Chapitre 1.2 ~ Alexandre

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Il ricana en soutenant mon regard rempli de colère, puis il me répondit :

— Ah ouais ? Arrête, tu vas me faire peur...

— Je suis très sérieux, tu m'entends ? Si jamais j'apprends que toi ou un de tes sbires, vous tentez de lui faire du mal, je vous balance aux flics.

Il rit encore plus fort à l'évocation de la police. C'était la seule menace que j'avais trouvé pour essayer de lui faire entendre raison. Apparemment, ce n'était pas suffisant, car il me dit :

— Les keufs ? Non, mais t'es sérieux ? Les keufs ?

— Tu m'as bien entendu. J'appellerai la police sans hésiter.

— Ah ouais ? Et tu leur diras quoi ?

— Je leur dirai que tu as menacé de faire du mal à Anna et qu'ils doivent t'en empêcher.

— Mon pauvre Alex... Tu es tellement pathétique...

— Tais-toi !

— Tu crois vraiment que j'ai peur des keufs ? Laisse-moi rire ! Et même si tu les appelais, ils ne pourraient absolument rien faire contre moi...

Son rire reprit de plus belle. Il me contourna avec son fauteuil et s'éloigna de moi, une fois de plus. Le pire, c'était qu'il avait raison. J'étais vraiment nul. En réalité, je n'avais aucun moyen de pression sur lui, et il en avait parfaitement conscience. La police était ma seule cartouche, et il l'avait balayé d'un revers de la main en deux secondes. Merde. J'étais mal. Je commençais à paniquer. Je serrai les poings si fort que mes phalanges devenaient blanches. Ma colère contre lui monta d'un cran et se transforma en véritable fureur. Des images d'Anna et moi en train de prendre le petit déjeuner me revinrent en mémoire et à ce moment-là, je perdis tout contrôle.

La simple éventualité de perdre ce qui était en train de se tisser entre elle et moi me fit péter un câble. En quelques enjambées, je rejoignis Olivier. J'étais comme fou de rage. J'étais en sueur, mon cœur battait à mille à l'heure, mes muscles tremblaient. Je me penchais vers lui d'un seul coup et l'empoignai fermement par le col. Mon visage était à quelques millimètres du sien. Je pouvais sentir son souffle court et affolé sur ma bouche. Ses yeux paniqués me donnèrent encore plus de courage. Je lui dis d'une voix très basse et remplie de froideur :

— Ecoute-moi bien, je ne le répèterai pas. Si tu oses toucher à un seul cheveu d'Anna, je te tue ! Tu m'as bien compris ? Je ne plaisante pas Olivier. Je ne te laisserai pas lui faire du mal !

Je restai un moment dans cette position, mon regard toujours plongé dans le sien, pour bien lui faire comprendre que j'étais on ne peut plus sérieux. Pour une fois, il ne répondit pas. Aucune réplique cinglante, pas de sourire ironique. Je lus dans ses yeux qu'il était vraiment interloqué par ma menace. Comme il ne disait toujours rien, je lançai d'une voix plus forte :

— Tu m'as bien compris ? Réponds !

— Ouais j'ai compris ! Lâche-moi !

Sa réponse me calma un peu et je relâchai ma prise en m'éloignant de lui. J'étais essoufflé comme si j'avais couru un marathon. L'adrénaline courrait dans mes veines. Je me sentais à la fois euphorique et épuisé. Mais j'étais heureux d'avoir réussi à le convaincre d'abandonner ses plans. Je me sentais tellement soulagé ! J'essayais de respirer le plus lentement possible pour faire baisser mon rythme cardiaque. Peu à peu, je retrouvais mon calme et mes esprits. Je jetai un coup d'œil vers mon frère. Il me tournait le dos et ne disait rien.

Il semblait occupé. Une fois les effets de l'adrénaline estompés, son silence me parût étrange. Je ne m'attendais pas à cette absence de réaction. Ça ne lui ressemblait pas du tout. L'atmosphère me sembla beaucoup trop silencieuse tout à coup. Quelque chose ne tournait pas rond, mais je n'arrivais pas à savoir quoi. Olivier me tournait toujours le dos, j'avais l'impression d'être devenu transparent. J'avais un mauvais pressentiment. Paniqué, je lui demandais :

— Olivier ? Qu'est-ce que tu fais ?

Il se retourna lentement vers moi. Il me fixa quelques secondes puis son sourire narquois étira de nouveau ses lèvres. Je remarquai son téléphone posé sur ses genoux. Son sourire narquois devint carnassier et je compris que quelque chose de grave allait se produire. Anna, non !

— T'inquiète pas frérot, tout va bien se passer ! me répondit-il en riant.

Au même moment, la porte de son appartement s'ouvrit en grand. J'eus à peine le temps de me retourner pour voir deux gars baraqués et tatoués se jeter sur moi. Je me débattais mais ils étaient bien trop forts pour moi. Chacun me prit fermement par les épaules. Un des deux gros bras s'empara de mon téléphone qui se trouvait dans la poche de mon manteau, le jeta par terre et l'écrasa d'un simple coup de talon. Je hurlais, j'essayais d'échapper à leur emprise mais c'était impossible, je ne faisais pas le poids !

L'un des deux molosses me donna un coup de poing tellement fort que je faillis tomber à la renverse. Ils durent me maintenir pour que je puisse rester debout. J'étais complètement sonné. Ma vue était brouillée. J'avais très mal à la mâchoire. Un goût de sang dans la bouche. Ils m'attachèrent les mains dans le dos et ils me bâillonnèrent avec un morceau de gros scotch. Je n'étais plus capable de parler, encore moins de bouger ou de réfléchir de façon cohérente.

Seule Anna occupait mon esprit. Je priais pour que ces deux armoires à glace la laissent en paix, maintenant que j'étais à leur merci. Ils pouvaient bien me faire ce qu'ils voulaient, tant qu'ils ne la touchaient pas, ça m'était bien égal. C'était peut-être ça finalement, son plan ? Me faire croire qu'il voulait faire du mal à Anna pour que je débarque ici et qu'il puisse s'en prendre à moi ?

Tout se mélangeait dans ma tête. Je vacillais, mais les deux gros bras me maintenaient fermement debout. J'étais toujours dans le brouillard à cause du coup de poing que j'avais reçu mais je réussis à distinguer le fauteuil d'Olivier qui s'approchait lentement de moi. Il leva la tête vers moi d'un air mauvais en me disant :

— Je t'ai déjà dit l'autre jour que j'étais déjà mort depuis bien longtemps frérot... Tu pensais vraiment que tes menaces à deux balles allaient m'impressionner ? Tu me sous-estimes Alex. Maintenant, on va pouvoir commencer à s'amuser !

J'aurais voulu lui cracher à la figure mais j'étais encore groggy par les coups que j'avais reçus. J'essayais de me débattre avec l'énergie du désespoir. Il regarda les deux hommes en leur faisant un signe de tête et en leur disant :

— Vous savez où l'emmener les gars ! Prévenez-moi quand vous y serez.

— Ouais, compte sur nous !

Ils me forcèrent à me retourner et me traînèrent à l'extérieur. Marcher me permit de sortir un peu du brouillard. Je me posais mille questions. Je sentais la panique m'envahir un peu plus à chaque minute. Où allaient-ils m'emmener ? Qu'allaient-ils me faire ? Où était Anna ? Je me sentais tellement impuissant ! Dans un dernier sursaut, je tentai d'échapper à leur poigne de fer. En vain. Du coup, ils resserrèrent encore plus leur prise autour de mes bras et de mes épaules. Ils se rapprochèrent d'une voiture noire qui était garée juste devant l'entrée de l'immeuble. L'un des deux gars me lâcha pour ouvrir le coffre en me disant :

— Monte !

J'eus un mouvement de recul. J'avais peur. Je regardais partout autour de moi pour essayer de trouver de l'aide. Mais il n'y avait personne, merde ! Au secours ! Aidez-moi ! J'avais envie de hurler mais le morceau de scotch collé sur ma bouche étouffait tous mes cris ! Je me débattais, je ne voulais pas entrer dans ce putain de coffre, je luttais de toutes mes forces. Soudain, l'un d'eux me frappa sur la nuque avec un objet lourd et froid. Je ressentis une douleur très vive dans mon cou qui se répercuta dans tout mon corps.

Les deux gros bras me soulevèrent pour me mettre à l'intérieur du coffre. Ma tête heurta le fond avec un bruit sourd et je sentis les poils de la moquette me gratter la joue. Ils replièrent mes jambes, fermèrent le coffre et démarrèrent en trombe. Mon cou et ma tête me faisaient très mal, je glissais lentement vers les ténèbres noires et silencieuses. Enfin, le noir m'enveloppa tout entier. Je ne sentais plus aucune douleur.

Les Ombres du Passé ~ Tome 2 ~ Apprivoise-MoiWhere stories live. Discover now