Le vieil homme

60 12 1
                                    

Sur le banc à la peinture écaillée
Le vieil homme est bien installé.
Affaissé, s'appuyant sur sa canne,
Sous un chapeau il dissimule son crâne.

Il fixe les enfants et sourit béatement
Comme s'il avait encore tout son temps.
Parfois il dit bonjour aux gens qui passent
De sa voix tremblante et basse.

Parfois il amène un peu de pain
Et nourrit les pigeons en tendant la main.
Celle-ci tremble et est amaigrie,
Il la cache sous son vieux pull gris.

Lorsqu'un ballon effraie les volatiles,
Il le ramasse et hausse les sourcils,
Laissant paraître un océan de rides
Témoignant de sa longue vie rude.

Souvent il se rappelle qu'il a été enfant,
Qu'alors c'était lui qui avait peur du vieux [sur le banc,
Que le vieil homme était là chaque matin
Puis qu'il ne venait plus du jour au [lendemain.
Il avait mis du temps à réaliser
Que le vieux personnage les avait quitté.

Bercé par ses souvenirs d'antan,
Il est fier d'être le nouveau vieux sur le banc.
Il veut encore venir pendant des années,
S'asseoir et contempler,
Il veut que quelqu'un se rappelle qu'il était [ici tout ce temps
Comme il s'est rappelé du vieux d'avant.

Je vous raconte tout ceci
Car en allant au parc vendredi
Le vieux n'était pas là, ni les jours suivants
Mais je veux qu'il le sache maintenant :
Je me rappelle, et me rappellerai toujours
Que le vieux était là, et j'y serai à mon tour.

Maux Croisés (recueil de poèmes)Where stories live. Discover now