onze

80 25 12
                                    

nous ressortâmes du monoprix avec le strict minimum vital et une paire de ciseaux. je t'avais demandé pourquoi tu en avais pris une, ta seule réponse avait été un 'tu verras'.

ensuite nous nous dirigâmes vers la plage, tu voulais m'emmener voir le coucher de soleil. on mangea sur le sable chaud, l'une tout près de l'autre. bien plus près qu'auraient dû l'être deux quasi inconnues.

et soudain, une fois notre repas terminé, tu fouillas dans ton sac pour en ressortir les ciseaux. et tu t'approchas de moi.

— bon on va couper tout ça maintenant.

l'éclat de malice dans tes yeux était réapparu. la folie qui pétillait dans tes prunelles débordait sur moi ; j'étais folle de toi. oui, folle dingue de toi. folle de toi depuis le premier éclat de voix, le premier coup d'œil, les premiers détails, la première seconde, le premier baiser. folle de toi jusqu'à mon dernier souffle.

je ne compris pas tout de suite ce que tu avais l'intention de faire et je te regardai avec des milliers d'interrogations dans les yeux. ton regard à toi était constellé de milliards d'étoiles. quelque part, tu étais déjà une étoile.

— qu'est ce que tu vas faire ?

— te donner froid pour une fois, me lançais tu dans un clin d'œil.

— autrement dis ?

— autrement dis je vais te couper les cheveux.

tu pris ma tête entre tes mains et je me laissai faire. tes doigts parcourèrent mes joues et puis tu m'attiras encore plus vers toi. et soudain un premier coup de ciseaux. une mèche blonde me tomba entre les mains. je la serrai fort dans mon poing, je savais exactement ce que j'allais en faire.

tu coupas mes cheveux pendant longtemps, tu prenais ton temps et j'adorais ça. tes doigts qui dirigeaient ma tête était doux, et le regard que tu posais sur moi pour vérifier que le rendu était cool me faisait rougir. tu ne faisais que me couper les cheveux et pourtant tu procurais un séisme dans mon cœur.

quand tu eus fini tu sortis un miroir de poche de ton sac et je pus me regarder. enfin. je vis des cheveux encore plus courts que les tiens, mais pas de beaucoup. je te ressenblais un peu, bien que tu étais brune, et j'aimais beaucoup ça. ma tête me sembla vide. mais un beau vide, un vide interstellaire dans lequel se glissait les étoiles. dans lequel se glissa une étoile : toi.

je souris à mon reflet ; j'avais les cheveux courts, comme je l'avais rêvé. comme je n'aurai jamais penser avoir le cran de les avoir. et ça c'était grâce à toi, alors merci encore une fois.

— alors tu aimes ?

je t'offris mon plus beau sourire rien que pour te faire étoiler encore un peu plus.

— j'aime tellement. depuis le temps que je rêvais d'avoir cette coupe. merci.

pour seule réponse, j'eus le droit à un doux baiser sur mes lèvres. c'était la seule réponse que je voulais.

une fois nos quelques câlins terminés, je me levai, la mèche de mes cheveux toujours entre mes doigts. et je me dirigeai vers la mer. elle était plutôt calme, assez plate, c'était joli à voir. et encore plus à entendre. le même son que ton rire, répétitif et d'une douceur infini. et puis je jettai cet ancien bout de moi dans la mer. elle se mélangera au rire de l'océan.

tu me rejoignas.

— qu'est ce que tu fais ?

— je jette mon ancienne vie à la mer. ma mère trouvait mes cheveux magnifiques, et beaucoup de gens me complimentaient dessus. mais ces beaux cheveux, comme ils disaient, sont morts pour que je commence à vivre.

adieu nos corps fanésDonde viven las historias. Descúbrelo ahora