XI. froid

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Respirer la bouche ouverte. Avoir nez qui coule toutes les trois secondes. Les narines qui brûlent à force de se moucher.

Les rhumes... ma hantise. J'en avais pas choppé un depuis des années, ça ne m'avait pas vraiment manqué. En plus, pour couronner le tout, de longs frissons me parcourent la colonne vertébrale depuis que je me suis levé. Je me sens pataud.

À mon réveil, j'ai carrément eu une crise de panique en voyant qu'Eiji n'était pas à mes côtés. Pendant trente secondes, mon sang était en ébullition, mon souffle court, jusqu'à-ce que je reprenne mes esprits et me souvienne d'où nous étions.

Japon. Chez lui. Loin des États-unis.

Les larmes me sont montées aux yeux, tant j'étais soulagé. Après avoir pris deux profondes inspirations qui ne m'ont en rien calmé, je me suis forcé à me lever pour me changer les idées.

Il y avait un post-it collé à la porte de sa chambre; il m'informait qu'il était parti faire des courses. De bon matin, comme ça, en me laissant seul dans le lit double, ma panique et mes mouchoirs... Super.

Je suis allé me nettoyer le visage à la salle de bain, un peu amer. De toute façon, j'ai rien de mieux à faire. C'est en m'inspectant dans la glace que je me suis rendu compte que ma barbe avait repoussé. Horrible. Ça m'a permis de faire une autre heureuse découverte; ma bouteille de mousse à raser est complètement vide. Tout tombe à pic aujourd'hui.

On dirait presque que la vie me fait payer le prix de la douce, si douce journée d'hier. Aussi, je suis un peu pessimiste de nature.

De retour dans la chambre, je me suis permis de piquer un pull dans la garde-robe d'Eiji, puisque mes chemises ne sont pas adaptées à la température actuelle. D'ailleurs, pourquoi je les ai prises, à la base ? J'en ai strictement aucune idée. Sérieusement, on est en début d'hiver, j'avais quoi dans le crâne en faisant mes bagages ?

Mais bon, j'ai pu trouver mon bonheur dans les affaires d'Eiji, en fin de compte. Vu qu'il aime bien s'habiller en oversize, ça me va comme un gant.

Et puis, point non-négligeable... ses fringues portent son parfum. Même si, avec mon nez bouché, je ne le sens que très légèrement, me vêtir avec, c'est comme nager dans ses bras. Ça sonne hyper niais... Depuis que nous nous sommes réunis, Eiji et moi, me suis surpris à voir ce genre de pensées poper dans ma tête, comme ça. C'est... spécial.

J'agis comme un amoureux en manque d'attention alors que je l'attends depuis quoi, disons vingt minutes ?

Il me manque déjà à mort. Je suis un cas désespéré.

Mon moi du passé me filerait des bonnes claques s'il me savait passer autant de temps à rêvasser à propos de quelqu'un.

J'avoue qu'on peut pas faire cliché: j'arrive même pas à me concentrer correctement sur mon livre. C'est la dixième fois que je termine la première page, et la dixième fois que je n'y ai strictement rien compris.
Mon cerveau n'assimile aucun sens aux mots qui défilent sous mes yeux. Littéralement.

Par contre, mes neurones s'en donnent à cœur joie pour ce qui est de me repasser en boucle les souvenirs de la soirée à la plage. C'est enregistré profondément en moi. J'en garderai la mémoire jusqu'à la mort, j'en suis sûr.

Bon sang... ça valait vraiment la peine de survivre jusque-là. Rien que pour ces instants inoubliables.

« Tadaima~, entonne, suivie du bruit d'une porte se refermant, la voix que je souhaite entendre depuis mon réveil.

Je lâche ma lecture sans réfléchir, et bondis de ma chaise pour rejoindre l'entrée. Finalement, il est là !

Eiji dépose un sac de course sur le sol. L'air de bonne humeur, il me sourit aimablement, déboutonnant son manteau.

Je suis là.Wo Geschichten leben. Entdecke jetzt