Chapitre 1

42 2 5
                                    

- PUTAIN. DE. MERDE. On a réussi ! Gueula une voix grave.

- Pas encore, leur dis-je. Ce n'est pas parce que l'on est dans un village qu'ils ne vont pas nous retrouver.

Je levai les yeux au ciel. C'était gris. Gris comme de la poussière. Pas une once de soleil à l'horizon. De petites maison longeaient la rue déserte. Certaines avaient un jardin ou bien une terrasse. C'était un quartier où les maisons étaient collées les unes des autres. Dommage. Je regardais les autres. Ce n'était pas un bon plan, ça allait foirer quelque part, je le sentais. Je ne dis cependant rien, oubliant mon appréhension à la vue d'une voiture, mais gagnant une peur soudaine. Je poussai les autres à l'intérieur d'un jardin, derrière un bas muret et on ne bougea plus. Attendant juste qu'elle fasse son chemin, notre souffle se coupa. Après tout, si près du but il ne nous fallait pas échouer. Il en était hors de question.

- Elle est partie ? Chuchota faiblement une voix féminine.

- Chut, fit silencieusement le frère de celle-ci.

Je passai ma tête par-dessus le muret avec hésitation, observant les alentours de mon excellente vue. Je me baissai quand soudain un petit groupe de personnes fit son apparition dans le coin de la rue. Merde. Merde. Merde. J'intimai aux autres de ne pas bouger, de ne pas respirer. Il fallait réfléchir, et vite, avant que l'on ne soit cramés. Le coup du caillou dans l'autre direction... Non ils ne sont pas aussi cons. Rentrer dans la maison... On sera vite vu et les habitants lanceront sans doute une alerte.

J'entendis un aboiement. Et fiente. Cette fois je savais que l'on était cuit de chez cuit, et je savais bien que cette chance serait notre seule chance. La chance d'une vie, celle qu'il ne faut pas louper. Je regardais mon bras. Des marques rouges zébraient celui-ci, souvenirs de la semaine dernière quand j'eus enfin atteint ma majorité. Ils ne fêtaient pas les anniversaires non, ils ne fêtaient que leurs réussites. Le moment présent. Il ne fallait pas que je réfléchisse au passé mais juste au moment présent si je ne voulais plus jamais que cela m'arrive.

Un garçon était à côté de moi. Et c'est lui qui eut l'idée qui nous sauva tous.

Car justement un camion de déménagement était derrière la maison, dans une autre rue, et c'est lui qui eut cette idée folle. Très doucement, il chuchota:

- C'est notre seul moyen...

Je compris et lui confirmai du regard. Sa mâchoire carrée était serrée, tout comme ses poings. Son regard était sûr, cela me rassura. Il passa le message aux deux autres et on était prêts. Doucement, et malgré les aboiements qui se rapprochaient, on se glissa à quatre pattes par terre, comme à l'entrainement militaire que l'on nous avait fait faire toute notre enfance et adolescence. On passa le jardin à toute allure, sautant vite par-dessus l'autre muret et se cachant bien derrière. Nos vêtements blancs étaient maintenant gris, brun et verdâtre à cause de l'herbe très certainement.

Il ne manquerait plus qu'il pleuve. On reprit notre souffle, puis on évalua le périmètre. Devant nous se trouvait un camion blanc, avec un écriteaux rouge marqué dessus "Déméric à brac". On se lança tous un regard incertain. Le camion était ouvert par derrière et l'on entrevoyait des meubles et des cartons tous empilés les uns des autres. Quelqu'un arriva avec un carton dans les bras justement. Un monsieur qui devait avoir la quarantaine, beaucoup de muscles et beaucoup de gras aussi. On se colla au mur et on ne bougea pas. Le camion nous cachait et vu qu'il ne se doutait pas d'avoir des jeunes adultes derrières ça devait passer.

Un aboiement. Plus lointain certes, mais mes poils s'hérissèrent.

- Allez on s'active ! Quelques cartons et c'est fini ! dit le monsieur à certainement d'autres personnes.

Le rêve d'un envolOù les histoires vivent. Découvrez maintenant