le savais pas encore, mais ce genre de beauté ne me toucherai jamais plus.

Notre année d'écart ne comptait pas avec mon frère et nous nous faisions passer pour des jumeaux. Nous étions intimement convaincus que nous aurions dû l'être, et qu'il avait simplement passé trop de temps dans le ventre de notre mère, ou que j'avais été trop pressée de découvrir le monde.
Le monde... nous rêvions de le parcourir ensemble, à cette époque. Ou plutôt, j'avais finis par lui transmettre ma fièvre d'aventures et de découvertes. Il avait finalement succombé d'une autre.

Nous jouions aux Combattants. C'était mon rêve et ça avait fini par devenir le sien. Nos parents ont suivi le mouvement et nous y encourageaient. J'allais pouvoir bientôt passer le concours d'entrée. Plus qu'une année à attendre... ensuite il m'aurait rejoint et j'aurais pu le guider...

– Jessica !

Ils m'avaient appelés pour le voir. Je n'avais jamais vu une telle expression dans le regard d'un adulte et mon cœur s'était mis à battre, à tambouriner si fort dans ma poitrine que la seule chose que j'arrivais à penser était que nous nous trouvions déjà sur place si je venais à perdre connaissance... c'était une pensée au goût particulièrement amer, comme je n'avais jamais connu jusque-là. Je ne connaissais pas cette forme d'amertume et l'ai découverte ce soir-là. J'ai découvert beaucoup de choses ce soir-là.

Ils m'avaient mis un masque sur la figure avant de m'ouvrir la porte de sa chambre. Je ne l'avais jamais vu ainsi. Allongé sur le lit médical, il semblait plus pâle et chétif que jamais. Lui aussi portait un masque, mais différent du mien. Le sien lui recouvrait entièrement le visage et s'infiltrait dans ses narines, sa bouche... on aurait dit qu'il l'étouffait. Ses beaux yeux marron glacé étaient clos. Je m'étais saisi de sa main par réflexe. Elle était froide, j'avais l'impression de pouvoir sentir la chaleur quitter progressivement son corps.

Une voix m'avait informé qu'il dormait, qu'on appelait cela un coma mais que peut-être il pouvait m'entendre si je lui parlais.

Je savais qu'il m'entendait. Notre lien était spécial. Je savais aussi ce qui était en train d'arriver... et qu'il en avait parfaitement conscience. Mon frère se voyait mourir.

Je portais des élastiques à boules pour la périodes des fêtes. Ils retenaient mes deux couettes hautes qui dansaient au sommet de mon crâne et s'entrechoquaient dans un bruit que nous adorions tous les deux. J'ai défait l'un d'entre eux et avec tout l'amour et l'affection que j'avais pour lui, lui ai attaché une mèche de cheveux avec.

Puis je lui ai murmuré qu'il emporterait un peu de moi avec lui, à tout jamais.

Je lui ai parlé longtemps encore après ça, longtemps après ces événements. Des années après, je continuais de lui parler, sachant qu'il m'entendait d'une certaine façon...

Ce soir-là, dans la chambre d'hôpital, dans le silence qu'il avait laissé, j'avais entendu des notes de musique. Un chant de Noël, juste sous sa fenêtre. Une mélodie d'une infinie douceur, comme pour lui dire adieu.

Teikono : Bribes égaréesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant