- Rencontre -

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C'est impressionnant comme une personne peut changer notre façon d'agir ou de penser. En bref, je suis scotchée de voir à quel point tu as eu des répercussions sur ma manière d'être. Je ne m'en suis pas rendu compte tout de suite. Je crois même que la première fois que je t'ai vu, je ne t'ai pas vraiment regardé. Finalement, c'est peut-être ce qui m'avait préservé de mes sentiments.

09/01/2019 : Je suis dans le noir, éclairée par deux bougies. La flamme de l'une d'elles vacille. Sa faible, mais intense lumière clignote derrière mon verre de Muscador à moitié vide... À moins qu'il ne soit à moitié plein. C'est probablement une question de point de vue.

Je serais incapable de me souvenir de la première fois où je t'ai regardé. Par regarder, j'entends plonger mon regard dans le tien pour te voir réellement et profondément. Et quels yeux tu as ! Quand ils ne sont pas agressés par le soleil ou la clarté vive de la luminosité, ils semblent immenses. À travers ta pupille, je vois toutes les épreuves que tu as pu traverser. Comme ton cœur, elle semble se rétracter à chaque fois qu'une lumière un peu trop étincelante s'approche de toi, comme pour te protéger du moindre rayon de bonheur qui pourrait t'éblouir et finir par te brûler.

Ton iris, quant à lui, est une invitation au voyage, à la contemplation. Si je m'autorisais de nouveau à te regarder vraiment, il me faudrait attendre que tu t'en ailles pour pouvoir me décrocher d'eux. Quels grands yeux tu as ! À travers tes yeux, je peux imager tes humeurs, tes envies et ta gêne envers moi quand tu regrettes ce que tu viens de dire. Parce que tu sais que dans ma tête tout va trop vite, qu'il suffit d'un rien pour que mon esprit imagine une vérité qui n'est que partiellement fausse et, réciproquement, pas totalement vraie.

Comme je le disais, notre première rencontre m'échappe. Par rencontre, j'entends le moment où j'ai été présenté à l'homme qui m'a touchée. Celui qui me calme au seul son de sa voix, celui qui me met mal à l'aise si je dois croiser son regard, celui dont l'odeur me donne envie de passer des heures dans ses bras.

Je pense qu'on ne sait jamais vraiment quand en rencontre quelqu'un. On s'en rend compte après coup. À un moment, ça nous frappe. On se dit Mince, mais qu'est-ce que je ressens, là ! Mais c'est trop tard, il n'y a pas moyen de savoir à quel moment on a baissé sa garde.

Était-ce quand nous avons discuté au soleil, un peu à l'écart, en attendant que le groupe arrive ? Était-ce quand nous sommes allés faire du shopping ? Était-ce quand nous avons commencé à parler, le soir, pendant de longues minutes au téléphone ? Était-ce quand, au détour d'une conversation nocturne, tu m'as dit que nos conversations pouvaient être ambiguës ? Je pense qu'à cet instant je n'avais encore rien remarqué. Mais après ça, l'idée a germé et les sentiments ont déferlé, comme s'ils avaient toujours été là, à attendre de trouver une brèche dans le mur.

09/01/2019 : J'écris ces mots presque aussi vite qu'ils me viennent. Parfois, je m'emballe. J'efface les dernières lettres écrites pour reformuler, mais dans l'idée, j'écris à la vitesse de mes pensées. Elles défilent au fur et à mesure que je repense à ces instants passés avec toi. C'est fou comme les émotions peuvent rendre le moindre moment du quotidien intense.

Peu m'importe au fond de ne pouvoir rattraper le souvenir de cette rencontre. J'en ai tellement que je ne sais plus comment les contenir. J'aimerais pouvoir te parler de chacun de ces instants. De ce que j'ai ressenti.

Je pense que je vais le faire. Tu m'as dit d'avancer, de vivre pour moi. Je vais tourner ces mots à mon avantage, alors. Je vais avancer à travers mes émotions, pour pouvoir les revivre à l'infini, parce qu'elles sont à moi, qu'elles m'appartiennent. Elles me font du bien et me permettent, pour une fois, de me sentir vivre autrement que par la tristesse, la douleur ou la colère, bien que je sois intimement convaincue que l'amour soit la plus brutale des douces souffrances.

09/01/2019 : Je viens de rallumer la lumière. Pourquoi ? Pour réchauffer le liquide froid qui restait dans ma tasse. La musique vit depuis que j'ai commencé à écrire. Une playlist qui donnerait la chair de poule à n'importe quelle pucelle se fait entendre dans tout mon appartement. Pourquoi ? Parce que je vis toujours ma vie en musique. Chaque émotion, chaque intention, je pourrais l'associer à un rythme, à une mélodie entraînante. Je touche une nouvelle fois l'interrupteur. La lumière s'éteint. Je me retrouve de nouveau dans la pénombre chaude de mon appartement, simplement éclairée par deux bougies, par mon écran d'ordinateur et par Peggy LEE qui commence à chanter Fever.

Alors c'est parti. Je me jette à l'eau... Tu ne liras probablement jamais ces mots de toute façon. Si tu les lis, c'est que nous nous sommes finalement retrouvés dans l'intimité d'instants au pluriel. Ou alors que je n'arrive plus à vivre cette situation, que la proximité était trop dure à vivre et que je choisis de ne plus te parler, tout en te laissant un peu plus me voir vraiment. Il se peut aussi que j'aie sauté le pas. Que j'aie décidé d'affronter ce que je suis pleinement et honnêtement, puisque pour une fois les sensations qui déferlent en moi ne sont pas néfastes... Du moins pas encore.

Cher Diable repenti, notre rencontre aurait tout aussi bien pu avoir lieu dans le premier métro. Et nous y sommes. Face à face, à un énième carrefour de vie. Toutefois, nous pouvons décider de prendre la même direction ou de ne même pas lever les yeux l'un sur l'autre et de rester ce que nous sommes à cet instant l'un pour l'autre. Une rencontre dans le métro de la vie.

5%  d'une RomanceWhere stories live. Discover now