VIII. arrête

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Je soupire de soulagement en passant la sortie de l'aéroport. Mon souffle s'élève en buée dans les airs. Je referme les boutons de ma veste molletonnée en levant les yeux vers le paysage urbain et lumineux de Tokyo. C'est une sensation spéciale que de se retrouver seul dans un pays étranger.

Enfin, pas seul pour longtemps, en fait. Je regarde à nouveau les derniers messages que j'ai échangé avec Eiji, lors de mon vol. Il m'avait demandé si je pouvais l'attendre du côté du grand parking extérieur.

Je repère rapidement ma destination, et m'y dirige en tirant derrière moi ma valise. Posté au bord des voitures, je m'appuie contre un lampadaire et me mets à patienter.

Je suis loin d'être calme. Mon stress n'a littéralement fait que d'augmenter depuis que je pense à ce voyage. Je meurs d'envie de revoir Eiji, pourtant je suis plein d'appréhension à cette idée. C'est tellement frustrant.

La main un peu tremblante, je sors mon paquet de cigarettes et en arrache une d'un geste un peu trop vif. Son contenu se déverse lamentablement sur le sol. Je me baisse alors pour les remettre en place, grognant de mécontentement.

Je me lève, la clope au bec, et me mets à chercher mon briquet. Mais je m'arrête net lorsque j'entends quelqu'un courir dans ma direction. Ma cigarette glisse lentement de ma bouche, tombant une seconde fois sur le sol.

Je n'y pense même plus. Toute mon attention est portée vers la personne qui se rue sur moi, qui se jette dans mes bras.

Je sens ses mains grimper dans mes cheveux. Son doux parfum rassurant accompagne cette brusque étreinte. Mon cœur bat à mille à l'heure. C'est si soudain, si irréel. Tout se passe si rapidement dans ma tête, que j'arrive à peine à réaliser ce qui est en train de se passer.

Eiji reste ainsi contre moi l'espace d'une minute, muet, immobile. Il finit par reculer, juste assez pour que nos regards se croisent. Les mots se mélangent dans ma tête et mon cœur se gonfle. J'ai envie de dire tellement de choses en même temps.

« Wow, quel accueil... »

Ses yeux se laissent aussitôt déborder de larmes tandis qu'un magnifique sourire s'étend sur ses lèvres. Je sens moi aussi mes yeux s'humidifier en voyant Eiji ainsi. Il rigole et essuie son visage de sa manche, avant de me sourire à nouveau.

« Bon sang... tu m'as manqué... dit-il d'une voix légèrement déraillée. C'était tellement dur de ne pas t'avoir auprès de moi.

– Je suis là, maintenant, déclaré-je, les yeux plongés dans les siens. Allez, sèche tes larmes, Eiji, tu vas finir par t'y noy-»

Il blottit sa tête dans le creux de mon cou, cessant alors de renifler. Je ne m'y attendais pas un seul instant. Sa respiration devient plus lente, relaxée, contrairement à la mienne, qui ne fait que de s'accélérer. Mon visage devient complètement cramoisi. Je ferme ma bouche entrouverte et, à la place de continuer à plaisanter, je profite de cette sensation chaleureuse qu'est d'avoir Eiji à mes côtés, pour de vrai.

Malgré mon coeur, qui, pour une raison ou pour une autre, tambourine incessamment fort en moi, j'aimerais pouvoir vivre ce moment pour toujours.

« Le taxi attend, Ash... chuchote Eiji. Je lui ai dit qu'on ferait vite. On doit y aller.

– T'as raison, fais-je en me défaisant de son étreinte, un peu déçu malgré-moi. Allons-y. »

Eiji hoche la tête et m'emboîte le pas. Nous nous mettons à marcher côte à côte dans un silence complet, mais reposant. Nos mains s'effleurent timidement une fois. La deuxième fois, mon cœur loupe un battement. La troisième, Eiji glisse ses doigts entre les miens.

Je suis là.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant