Chapitre 1

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"-Cela fera 5 Kandrar d'or"

Je regarde une nouvelle fois dans ma main. Je n'ai que trois pièces. Le prix du pain à augmenté. Encore. La femme me réclamant l'argent s'impatiente et fait la grimace. C'est endroit doit sentir mauvais par rapport à l'endroit où elle vit. Elle ne fait que du bénévolat forcé. Le stand a été installé pour la journée au milieu du quartier et une centaines de personnes y sont agglutinées, espérant se procurer de la nourriture. Le quartier est insalubre et les immeubles délabrés.

 Un vent frais me caresse.

Bientôt, ce sera l'hiver et il s'annonce rude. Je réajuste mon sweat en essayant de trouver une solution. J'ai volé ce sweat. Et j'y tiens particulièrement parce qu'il me tient chaud.

Bref, je ne peux pas m'en aller sans nourriture. La femme devant moi s'impatiente.

"-5 Kandrar d'or

-Je ne peux pas payer. C'était 3 il y a une semaine!

-Les tarifs ont changé...

-C'est innacept..."

Je suis soudain coupée par une voix forte :

"- Va-t-en si tu n'as pas l'argent!"

Une autre s'élève aussitôt :

"- Cette petite a raison c'est inadmissible"

De plus en plus de voix s'élèvent, la plupart protestent contre cette augmentation. Bientôt, ce sont des dizaines de personnes qui se mettent à protester.

Je m'en fiche.

Je profite du brouhaha pour tendre la main et prendre le fameux pain. Une fois fait, je me glisse discrètement hors de la foule et m'en vais. Je m'éloigne à pas pressés mais je sais que la situation va dégénérer. Je me retourne une dernière fois.

Un homme tente de lever la main sur la "bénévole", mais il s'effondre de douleur en se tortillant et se tenant la tête dans les bras. Aussitôt, tout le monde se calme. La femme à la charge du pain l'a fait, elle l'a attaqué psychiquement. L'homme est envahi par des spasmes. Il a besoin de premier soins et rapidement. 

Comme la procédure le lui impose la femme venue travailler bénévolement s'aide de deux hommes qui l'accompagnaient pour récupérer le pain et s'en aller. Ils s'en vont sans un bruit. Un léger murmure de colère est perceptible mais personne n'ose rien faire par peur. L'homme convulse. Un vieil homme tente de lui faire un massage cardiaque.

Je mets le pain que j'ai réussi à voler sous mon sweat : mieux vaut que personne ne me voie avec ça... Je m'en vais sans un mots. J'ai appris à choisir mes batailles.

Je marche trente bonnes minutes avant d'arriver dans le quartier est, mon quartier. Ici, il n'y a plus de vente de pain depuis trois mois. Les gens sont devenus trop violents ici. Les maisons sont petites et n'ont que des morceaux d'aluminium en guise de toit. Le sol est littéralement couvert d'ordures en tout genre. Ça attire les rats et les tiques donc de la nourriture pour les moins chanceux d'entre nous. 

L'odeur chlorée de l'eau de Javel pique mon nez : je suis chez moi. Je pousse un rideau de fortune en denim et entre à l'intérieur. 

"-Ike, tu es revenue, tu as du pain? Qu'on mange autre chose pour une fois."

Je sors le pain de mon sweat et le lui tends."

Silja est mon mentor, elle est comme une mère pour moi. Elle m'a recueilli il y a cinq ans pour devenir son cadet. Elle m'apprends les arts pharmaceutiques et chimiques. Elle pose le pain sur la table et mets une poêle au feu avec un filet d'huile de pelouse pour y casser des oeufs de pigeons. Elle me parle en même temps :

"-Pendant que tu étais partie, j'ai fait de la teinture grâce à un vieux bouquet de roses que quelqu'un a jeté ici. Tu n'en veux pas, Ike? Cette couleur t'irais si bien, tu devais y penser...

-Non. Non merci"

Je sers entre mes doigts les trois pièces de monnaies que je n'ai jamais utilisé. J'ai 19 ans et j'ai les cheveux blancs. Lorsque l'on vit dans ces quartiers dans les bords du royaume, c'est très courant. Silja m'a raconté que les médecins de la ville prétendent que c'est parce que cet endroit est trop insalubre pour un être vivant mais qu'en réalité ça définit qui nous sommes et notre force.

"-Rends-moi la monnaie, Ike! Tu as encore volé cette fois? On en a déjà parlé et plus d'une fois!

-Ils ont augmenté le prix à 5 pièces! Je me suis servie!

-Et alors? Tout s'est bien passé?

-Il y a eu une proteste et un homme a tenté de lever la main sur cette femme et elle l'a attaqué psychiquement.

-Est-ce qu'il est mort?

-Probablement. Un vieillard a tenté un massage cardiaque mais de loin on aurait plutôt dit qu'il lui cassait les côtes j'avais déjà volé le pain et ne voulait pas me faire remarquer si non je me serais chargée moi-même de le détrousser.

-Ce n'est pas grave Ike. Il ne devait pas avoir grand chose. Le pain perdu est presque prêt pose ces pièces sur la table. Tu sais très bien que je déteste quand tu n'es pas transparente avec moi!

-Excuse-moi Silja"

La femme qui vendait du pain est en vérité une dame de haute caste. Ils sont forcés d'accomplir un travail bénévole une fois tous les trois mois au moins une fois tous les trois mois. Cette initiative a été prise il y a des années pour faire semblant de combler les énormes inégalités sociales ici. Il sont quand même réussi à augmenter le prix du pain. On dirait qu'ils veulent causer une révolte. 

Silja est la seule personne à laquelle je tiens et par extension elle me connaît trop bien pour que je puisse lui faire le moindre mauvais coup. J'aurais du lui donner cet argent aussitôt que je suis arrivée. Je pose l'argent sur la table et balaie l'entrée pour me faire pardonner. Dehors des petits enfants jouent avec un rat mort. Ça pourrait leur transmettre des maladies mais ça ne les empêche pas de continuer. Un femme menue s'approche soudain pour prendre le cadavre d'animal et chasser les enfants. Je sais d'ores et déjà qu'elle ne s'en débarrassera pas mais que cette viande fera office de repas du soir. J'ai beau avoir vécu ici toute ma vie cette pensée me dégoute.

Ike de Kandrar : Le clan du CrystalWhere stories live. Discover now