Oxymore

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Amour: un mot, des syllabes, des lettres, peu de sens. Il tournait en boucle dans ma tête depuis mes débuts. Un sentiment, une réflexion, des caresses, des idées, des peurs. Doux mais pourtant brutal, il nous prend aux tripes, nous brise le cœur, l'arrache et le déchiquette, mais nous tient en vie, sain d'esprit. Une contradiction à lui seul.

"Le Grand Amour", un débat sans fin. Le plus gros impact dans une bouche, le premier lien dans l'autre. Parfois dit faux, lorsque son ombre contraste pour les mauvaises raisons. Une obsession qui tournait en boucle dans ma tête. Alors, sans y réfléchir à deux fois, j'ai plongé dans cette tempête confuse.

Grondements sourds et gouttes d'eau sur la toile, je m'y suis perdue. Ma tête s'y est égarée, trop agitée. Mes yeux emplis d'étoiles, l'émerveillement à l'état pur. Beaucoup de possibilités en trop peu de battements. Je me suis faite assommée par sa chaleur glaciale, kidnappée par son humidité sèche et torturée par sa distance intime. Je me réveillai chaque matin à ses côtés, le sourire aux lèvres, les oiseaux chantant.

Il me racontait son aventure à chaque coup d'œil, m'envoûtant plus encore, dévoilant chacune de ses courbes, dissimulant ses droites.

Bruissements des feuilles et tonnerre des cieux, mon âme s'est échappée. Je n'ai pas tenté de la retenir, les soufflements étaient trop forts, trop bruyants. Je m'en suis donc peu souciée, je préférai l'admirer, le posséder. Son obscure clarté me faisant atteindre la plénitude, son triste bonheur cachant la noirceur du monde, son excitation sage ne me laissant regarder que le rose.

Une pause, une constante, la ligne droite pointait, la balançoire grinçait, les frottements me berçaient. J'étais ensommeillée, douce, apaisée de mes maux tandis qu'il me chuchotait ses mots chaque battement venant.

Éclair silencieux, arbre brisé, la réalité m'a rattrapée. Dans ma fuite curieuse, je l'avais presque oubliée. La haine revenant, l'impuissance se révélant, l'envie me délaissant. J'étais lasse, ennuyée de ce cycle sans fin. De cette crème, ce pansement, cette illusion, il me fallait revoir la coupure, le sang, la douleur.

Longtemps, j'ai continué à écouter, j'étais bien dans ces répétitions d'étourdissements. Aucune raison d'avoir peur de ce malaise. Douceur du réveil contrastant avec cette herbe sèche. J'avais dû brouter dans d'autres prés, sans pour autant qu'il le sache. Lui savait, mais n'interférait pas, de peur de briser les battements.

J'en avais assez, hantée par des mensonges véridiques, il me fallait une issue. Une balade nocturne, je devais lui chuchoter ces hurlements de mon cœur. C'était une sortie de secours dangereuse, mais je n'en voyais pas d'autres assez loin pour pouvoir les atteindre.

Allongés à même le sol, l'un contre l'autre, les yeux fixés sur la voûte étoilée, je lui ai donc raconté une histoire. Celle de ma quête, ma propre aventure que j'avais dissimulée sous les cendres de l'inondation. Les larmes roulaient le long de mes joues, j'avais compris. J'étais amoureuse des palpitations silencieuses, de l'excitation froide, des contacts brefs, des sourires tristes, des étoiles sombres de ses yeux, des douceurs écœurantes. Envoûtée par l'amour et son contraire, ce qu'il me faisait ressentir et m'empêchait de voir, les yeux grands ouverts. Je n'étais pas amoureuse de lui, ce garçon, mais bel et bien de ce sentiment, ces battements.

J'avais finis mon histoire, il m'avait embrassé. Mais je n'ai pu comprendre que plus tard ce qu'il me disait par son silence. Le lendemain matin, j'ouvrai les yeux face à mes draps blancs, nus, dépourvus de la moindre once de contradiction. Il était parti, me laissant seule, dépendante de l'amour.

Cette nuit là, il a prit mon histoire pour une rupture. Ce soir là, il m'a retiré la possibilité d'accéder à celui que j'aimais. Ce jour là, les étoiles se sont éteintes...



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C'était pour un concours mais je le trouve joli quand même huh

Pensées IncongruesWhere stories live. Discover now