5. Arya - Le Détroit

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« Dans combien de temps arriverons - nous à Essos ser Merys ? Demanda Arya.

- Dans quelques jours ma lady. Nous atteindrons très bientôt Tyrosh où nous ferons escale, puis nous irons à Myr et traverserons par voie terrestre Essos pour atteindre Volantis où nous passerons quelques jours.

- Appelez moi Arya, » se contenta t-elle de répondre.

Ce programme l'enchantait grandement même si elle n'osait l'avouer. Elle eut une pensée pour Jon et Sansa, coincés dans le Nord et se dit que le froid ne lui manquerait décidément jamais.

Elle avait soif d'aventure et une excursion à Essos était l'endroit idéal. Découvrir les « Cités Libres » n'était autre qu'un de ses nombreux souhaits. Elle s'était muée en une redoutable assassine à Braavos mais c'était là la seule partie d'Essos qu'elle connaissait.

Les vagues venaient s'écraser contre la coque du bateau dans un clapotis agréable et l'ambiance à bord était des plus plaisantes.

Ce qui ne l'était pas en revanche, c'était ses nuits. D'immondes songes venaient la torturer dans son sommeil, séquelles de son affrontement avec les Marcheurs Blancs. Certains avaient été brièvement blessés voire tués mais elle avait conservé des marques psychologiques.

Elle caressa du bout de la main Aiguille lorsqu'un mouvement attira son attention vers les nuages. Quelque part au milieu d'une masse cotonneuse elle crut apercevoir quelque chose briller.

Clignant des yeux la brillance disparut bien aussi vite qu'elle était apparue. Un brin perplexe, la jeune femme se pencha sur le bastingage, profitant de la fraîcheur des embruns salés. La mer se tordait sous elle, dans un ravissant tableau mêlant une multitude de bleus différents. N'importe quel artiste aurait aimé avoir un tel paysage sous les yeux.

À bord l'équipage s'activait, les ordres fusaient de ci- de là dans un bourdonnement devenu courant pour Arya. Elle proposait sans cesse son aide mais on lui répondait à chaque fois que ce n'était pas approprié pour une lady.

Certaines fois j'aimerais être une simple fille, née dans une famille normale... songea t-elle. Elle fut extirpée de ses pensées par l'interpellation d'une servante :

«Souhaitez-vous que l'on vous apporte des fruits frais dans votre cabine lady Arya ?

Cette dernière masqua son exaspération derrière un petit sourire et branla du chef en guise de réponse.

- Et c'est Arya au passage, juste Arya. Ne put-elle s'empêcher d'ajouter. Les galanteries ça va un temps, grommela t-elle dans sa barbe.

- J'imagine que c'est ça de naître d'une noble famille, se moqua un jeune homme qui s'était approché d'elle dans un parfait silence.

Il revêtait un gilet en cuir bouilli enfilé par- dessus une chemise blanche, autrefois bouffante mais à présent collée à sa peau. Tu m'as l'air là bien fatiguée.

Son interlocutrice soupira. Il est vrai que ces derniers temps elle avait mauvaise mine, son teint du Nord s'était fait plus pâle qu'auparavant et ses yeux étaient encadrés de sombres tâches bleues.

- Les cauchemars je présume ?

Il n'eut pas besoin de réponse pour savoir de quoi il s'agissait. Arya lui en avait parlé pas plus de deux fois certes, mais il n'avait pas oublié.

- Gendry, tu accepterais de faire un tour avec moi ?

- Vos envies sont des ordres ma lady, répondit-il avec un sourire en coin.

Ils se baladèrent sur le pont discutant de tout et de rien. Après plusieurs mois de navigation elle connaissait chaque coins et recoin du bateau. Elle entraîna son ami dans un renfoncement du navire, à l'abri des oreilles indiscrètes.

- Tu sais, peu avant mon départ, j'ai eu vent d'une rumeur mais à mon avis ce n'en est pas une.

- Dis- moi tout, lança le jeune homme, curieux.

- Jon aurait déserté la Garde de nuit pour s'enfuir au-delà du mur avec les Sauvageons.

- Tu m'as l'air déçue.

- Un peu, avoua t-elle. Ça va être assez fastidieux de le voir maintenant.

Alors que les rayons de soleil commencèrent à se noyer dans l'eau, un terrible orage se manifesta.

Arya et Gendry coururent s'abriter dans la cabine, fuyant les trombes d'eau comme deux gamins en se tordant de rire.

Arya s'en tenait les côtes, n'en pouvant plus.

- Comme au bon vieux temps, murmura t'elle.

Gendry se pencha vers elle et enleva délicatement les mèches humides qui lui recouvraient le visage. Ils furent bientôt si proches que la jeune femme pouvait sentir son souffle sur son front. Elle glissa ses yeux noisettes dans les siens et esquissa un sourire franc. Elle sentait les mains de Gendry descendre lentement le long de sa colonne vertébrale pour se caler dans la courbure de son dos.

Son cœur s'ébranla, martelant sa cage thoracique de plus en plus vite. Mais un bruit effroyable les sépara en une fraction de seconde.

Quelqu'un frappait sauvagement de toute ses forces sur la porte de la cabine qui finit bien vite par voler en éclat.

Un colosse d'environ sept pieds occupait à présent l'encadrure de la porte. Aussi vive que les éclairs qui frappaient le ciel, Arya dégaina Aiguille de son étui.

Avec un hurlement guttural, le géant se précipita vers elle. Elle esquiva chacune des tentative, aussi agile qu'une danseuse. Elle remercia intérieurement son père de lui avoir trouvé un maître d'épée.

Elle attaqua et la lame de son épée transperça alors l'intrus en dessous des cotes. Un liquide pourpre en gicla et Arya profita de ce moment d'inattention pour lui transpercer la tête.

Il s'écroula alors à ses pieds, son corps se convulsant encore quelques minutes avant de devenir complètement inerte. Elle en profita pour analyser le cadavre. Il devait avoir une trentaine d'année, et une barbe lui couvrait le visage. La mine sombre, il daigna enfin s'approcher.

« Je me demande bien pourquoi quelqu'un en voudrait à ta vie.

- Moi je me demande surtout qui l'a envoyé, grinça la jeune femme aigrie.

- C'est sûrement un avertissement, il faudra des à présent que tu restes bien sur tes gardes. »

Ils poussèrent le cadavre sur le flan, à la recherche d'une éventuelle preuve mais ne trouvèrent rien.

La déception pouvait se lire sur le visage d'Arya tandis qu'elle sortait sur le pont.

Un brin nauséeuse elle tenta de remplir ses poumons d'air frais. La tempête avait été brève, mais intense. Son pouls était bien trop rapide. Des attaques, elle en avait essuyé une multitude mais elle n'aurait su dire pourquoi celle-ci l'avait bouleversée à ce point. Pantelante elle fit quelques pas avant de s'écrouler dans les bras de Gendry qui arrivait à ce moment là.

- À quand remonte la dernière fois que tu as mangé ? »

En guise de réponse un jet nauséabond lui éclaboussa les bottes.


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